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L'article provient de TVA Nouvelles
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Gel de l'aide américaine: vers une «catastrophe» mondiale?

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6 février à 7h50
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Des milliers de programmes à l'arrêt, des millions de bénéficiaires en panique... depuis que la nouvelle administration américaine a annoncé un gel d'une grosse partie de son aide étrangère, le monde humanitaire voit poindre une «catastrophe» mondiale.

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Le 24 janvier, quatre jours après le retour au pouvoir de Donald Trump, les ONG en lien avec l'USAID reçoivent un premier courrier leur demandant de cesser toute activité financée par l'Agence américaine pour le développement international.

Une semaine plus tard, une seconde lettre, lue par l'AFP, les autorise à reprendre certaines missions «destinées à l'aide humanitaire vitale», comme la fourniture de «médicaments essentiels, les services médicaux, les abris et l'aide à la subsistance» ou encore les opérations liées à «l'eau, l'assainissement et l'hygiène en situation d'urgence».

Mais les termes employés sont vagues, et les ONG disent se sentir perdues, à mesure que le nouveau pouvoir américain s'en prend à l'USAID et rend ses financements plus précaires.

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L'homme le plus riche du monde, Elon Musk, chargé par le président Donald Trump de faire le ménage au sein du gouvernement fédéral, a en effet annoncé qu'il allait «fermer» cette agence «dirigée par une bande de fous extrémistes». Le secrétaire d'État américain Marco Rubio s'est, lui, propulsé chef par intérim de l'USAID afin de mettre fin, selon lui, à l'«insubordination» qui y règne.

«Aujourd'hui, les États-Unis débattent du devenir de leur agence de développement. Mais ce sujet concerne la planète entière», s'alarme Kevin Goldberg, le directeur de l'ONG Solidarités international, interrogé par l'AFP.

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42% de l'aide mondiale

Car l'USAID gère un budget de 42,8 milliards de dollars, qui à lui seul représente 42% de l'aide humanitaire déboursée dans le monde. La fermeture des robinets américains se fait dès lors ressentir partout.

Comme au Mozambique, dans la province de Cabo Delgado, où sévit une insurrection liée au groupe État islamique. Des opérations de «relance agricole» destinées à sortir des milliers de déplacés de cette crise humanitaire sont ainsi «mises en pause» du fait des annonces américaines, explique Kevin Goldberg.

Au Yémen, des distributions d'argent liquide assurées par Solidarités internationales, «particulièrement efficaces pour relancer l'économie locale» en zone de conflit, sont également à l'arrêt pour les mêmes raisons, poursuit-il.

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Idem en Syrie, pays sortant de décennies de dictature, où Solidarités international ne peut plus reconstruire des infrastructures d'eau et d'assainissement du fait du gel américain.

«On rajoute de la crise à la crise», observe M. Goldberg.

Sachant que l'ONG française dit aider 5 millions de personnes chaque année, et que 36% de son budget provient de fonds américains, l'aide apportée à près de 2 millions de bénéficiaires est désormais mathématiquement remise en question, déplore-t-il.

Le gel des crédits de l'USAID «aura réellement des conséquences vitales, voire mortelles, pour des millions de personnes», affirme à l'AFP Daryl Grisgraber, en charge des questions humanitaires pour la branche américaine d'Oxfam.

Alors que l'administration américaine doit se prononcer sous 90 jours sur la suite des opérations, «il est très probable qu'il y aura d'énormes réductions sur l'aide qui peut continuer à être acheminée», s'effraie-t-elle.

«La réalité actuelle est la suivante: des médicaments vitaux expirent sur les étagères alors que des enfants tombent malades. L'aide alimentaire pourrit dans les entrepôts alors que des familles souffrent de la faim», tonne de son côté Tom Hart, le président d'InterAction, une alliance de plus de 160 ONG.

«Il ne s'agit pas seulement d'une catastrophe humanitaire, mais d'un gaspillage inadmissible des ressources du contribuable», poursuit-il dans une interview à CBS News.

En Afrique du Sud, qui compte la plus importante population séropositive au monde, des patients trouvent porte close depuis la suspension de l'aide américaine.

«Incertitude totale»

Aux Philippines, où celle-ci avoisinait les 190 millions de dollars en 2023, une responsable d'ONG a confié à l'AFP se trouver «dans l'incertitude totale» quant à la poursuite de son action, faute d'avoir reçu notamment des vaccins contre la tuberculose ou encore des fonds dédiés aux victimes de violence.

Selon plusieurs acteurs interrogés, les financements liés aux questions de genre ou de sexualité risquent d'être tout particulièrement ciblés par la nouvelle administration conservatrice américaine.

MSI Reproductive choices, une ONG britannique travaillant notamment autour de la contraception et de l'avortement, sait que près de 10% de son budget provenant du gouvernement américain pourraient disparaître. Et que d'autres ONG de ce secteur seront plus touchées encore.

Dans les 36 pays où elle opère, ses employés «sentent déjà la peur et le chaos de ne pas savoir ce qui va continuer à être soutenu. Et ce qui va disparaître», remarque auprès de l'AFP Beth Schlachter, cadre de cette organisation, qui s'interroge sur la pertinence géopolitique de la stratégie américaine.

«L'argent, c'est le pouvoir. (...) Vous ne pouvez pas détruire les choses de la sorte et (...) vous attendre à avoir l'influence que vous souhaitez» ensuite, analyse-t-elle.

«Le soft power, c'est l'attrait de l'Amérique», acquiesce Carlyle Thayer, un professeur émérite à l'Université australienne de Nouvelle Galles du Sud.

S'en priver en coupant les fonds de l'USAID, c'est, juge-t-il, «du miel pour les oreilles chinoises» quand Pékin et Washington sont en pleine guerre d'influence.

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