«C'est comme un cauchemar»: une Ukrainienne nous raconte son quotidien dans un bunker à Kyïv
Élizabeth Ménard
Depuis le début de la guerre en Ukraine, le 24 heures est en contact avec des Ukrainiens aux quatre coins du pays. Prise dans un bunker au centre de Kyïv, Bogdana Bondar tenait à nous raconter son histoire. Comme elle ne parle ni anglais ni français, ses propos ont été traduits par son amie Tetiana Ulanovska. Voici son histoire.
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«Je m’appelle Bogdana Bondar, j’ai 45 ans et je vis à Kyïv, la capitale de l’Ukraine. Je suis peintre et illustratrice de livres pour enfants. J’ai aussi un diplôme en droit international.
Depuis le début de la guerre, la vie de tout le monde a changé. C’est comme un cauchemar.
Nous passons beaucoup de temps, surtout la nuit, dans un abri anti-bombes. Nous sommes environ 50 ici, mais, certains jours, nous sommes moins. Lorsque la ville est sous les bombardements, nous sommes bien plus. Il y a beaucoup d’enfants ici. La plupart sont avec leurs parents. Plusieurs sont partis pour fuir la ville, devenant des réfugiés.
Chaque jour, quelque chose change.
Nous sommes dans une partie centrale de la ville, où il y a beaucoup d’institutions, d’entreprises et d’immeubles gouvernementaux que les Russes essaient de frapper. C’est pourquoi c’est très dangereux, ici, pour les habitants.
Nous entendons le bruit des explosions et des batailles dans la rue. Nous les entendons très bien. Hier, tout près de nous, des pièces de missile sont tombées dans la rue. Selon ce qu’on en sait, le missile aurait été percuté par notre système de défense aérienne. Ces pièces sont très dangereuses.
Nous essayons de rester à l’intérieur et d’aider nos soldats en fabriquant des filets de camouflage. Avec les enfants, nous peignons, nous dessinons et nous lisons. Nous essayons de les occuper.
Dans l’après-midi, quand c’est plus ou moins calme, nous [nous risquons à] sortir pour essayer de trouver de la nourriture. Certains magasins sont encore fonctionnels. Il y a de longues files d’attente, mais ce n’est pas grave. Nous avons la chance de pouvoir ramener de la nourriture. Nous essayons aussi de ramener des réserves d’eau au bunker. Nous avons l’électricité, mais, parfois, ça ne fonctionne pas.
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Je m’inquiète beaucoup pour les enfants malades qui ont le cancer avec qui je fais du bénévolat depuis 13 ans. Maintenant, ils sont en train de mourir ou sont envoyés à la maison parce qu’il n’y a plus de chances ou de possibilités de les guérir.
Avant, je n’avais peur de rien. Maintenant, j’ai peur de la guerre.»
− Propos recueillis par Élizabeth Ménard