Ces entrepreneurs technos canadiens pourraient être nos futurs Elon Musk


Sarah-Florence Benjamin
Des géants canadiens de la tech ont lancé une plateforme avec pour objectif d’influencer les futures politiques au pays. Alors que des élections sont attendues au fédéral, cette volonté de se rapprocher des décideurs rappelle l’omniprésence de la Silicon Valley au sein de la nouvelle administration Trump.
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Build Canada, c’est le nom de cette nouvelle plateforme dirigée notamment par Daniel Debow, ancien vice-président chez Spotify.
Les entrepreneurs canadiens y sont invités à donner leurs idées de politiques, pas seulement économiques, mais aussi au niveau de l’immigration, de la santé, du transport ou même de la culture.
Avant d’être publiées sur le site, les idées soumises sont reformulées et même approfondies avec l’intelligence artificielle (IA) et des «experts en politique».
Le lancement de la plateforme, qui est décrite comme «projet à court terme» et pas «un groupe de lobbying», survient alors que les grands patrons de la Silicon Valley semblent plus près que jamais du pouvoir aux États-Unis. On n’a qu’à penser au patron de Tesla, Space X et X, Elon Musk, que Donald Trump a nommé au sein de son administration.
D’autres entrepreneurs et investisseurs en capital-risque sont également dans l’entourage du nouveau président.

Qui sont-ils?
Build Canada a été enregistré comme organisme à but non lucratif avec Daniel Debow comme directeur officiel.
Parmi les 28 partisans affichés sur le site de Build Canada, on retrouve Tobias Lütke, cofondateur de Shopify, Andrew Graham, PDG de Borrowell, Anthony Lacavera, fondateur de Globalive, Michael Katchen, cofondateur de Wealthsimple, Katherine Homuth, PDG de SRTX, Michael Serbinis, PDG de League, Shane Parrish, fondateur de Farnam Street, et Wayne Pommen, ancien PDG de Paybright.
On comprend que ces entrepreneurs sont ceux qui proposeront les idées qui seront publiées sur la plateforme.
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Leurs politiques
Pour le moment, seules quatre idées - ou mémos pour reprendre la terminologie de Build Canada - ont été publiées.
Martin Basiri, PDG de la startup Passage, propose de prioriser l’immigration de certaines personnes selon un système de pointage basé sur leur impact potentiel sur l’économie du Canada. Les immigrants occupant un emploi bien payé ainsi que les diplômés des 50 universités les plus prestigieuses seraient avantagés par ce système.
L’immigration humanitaire, selon Basiri, devrait être plafonnée à seulement 5% de l’immigration totale au Canada.
Il suggère aussi que chaque membre d’une même famille doive faire une demande individuelle pour la résidence permanente. Les entrepreneurs, eux, auraient droit à une résidence permanente immédiate grâce à un programme de visas particuliers.
Michael Serbinis, quant à lui, voudrait changer la Loi canadienne sur la santé pour donner un accès instantané au dossier médical des patients et des professionnels de la santé.
Michael Litt, le PDG de Vidyard, une compagnie qui crée des logiciels d’hébergement de vidéos, propose pour sa part une refonte des courts-métrages Minutes du patrimoine diffusée sur Tiktok et YouTube avec des influenceurs «qui veulent parler de ce qui fait du Canada le meilleur pays au monde» pour raviver la «fierté canadienne».
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Réalignement avec les conservateurs
Même Build Canada se dit non partisan et qu’il n’est pas affilié officiellement au Parti conservateur du Canada, ses membres s’attendent à ce que la formation dirigée par Pierre Pollièvre remportent la prochaine élection fédérale, selon le média The Logic qui cite des sources près de la plateforme.
Plusieurs des entrepreneurs partisans de Build Canada ont d’ailleurs déjà critiqué le gouvernement Trudeau.
Bien que Pierre Poilievre n’ait pas l’habitude de rencontrer des lobbyistes, il s’est entretenu avec des cadres de chez Shopify au cours de l’année 2024.
Dans un tweet datant de décembre dernier, il déclarait que la compagnie était «la success-story d’entrepreneuriat canadien la plus spectaculaire de ce siècle» et que leur PDG, Tobias Lütke, et leur directeur des opérations, Kaz Nejatian avaient «la colonne pour tenir tête et se battre pour tous les entrepreneurs».
Shopify is not only the most spectacular entrepreneurial Canadian success story in this century, its leaders Tobias Lütke & Kaz Nejatian have the backbone to stand up and fight for all entrepreneurs.
— Pierre Poilievre (@PierrePoilievre) December 14, 2024
Corporate Canada needs to learn from them in every way. https://t.co/THIcIJ7H0q
En janvier, The Logic faisait par ailleurs état d’un mouvement des leaders de la tech canadienne du Parti libéral au Parti conservateur. Ce déplacement vers la droite rappelle ce qui s’est passé aux États-Unis. Après avoir supporté publiquement le Parti démocrate en 2016 et 2020, Mark Zuckerberg, David Sacks et d’autres patrons se sont rangés du côté de Trump en 2024.