Autobiographie d'Elliot Page: ses parents religieux ont très mal réagi quand il leur a avoué son homosexualité
Louise Bourbonnais
Avec une feuille de route d’exception, une carrière internationale à la télévision et au cinéma et déjà à seulement 21 ans une nomination aux Oscars, Elliot Page semblait mener une vie de rêve.
Pourtant, en lisant son autobiographie, qui vient de paraître en français, on constate que l’acteur originaire d’Halifax qui compte une vingtaine de films à son actif s’est torturé psychologiquement en raison de son genre. Outre une quête identitaire des plus pénibles, le jeune acteur a été victime d’agression sexuelle, d’intimidation et d’homophobie toute sa vie.
L’autobiographie d’Elliot Page est riche en anecdotes. En plus d’être très bien écrite, le jeune acteur se confie sans filtre, sans gêne et en toute honnêteté, si bien qu’on ne lâche pas ce livre avant de se rendre à la fin.
Déjà enfant, Elliot Page (Ellen Page à l’époque) souffre d’un mal-être indescriptible. Elle aurait voulu être un garçon. À seulement neuf ans, elle manifeste à sa mère son désir d’être un garçon et lui demande si elle pourra le devenir un jour. Elle se coupe les cheveux courts et tente d’agir comme un garçon. Ses parents s’imaginent que l’idée va passer avec le temps.
Ellen est originaire de la ville de Halifax, capitale de la Nouvelle-Écosse, sa mère est enseignante, la meilleure de la province selon Elliot, donnant des cours de français et d’anglais, tandis que son père est graphiste. Ellen n’a que quelques mois lorsque ses parents divorcent, se partageant la garde.
Néanmoins, Ellen est plus proche de sa mère, et se confie plus facilement à elle. D’emblée sa relation avec son père est plus difficile: c’est un homme sévère et violent.
À 10 ans, elle décroche un premier rôle dans la série télévisée Pit Pony, sans avoir étudié dans le domaine.
À l’adolescence, Ellen est davantage attirée par les filles que par les garçons. Elle décroche plusieurs rôles au fil des ans, passant du cinéma indépendant aux blockbusters.
Elle gagne en notoriété avec le thriller psychologique Hard Candy en 2005, suivi de X-Men en 2006, mais c’est davantage en 2007 qu’elle rencontre un important succès avec le film Juno, lui permettant une nomination aux Oscars en 2008, dans la catégorie de la meilleure actrice en plus de se trouver en nomination aux Golden Globes et aux British Academy Film Awards. Néanmoins, la gloire ne lui apporte pas le bonheur.
Quête identitaire difficile
Dans son livre, l’acteur raconte en détail ses nombreuses relations sexuelles des plus compliquées tant avec des hommes qu’avec des filles.
Il décrit de façon explicite sa première relation sexuelle avec un homme de 16 ans, tout comme les expériences ratées avec les femmes. Il va si mal qu’il souffre de troubles alimentaires, compte ses calories de manière obsessionnelle et boit de la tisane pour assouvir sa faim. Il vit une dépression, beaucoup d’anxiété et de graves crises de panique. Et comme si ce n’était pas suffisant, il s’automutile.
« Il m’arrivait d’emporter avec moi un petit couteau dans ma chambre, et je plaçais la pointe sur le haut de mon bras, près de l’épaule, je faisais lentement descendre la lame en appuyant dessus jusqu’à voir apparaître ce filet rouge qui me soulageait », confie l’acteur dans son livre.
Violence et agression sexuelle
Lorsqu’Elliot a admis son homosexualité à ses parents, tout a basculé.
Sa mère, Martha, fille de pasteur, lui a dit que l’homosexualité n’existait pas. Son père, Dennis, lui, l’a repoussé et a fait preuve de violence.
Il a connu du harcèlement moral de la part de sa belle-mère et de ses enfants. Le rejet, les insultes et même les menaces de viol font partie du lot. Son univers familial du côté de son père est des plus violents et voilà déjà cinq ans qu’ils ne se parlent plus.
Heureusement, après plusieurs années, sa mère a finalement accepté le genre de son fils.
Outre la violence familiale, Elliot raconte avoir été victime d’homophobie et d’agressions sexuelles. Alors qu’il s’est établi à Hollywood, il raconte avoir été victime d’homophobie de manière récurrente, principalement de la part d’une célébrité dont le nom n’est pas révélé.
À cela s’ajoutent des agressions sexuelles et du harcèlement par des personnes bien en vue à Hollywood, notamment de la part d’un réalisateur durant son adolescence.
Ce n’est qu’en 2014, alors qu’il vit jusque-là dans le mensonge, qu’il déclare publiquement son homosexualité.
Puis en 2020, alors que sa carrière connaît une importante ascension, Elliot parle publiquement de ses opérations chirurgicales nécessaires afin de devenir un homme. L’opération trans confirme ainsi sa transition de genre et il indique qu’il souhaite désormais se faire appeler Elliot. Sa femme, la danseuse canadienne Emma Portner qu’il a épousée en 2018, le soutient dans sa démarche, même s’ils ont divorcé depuis. Aujourd’hui, l’acteur de 36 ans assume complètement son genre, se sent parfaitement bien dans son corps et se dit en paix avec lui-même.
Il est devenu l’une des personnalités transgenres les plus célèbres au monde tout en étant l’un des plus grands défenseurs des LGBTQ+ de sa génération.
Il espère que son livre sera un objet réconfortant pour ceux qui vivent des situations semblables à la sienne.