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L'article provient de Le Journal de Montréal

Chanteur légendaire, acteur médiocre et aventurier exemplaire: la vie de démesure de Jacques Brel

AFP
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Photo portrait de Louise Bourbonnais

Louise Bourbonnais

9 mars à 7h30
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On dit de Jacques Brel qu’il a eu une vie de démesure. Le chanteur d’origine belge qui a conquis ses fans dans les années 1950 sur deux décennies a réussi à se démarquer en raison de sa voix puissante et de son travail acharné. Dans cette biographie, où la lumière est projetée sur cet homme dont la vie a été des plus intenses, on apprend qu’il était aussi poète, musicien, compositeur, scénariste, acteur, réalisateur et, surtout, un grand amoureux de son métier. Lui qui avait également une relation particulière avec le Québec nous a malheureusement quittés à seulement 49 ans.

Certes, Jacques Brel a marqué l’univers de la musique francophone. Grand parolier, guitariste, poète dans l’âme et, bien entendu, grand chanteur, c’était un artiste complet, à part entière. Néanmoins, derrière cet homme bourré de talent, se cachait un être complexe, mystérieux, voire énigmatique, que même ses proches avaient du mal à percer.

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Né en 1929 à Schaerbeek en Belgique, Brel passe une partie de son enfance dans la cartonnerie de son père. Il y travaille comme ouvrier, son père souhaitant qu’il amorce son apprentissage complètement au bas de l’échelle. C’est là qu’il découvre qu’il est un fils de bourgeois. Ce chapitre de sa vie est une sorte de révélation sur les inégalités sociales.

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Enfant, il écrit déjà des textes et des chansons. Il n’aime pas l’école et redouble deux années scolaires. Il s’ennuie, mais rêve en silence. Il s’offre sa première guitare à 16 ans et apprend à jouer du piano avec sa mère. Il n’apprécie guère les valeurs familiales attachées à l’argent. Se sentant encartonné, il décide de chanter en solo dans des cabarets. Son père tentera de l’en empêcher, mais en vain. Il part pour la France avec en poche une maquette sur 78 tours. Son père le prévient qu’il ne l’aidera pas financièrement et que, s’il part, il ne pourra récupérer son poste à la cartonnerie. Néanmoins, Brel chante sous un pseudonyme soir après soir jusqu’à ce qu’il se fasse remarquer. La route est longue et difficile, et pour amasser quelques sous, il donne des cours de guitare.

Il devra attendre 1956 pour connaître le succès.

Ses chansons Quand on n’a que l’amour et Ne me quitte pas ont été ses premiers grands succès.

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Dans ses chansons, on reconnaît le poète qui porte un regard philosophique sur la vie. Ses thématiques tournent souvent autour de l’amour, mais également sur le passage du temps, la solitude et la souffrance de l’être humain. Ses propres rêves, parfois inassouvis, et ses souffrances ont souvent été racontés dans ses chansons.

Ses chansons ont dépassé les frontières de sa Belgique natale et de la France. D’ailleurs, plusieurs d’entre elles ont été traduites en différentes langues et reprises par de grands artistes.

Il arrêtera de faire de la scène à 37 ans après avoir réalisé qu’il s’était trompé de complet en chantant. Conscient que son public n’est pas dupe, il se tourne vers le cinéma sans connaître autant de succès. Il ira jusqu’à réaliser un film, Franz, en 1971, qui n’a pas connu le succès escompté.

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Photo courtoisie Archives nationales, fonds Antoine Désilets, La Presse, L’Action catholique
Photo courtoisie Archives nationales, fonds Antoine Désilets, La Presse, L’Action catholique

On raconte également que Brel a aimé côtoyer Félix Leclerc et qu’il lui doit en partie son succès. Les deux chanteurs se sont d’abord connus à Paris. Puis, en 1958, Brel a habité quelque temps au Québec, notamment à Vaudreuil, dans la maison de Félix. Brel aimait particulièrement les Québécois et adorait notre accent. Lors de sa tournée d’adieu en 1967, il a joué à Québec, à Montréal ainsi qu’à Chicoutimi.

Pilote et aventurier

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Brel était habité par un esprit aventurier, souhaitant par moments vivre tel un nomade. Peu de gens étaient au courant, à l’époque, qu’il avait amorcé une formation de pilote dans un aéro-club près de Genève, en Suisse, un lieu qu’il aimait particulièrement.

«L’avion est le seul endroit où je suis bien et où je n’ai pas besoin de musique», a-t-il confié à son instructeur, avec lequel il s’est lié d’amitié. Il passera ses examens en 1970 avec succès. Il achètera un bimoteur, un Beechcraft Baron 55. Voulant toujours se dépasser, il poursuit sa formation pour obtenir une qualification sur moteur à réaction, pilotant un Learjet. Pour Brel, voler signifiait la liberté et l’évasion. Si bien qu’un jour, sans prévenir, il quitte la France à bord de son avion pour traverser l’Atlantique et se rendre jusqu’en Guadeloupe en passant par le Groenland, où il a d’ailleurs connu des ennuis techniques.

Photo : Jean-Pierre Leloir
Photo : Jean-Pierre Leloir

Malheureusement, un cancer du poumon le frappe alors qu’il est âgé de 45 ans, l’obligeant à s’arrêter de voler, incapable d’assurer son avion.

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Voulant défier la maladie, son esprit aventurier l’interpelle, si bien qu’il décide d’entreprendre un tour du monde en voilier. Il se rendra jusqu’aux Marquises, en Polynésie française, pour s’y installer quelques mois, jusqu’à ce que l’évolution de son cancer l’oblige à rentrer en France.

Amoureux des Marquises

Brel a apparemment été très heureux aux Marquises. C’est d’ailleurs là qu’il a composé son dernier album, Les Marquises.

Durant ce temps, souhaitant rendre service, il s’est improvisé pilote-taxi pour les insulaires qui ont peu de moyens de transport entre les Marquises et Tahiti.

À sa demande, son corps repose au cimetière d’Atuona, aux îles Marquises, tout près de l’endroit où a été enterré Paul Gauguin.

Un homme libre

C’est connu, Brel aimait les femmes et il en a eu plusieurs. Même marié, au sommet de sa carrière, il faisait des tournées et côtoyait plusieurs femmes. Il est resté marié à la même femme, Thérèse Michielsen, surnommée Miche, qui lui a laissé toute sa liberté, le laissant changer de maîtresse au gré de ses humeurs. Il a eu trois enfants avec sa femme à qui il a accordé peu d’importance tout en vivant avec d’autres femmes, dont l’actrice Suzanne Gabriello et la danseuse et actrice guadeloupéenne Maddly Bamy, entre autres. Rien ni personne, ni même sa femme, ne pouvait l’arrêter à part la maladie.

Malgré quelques rémissions, Brel a apparemment beaucoup souffert en se battant pendant quatre ans contre son cancer du poumon. Il est décédé en 1978 à seulement 49 ans. Il aurait aujourd’hui 95 ans.

Courtoisie (ajouter source)
Courtoisie (ajouter source)

Tout sur Jacques Brel
Collectif d’auteurs
Culture Rock
146 pages

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