«Pour bien vieillir, il faut avoir des projets», confie Janette Bertrand qui fête ses 100 ans le 25 mars


Sarah-Émilie Nault
Dans la deuxième partie de cette généreuse entrevue, Janette Bertrand a abordé le secret de sa longévité: avoir des projets et rester active.
Question: Vous fêterez votre centième anniversaire le 25 mars. Quel est le secret de votre longévité?
Janette Bertrand: «Il faut que tous les jours je me lève pour quelqu’un ou quelque chose. Qu’est-ce qu’on fait aujourd’hui? Pour être heureux quand on vieillit, il faut avoir des projets: faire un voyage, voir des films, rencontrer des gens... Bref, s’organiser pour avoir des projets. Ça peut être très simple: sortir de la maison chaque jour pour aller à la bibliothèque ou au dépanneur, améliorer ma santé. C’est le temps, sinon on devient morose. Et ne pas attendre le plaisir des autres, il faut se faire plaisir à soi-même! »
Q: Vivre cent ans, ça demande une santé de fer. Ne croyez-vous pas posséder une énergie exceptionnelle?
JB: «Oh non, j’ai mal partout. J’ai de la misère à marcher. Mes oreilles vont moins bien, mais surtout, je ne vois à peu près pas en ce moment. J’ai eu une greffe dans l’œil il y a un an et je vais en avoir une autre le 1er mai. Il faut le faire! J’ai des problèmes de santé, mais c’est correct, mon corps est vieux. Mais je suis en vie. J’ai la chance d’être en vie.»
Q: Quel est votre rapport avec votre corps de centenaire?
JB: «C’est sûr que m’étendre sur la plage en Martinique, c’est pas bien beau, donc je m’étends moins [rires]. Mais quand même, je me dis: est-ce que je vais me priver de me baigner, de me promener en maillot de bain et de m’étendre au soleil pour le regard des autres? Non! Mon corps, même s’il est tout plissé, est beau, car il m’a tenu jusqu’à cent ans. Je ne peux pas lui en vouloir!»
Q: Vous pratiquez encore certains sports?
JB: «Oui, quand je suis en Martinique, je vais me baigner tous les jours et je fais de l’aquaforme dans la mer pendant 30 minutes tous les jours. Il faut que je bouge, car si je m’assois, je sais que je ne me relèverai pas. Il faut que je me force. Ce n’est pas facile et je fais de la culpabilité quand je ne le fais pas. Je fais de la bicyclette fixe aussi, il faut que je me donne des coups de pied. C’est du travail sur soi. Chaque fois que je suis découragée, il faut que je le dise, ensuite je me trouve des raisons pour ne plus l’être.»
Q: Dans vos rêves les plus fous, vous imaginiez-vous vivre jusqu’à 100 ans?
JB: «Non, moi je pensais qu’à 80 ans, tout était fini, comme l’écrivaine Colette qui est mon idole et qui a dit: «J’arrête tout à 80 ans». Moi, je n’ai pas arrêté, j’avais trop d’ouvrage [rires], trop de livres à écrire, trop de choses à dire encore.»
Q: Avez-vous peur de vieillir?
JB: «Si tu pars dans la vie en te disant que tu veux rester jeune et que c’est un malheur de vieillir, tu es malheureux et tu rends les autres malheureux. Si tu as peur de vieillir parce que tu penses que tu perds tout, c’est sûr que tu vas être de mauvaise humeur. La vieillesse n’est pas un naufrage. Il y a beaucoup de choses à faire, beaucoup de gens à rencontrer, beaucoup de nouvelles amitiés à développer et beaucoup d’amour encore à vivre. Alors là, tu es de bonne humeur.»