«Ce n’est pas fini parce que Trump et bien d’autres de la droite veulent retourner en arrière, quand les femmes avaient 22 enfants» - Janette Bertrand

Guillaume Picard
En voyant l’installation vidéo documentaire Le siècle de Janette, qui retrace le parcours de la grande Janette Bertrand à travers les moments forts de l’histoire du Québec depuis 1925, on s’étonne de toute la vitalité qui anime la nouvelle centenaire, tant elle a mené de combats en tant que féministe et humaniste.
Droits des femmes, droit à l’avortement, droits des homosexuels, Janette Bertrand n’a jamais cessé de se battre afin que tous les êtres humains soient égaux.

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La fêtée était tout sourire et ravie de jaser, mardi, alors qu’elle célébrait son 100e anniversaire de naissance à la Place des Arts en compagnie de l’une de ses héritières, Léa Clermont-Dion, qui a réalisé cet émouvant portrait conçu par Martin Bundock, lequel permet à la journaliste, autrice et animatrice de remonter le temps pour mieux se raconter.

«C’est heureux qu'on voie ça parce qu’on dit toujours qu’on n’avance pas. En fait, on a fait des pas de géants, tout le monde. Ça fait 8000 ans que les hommes dominent, on ne peut pas changer ça dans le temps de le dire. Il s’est quand même passé des choses», a dit Janette Bertrand au cours d’une entrevue avec l’Agence QMI.
Quand on lui fait remarquer que beaucoup d’acquis sont menacés, notamment le droit et l’accès à l’avortement, elle reconnaît qu’il faut demeurer «vigilants» et que beaucoup de luttes restent à mener.
«Ce n’est pas fini parce que Trump, et bien d’autres de la droite, ils veulent retourner en arrière, quand les femmes avaient 22 enfants.»

Dans ce documentaire, elle raconte également des moments significatifs qui ont fait d’elle une femme engagée, comme le moment où une fillette de son quartier a été violée et tuée par des soldats pendant la Deuxième Guerre mondiale. Son plus vieux souvenir remonte à la visite du R-100, un dirigeable britannique qui a survolé la métropole en 1930.
Janette Bertrand accueille les compliments et les remerciements, notamment de la part d’homosexuels qu’elle a beaucoup aidés. Elle se montre généreuse et partage les honneurs avec d’autres femmes qui ont fait avancer les choses à leur façon, comme l’ex-première ministre du Québec Pauline Marois ou la comédienne Guylaine Tremblay, qui la personnifiera du 9 avril au 17 mai sur la scène du Théâtre Jean-Duceppe, dans la pièce Janette.

«Plusieurs femmes ont fait autant de choses que moi, elles sont aussi fortes que moi, mais pas toutes autant connues que moi.»
«Tu sais, je suis capable, à 100 ans, d’avoir du recul puis de voir quand ces événements dans le documentaire se sont passés, puis ce qui est arrivé exactement. Je me souviens quand le pape a dit: “La contraception, c’est pêché.” Les femmes, sans se concerter, ont arrêté d’aller à l’église. Je me souviens aussi qu’on discutait entre femmes dans les toilettes d’un théâtre et qu’on se disait: “Qu’est-ce que l’Église connaît là-dedans, ce n’est pas eux qui vont décider si je veux un autre enfant ou pas!”»
Léa Clermont-Dion se branche à l’énergie contagieuse de Janette

En réalisant cette installation vidéo documentaire, Léa Clermont-Dion, qui voit Janette Bertrand comme une mentore, a été encore une fois soufflée par sa «persévérance» à travers tous les changements qui se sont opérés ces 100 dernières années. Elle avait aussi réalisé en 2022 le documentaire Janette et filles.
«Janette a été témoin et actrice de ce siècle-là. Chaque fois que je vois ou que je parle à Janette, je suis galvanisée. Elle a une énergie qui est contagieuse, même encore aujourd’hui. Elle a une vraie envie d’aider les autres, les personnes marginalisées, sans aucun jugement.»
Léa Clermont-Dion, qui est en train d’adapter pour le cinéma le roman Faire les sucres, de Fanny Britt, ne veut pas penser au moment où celle qu’elle considère comme sa «grand-maman» et une «vraie superwoman» ne sera plus là, tant elle est importante à ses yeux et qu’elles se comprennent tout naturellement.
«Je suis dans le déni. Je ne veux pas penser à ça, je profite de chaque moment avec elle.»
L’installation vidéo documentaire Le siècle de Janette est accessible gratuitement du 26 mars au 18 mai dans le Salon d’exposition de la Place des Arts.
Soulignons que des segments vidéo, des portraits en mouvement et des citations significatives de Janette Bertrand sont également projetés jusqu’au 20 avril sur le pavillon Président-Kennedy de l’UQAM, dans le Quartier des spectacles. Le but est de se souvenir de son engagement, pour les plus vieux, et de faire découvrir cette femme exceptionnelle aux plus jeunes.