Ann-Renée Desbiens s'est levée contre les Américaines
François-David Rouleau
Le cliché sportif dans le monde du hockey dira que la victoire aux dépens de l’autre grande puissance, les Américaines, en est une d’équipe. La réalité à Pékin dira que la majorité des Canadiennes doivent offrir un bon thé au jasmin à Ann-Renée Desbiens et Marie-Philip Poulin.
Pourquoi ? Parce que dans cette victoire canadienne de 4 à 2, les Américaines, championnes olympiques en titre qui ont sauté sur la patinoire avec le couteau entre les dents, ont dominé.
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Et parce que sans les deux Québécoises, les représentantes de la bannière étoilée auraient infligé un revers au Canada.
Sans se tromper, à moins que le véritable ennemi invisible qu’est le virus de la COVID-19 – ou bien le tableau – ne déjoue les pronostics, on avait droit à un avant-goût de la grande finale.
Les Canadiennes complètent donc la première ronde avec une fiche parfaite et affronteront la Suède en quart de finale vendredi.
Premier trio productif
La gardienne Desbiens et sa capitaine Poulin ont offert une prestation extraordinaire. La cerbère a repoussé 51 rondelles.
De son côté, la capitaine s’est assurée de faire les dommages à l’attaque en participant à deux des quatre buts des siennes, en générant de l’énergie et en s’imposant dans toutes les phases du jeu.
Elle était en mission pour aider son équipe à surmonter une journée plus difficile sur la glace.
Surutilisé, le premier trio qu’elle pilote a battu les Américaines avec le brio de la gardienne. À ses côtés, Brianne Jenner mérite aussi une étoile dans son cahier.
Auteure de deux buts, dont le premier qui a dégelé son équipe en fin de première période, elle pourra s’installer à leur table pour partager le thé.
«Ann a été extraordinaire. C’est la meilleure au monde à mon avis. On la voit exceller depuis des années, a plaidé Natalie Spooner. Les gros matchs importants comme celui-là, elle aime ça.»
«Je joue avec elle depuis huit ou neuf ans. Je crois qu’elle a disputé son meilleur match, a renchéri Sarah Nurse. Elle était calme, en confiance et en contrôle. Elle rendait quasiment le tout facile. Elle a vraiment assuré.»
La loi du nombre
Desbiens a multiplié les arrêts et résisté à bon nombre de menaces adverses jusqu’à la toute dernière seconde pour garder ses coéquipières dans le match.
Ces dernières étaient visiblement désorganisées et gaffeuses sous l’échec avant soutenu des Américaines.
La grande star du match ne se souvient pas la dernière fois où on l’a prise en cible pour un bombardement en règle. En fait, elle ne s’en préoccupe pas du tout. Quinze, trente ou 60 tirs, c’est mieux plus que pas assez selon elle. Pour autant que l’équipe gagne.
«J’arrête les rondelles qu’on me lance. Les statistiques, je les laisse à notre expert», a soutenu celle qui a fait ses études en comptabilité à l’Université du Wisconsin.
Mais devant un barrage de 53 tirs, on devine par la loi du nombre que les véritables chances de marquer furent nombreuses. Notamment lors des supériorités numériques américaines en deuxième période.
«Je crois que ces matchs sont encore plus faciles à disputer, car il y a toujours de l’action avec des échappées, des infériorités numériques et des descentes en surnombre. C’est beaucoup mieux qu’un match avec 12 lancers qui peut tout autant se terminer 2 à 1», a expliqué la native de La Malbaie.
Les unités spéciales font aussi le travail
Bien qu’Ann-Renée Desbiens et Marie-Philip Poulin aient assuré la victoire canadienne sur les Américaines, mardi, il faut souligner le travail des unités spéciales lancées dans la mêlée par Troy Ryan.
Les unités en infériorité numérique ont limité les dégâts importants en concédant un seul but sur les six occasions offertes aux États-Unis. La gardienne s’est signalée, évidemment, mais Jocelyne Larocque aussi.
En véritable guerrière, la défenseure a bloqué une multitude de rondelles.
À l’autre bout de la patinoire, l’attaque à cinq a produit un but. Celui qui aura insufflé énergie et confiance à du jeu brouillon en première période.
Difficile première période
Insatisfait de la sortie et du nombre de lancers effectués par ses ouailles, Ryan a attribué une part des difficultés à la gestion de la rondelle. L’équipe américaine a appliqué une pression constante sur la défensive canadienne, la forçant à commettre des erreurs.
«Ce n’était pas juste la pression, mais aussi notre tendance à forcer le jeu en milieu de patinoire», a-t-il souligné.
Après une première période ardue de laquelle elles sont tout de même sorties avec une avance de 1-0, les Canadiennes ont tenté d’adapter leur jeu.
«C’était notre pire période du tournoi, a reconnu Sarah Nurse. Il fallait se regrouper et se reprendre. Contre les Américaines, c’est toujours un match intense. Les deux équipes ont élevé leur niveau de jeu.»
Trois pénalités au second tiers ont toutefois permis à l’équipe américaine de continuer à menacer le filet de Desbiens.
Elles ont notamment réussi à prendre les devants 2-1 lors d’une attaque massive. Du moins, l’instant de 26 secondes, jusqu’à ce que Brianne Jenner ramène l’égalité.
Coup de fouet
Ce but a fouetté l’unifolié qui en a ajouté deux autres en période médiane.
Poulin a profité d’une opportunité en or à la fin de cet engagement quand l’officielle lui a offert un tir de pénalité.
Comme l’a si bien dit Desbiens qui a vu le signe de l’appel depuis l’autre bout de la patinoire, c’était de mauvais augure pour Maddie Rooney.
La capitaine a marqué le premier but en tir de pénalité dans l’histoire du hockey féminin olympique.
La Québécoise de 30 ans rentre donc une fois de plus dans la bible de sa discipline.
Emily Clarke était de retour dans l’alignement. La veille, elle avait été retirée de la formation dans tout l’imbroglio concernant les tests de dépistage avant le match contre l’équipe du Comité olympique russe.
L’équipe canadienne masculine amorcera son tournoi en affrontant l’Allemagne, jeudi matin, heure du Québec.