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Environnement

Voici pourquoi compenser ses GES n’est pas une bonne façon de prendre soin de la planète

Pierre-Paul Poulin / Le Journal
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Photo portrait de Élizabeth Ménard

Élizabeth Ménard

2022-05-02T16:25:40Z
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Les touristes qui visitent Montréal pourront désormais compenser leurs émissions de gaz à effet de serre en achetant des crédits. Mais comment ça marche et est-ce vraiment une bonne façon de prendre soin de la planète? On répond à vos questions.

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Presque toutes nos activités sont responsables d’émissions de GES. On peut penser à un déplacement en voiture, par exemple, ou à l’achat de vêtements, qui vient nécessairement avec une utilisation de ressources et des déplacements de marchandises.  

Grâce à des outils en ligne, on peut calculer les GES qui découlent d’activités précises ou de notre mode de vie en général. C’est ce qu’on appelle notre empreinte carbone.  

Les touristes qui visitent Montréal auront bientôt la possibilité d’acheter des crédits compensatoires via l’organisme Carbone boréal, a-t-on appris dans Le Devoir. Les détails de cette mesure seront annoncés demain.  

Au Québec, l’empreinte carbone est d’environ 15 000 tonnes de GES par habitant.  

Au début des années 2000, de nombreux organismes offrant la compensation de GES ont vu le jour. La majorité d’entre eux offrent de planter des arbres pour compenser nos émissions puisque ceux-ci absorbent les GES dans l’atmosphère. On peut aussi investir dans des projets d’énergie renouvelable comme un parc éolien.

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C’est quoi la compensation, et comment ça marche?  

C’est l’action d’acheter des «crédits carbone» équivalents aux GES qu’on a émis. De nombreux organismes québécois offrent aux individus un calculateur d’empreinte carbone et l’achat de crédits compensatoires. 

Par exemple, un voyage aller-retour Montréal-Paris en avion émet un peu moins de 2 tonnes de GES, ce qui équivaut à près de 10 000 km en voiture. 

On devrait donc planter 13 arbres pour absorber les GES qu’on a émis, selon l’organisme Carbone Boréal, ce qui coûtera près de 50$. 

Y’a-t-il des organismes plus fiables que d’autres?  

Oui. De nombreuses enquêtes au cours des dernières années ont démontré que certains organismes sont peu efficaces alors que d’autres sont carrément frauduleux. 

Au Québec, on a vu des arbres plantés sur de la roche qui n’ont pas survécu, d’autres sur un site où on avait fait de la coupe à blanc et des crédits vendus pour des arbres plantés en 1985, avait notamment révélé La Presse en 2019.  

Si on veut acheter des crédits carbone auprès d’un organisme fiable, on doit d’abord s’assurer qu’il détient une certification Gold Standard ou Verified Carbon Standard. 

Ensuite, on peut aussi pousser les recherches nous-mêmes. La compensation qu’on achète doit être:    

  • permanente, c’est-à-dire que l’arbre qu’on plante ne doit pas mourir ou être rasé; le projet qu’on finance ne doit pas être annulé deux ans plus tard;    
  • additionnelle, c’est-à-dire que l’arbre qu’on plante ou le projet qu’on finance n’aurait pas vu le jour sans le programme de compensation;    
  • unique, c’est-à-dire qu’un crédit carbone ne doit pas être vendu à deux personnes différentes;    
  • vérifiée par une tierce partie indépendante.       
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En 2020, le magazine Protégez-Vous a évalué 11 programmes de compensation canadiens en notant leurs forces et leurs faiblesses. Les organismes Planetair et Carbone boréal ont obtenu les meilleures notes. 

Pourquoi ce n’est pas la meilleure façon de prendre soin de la planète?  

Un arbre qui vient tout juste d’être planté n’absorbe pas de carbone. Ce n’est que lorsqu’il arrive à maturité, une vingtaine d’années plus tard, qu’il atteint son plein potentiel. 

Pendant ce temps, les GES qu’on a émis lors de notre voyage à Paris font des dommages depuis le jour 1.  

Selon le dernier rapport du Groupe d'experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), il nous reste trois ans pour plafonner les émissions de GES mondiales. Il nous faudra ensuite les réduire de près de moitié, d’ici 2030, si on veut éviter les pires impacts des changements climatiques. 

• À lire aussi: Il nous reste 3 ans pour agir: ce qu'il faut faire pour sauver la planète, selon le GIEC

Il y a urgence d’agir. On ne peut donc pas se permettre de compenser tous nos GES sans remettre en question nos modes de vie, en prétendant qu'on est «carboneutres». 

La compensation, en soi, n’est pas une mauvaise chose. Mais elle devrait être une solution de dernier recours pour compenser les émissions inévitables, pas pour s’acheter une bonne conscience.

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