Grâce au succès colossal de «Broue», l'acteur Michel Côté avait développé un lien unique avec les Québécois, affirme Maxime Le Flaguais, co-auteur d'un livre biographique sur son père


Louise Bourbonnais
Un peu moins de deux ans après son décès, un livre biographique sur Michel Côté vient de paraître, signé par son fils, le comédien Maxime Le Flaguais, ainsi que par le journaliste Pierre Gince. C’est à travers le regard de ses proches, ses amis et ses collègues, que l’on découvre la vie et les traits de caractère d’un des acteurs les plus aimés au Québec, disparu en raison d’une maladie rare.

L’ouvrage est écrit par tranches de témoignages sous forme de questions-réponses, et ils ont été nombreux à répondre à l’appel afin d’y participer. Il y a bien évidemment sa femme des 50 dernières années, Véronique Le Flaguais, ses fils, Charles et Maxime, sa mère, Jeannine, ses frères, Sylvain et Danny, et de nombreux acteurs, dont Marc Messier, Marcel Gauthier, Francine Ruel, Claude Meunier, Luc Guérin, Benoît Brière, Martin Drainville, Antoine Bertrand, Karine Vanasse, ou encore l’ex-pilote Robert Piché.

Outre les 50 personnes qui ont répondu aux questions de l’auteur, Maxime Le Flaguais a été le seul a avoir magnifiquement écrit ses états d’âme sur son père en guise d’introduction. Un point de vue touchant qui ne laissera personne indifférent.
«Mon père n’était pas friand de biographies, même s’il en lisait beaucoup, il avait déjà refusé plusieurs offres de biographes de son vivant», confie Maxime Le Flaguais en entrevue.
«On a cependant pensé que mon père aurait apprécié cette formule qui donne la parole aux autres.»

On dit de Michel Côté qu’il était l’acteur le plus aimé des Québécois, mais avec humilité, Maxime préfère nuancer, précisant plutôt qu’il était dans le top 5. Selon son fils, ce serait principalement son rôle dans Broue qui lui aurait fait gagner la sympathie du public.

«Il a joué Broue 3322 fois ce qui lui a permis de rencontrer la moitié des Québécois vivants, il a joué devant plus de trois millions de personnes», fait remarquer Maxime. Cela crée un lien privilégié avec son public.

Broue est d’ailleurs considérée comme le plus grand succès de l’histoire du théâtre au Québec.
Grande humilité

Lorsque l’on parle de Michel Côté, originaire d’Alma, né en 1950 dans un milieu modeste, l’une des qualités qui revient constamment au fil des nombreux témoignages, outre son immense talent d’acteur, est sa grande humilité. Jamais sa notoriété ne lui est montée à la tête, et ce, même s’il a joué dans une vingtaine de films, dont Cruising Bar, C.R.A.Z.Y., Piché, entre ciel et terre en plus des nombreuses séries télévisées.

«Mon père était modeste et je crois que les Québécois apprécient beaucoup ça», fait remarquer le coauteur.
«Mon père aimait les voitures sport, il a rêvé toute sa vie de s’en acheter une, mais il a toujours refusé pour ne pas flasher devant les autres», révèle Maxime Le Flaguais, ajoutant qu’il préférait demeurer humble.

«Même malade, mon frère et moi on lui a proposé de louer une Jaguar pour se promener, mais il a refusé, incapable de faire cela», ajoutant qu’il craignait la perception des autres et ne voulant pas se montrer au-dessus de la mêlée, malgré ses moyens.
«Mon père avait de belles valeurs et était aussi économe. Jamais il n’écrasait personne, il aimait les autres.»

Panser les plaies
Presque deux ans après son décès, le deuil demeure sournois.
«Au moment où on pense que les blessures sont fermées, il suffit d’entendre une chanson à la radio pour que les plaies s’ouvrent de nouveau», révèle Maxime.
À écouter Maxime parler de son père, nul doute que le père et le fils ont eu une superbe relation sur tous les plans.

«En tant qu’acteur, mon père a brillé, ça, vous le savez, il a aussi brillé comme humain et particulièrement comme père, souligne-t-il dans son livre. Je ne suis pas dans l’ombre de mon père, je crois plutôt que je suis dans sa lumière.»
Il est conscient que son père craignait de ne pas être assez présent pour lui et son frère, alors qu’il devait quitter la maison pour aller jouer Broue le soir. Pourtant...
«Cette crainte semble avoir donné à nos moments passés ensemble un éclat vibrant et joyeux qui m’habite encore aujourd’hui. Quand il était là, il était là à deux cents pour cent», écrit Maxime qui estime que son père lui a tout appris dans le métier.

Chose certaine, Michel Côté a été une source d’inspiration pour Maxime.
«Papa, ta mort m’a transformé. En me passant le flambeau, tu m’as mené vers une lucidité qui m’était étrangère jusque-là... Tout est devenu plus précieux... je tâche de comprendre ma quête, de dompter mes rancœurs; je saisis mieux la valeur des fêtes, la noirceur des peurs, la teneur des pleurs...», écrit-il.
Une maladie rare
Si Michel Côté a été en grande forme sa vie durant, jouant même au hockey pratiquement jusqu’à la fin de sa vie, il n’a malheureusement pas été épargné pour autant côté santé. Les derniers mois ont été difficiles et l’acteur a beaucoup souffert de sa maladie de la moelle osseuse.

Son fils Charles, qui est architecte, lui a fait don de moelle osseuse.
«Au départ, mon père a réagi positivement à la greffe de moelle osseuse. Son corps a recommencé à produire de bonnes cellules. Cette greffe lui a procuré plusieurs semaines de bon temps. Il a pu retourner chez lui et être avec ma mère», explique Charles dans son témoignage.

Malheureusement, cela n’a pas suffi. Il est décédé en mai 2023 à l’âge de 72 ans.
Hommages

Michel Côté a reçu de nombreux prix et distinctions. Entre autres :
- En 1989, il a reçu le prix Gémeaux du meilleur premier rôle masculin dramatique pour T’es belle, Jeanne.
- En 1998, il remporte le Prix MetroStar de la Personnalité masculine de l’année.
- En 1999, il gagne le Prix Gémeaux du meilleur premier rôle masculin dramatique pour Omertà.
- En 2006, il obtient le Prix Jutra du meilleur acteur de soutien pour son rôle dans le film C.R.A.Z.Y.
- En 2013, il reçoit le Prix Jutra-Hommage pour l’ensemble de sa carrière.

Michel Côté et nous - 50 regards sur l’homme et son œuvre
Maxime Le Flaguais et Pierre Gince
Éditions de l’Homme
293 pages / Et cahier photos

En plus de son travail de comédien, Maxime Le Flaguais est aussi parolier. Il a écrit les paroles de plusieurs chansons du nouvel album d’Alex Nevsky, Tout ce que l’aube promet. Il compte jouer bien entendu, mais souhaite aussi écrire dans divers projets et faire également de la réalisation.