Zelensky à Boutcha: des «crimes de guerre» qui seront reconnus comme «génocide»
Agence France-Presse
L'air grave, portant un manteau kaki et un gilet pare-balles couleur camouflage, le président ukrainien Volodomyr Zelensky a passé une demi-heure lundi à Boutcha, près de Kiev, où il a accusé les forces russes d'avoir commis des «crimes de guerre» qui seront «reconnus comme génocide».
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Son déplacement - le premier hors de Kiev depuis l'invasion russe - n'avait pas été annoncé, même si la rumeur le matin disait qu'il pouvait venir.
Peu avant son arrivée, plusieurs dizaines de gros 4X4 ont déboulé sur le carrefour central de la ville, d'où sont descendus des militaires armés pour sécuriser la zone.
Une quarantaine de journalistes se trouvaient déjà dans la ville, transportés depuis Kiev dans un convoi de plusieurs minibus, encadré par des voitures de police, dans le cadre d'une visite organisée par les autorités.
Le président est arrivé en milieu de journée, entouré d'une garde rapprochée de militaires armés.
Dès lors, les communications avec l'extérieur sont devenues impossibles, plus aucun réseau téléphonique n'était accessible.
Parfois mains dans les poches, Volodymyr Zelensky a fait quelques mètres dans une rue du centre-ville, jonchée de carcasses déchiquetées de véhicules de transports de troupes et de blindés russes, sur plusieurs centaines de mètres, au milieu de maisons détruites.
Debout, protégé par les militaires en armes, il a ensuite fait un rapide point presse dans cette rue pour dénoncer «des crimes de guerre» commis à Boutcha, après la découverte dans la ville d'un grand nombre de cadavres portant des habits civils.
«Ce sont des crimes de guerre, et ils seront reconnus par le monde comme un génocide», a-t-il déclaré.
«Vous êtes ici et vous pouvez voir ce qui s'est passé. Nous savons que des milliers de personnes ont été tuées et torturées, ont eu des membres déchirés, des femmes ont été violées et des enfants tués», a-t-il ajouté.
Moscou a pour sa part démenti avoir tué des civils à Boutcha.
Après le point presse, M. Zelensky est entré dans le petit jardin d'une maison non détruite, toujours dans la même rue, pour s'entretenir pendant dix minutes avec un couple de personnes âgées, à l'abri des regards et des caméras cette fois.
Il est ensuite reparti de la ville en convoi, alors que la presse était conviée à visiter la cave d'une école dans laquelle gisaient les corps de cinq hommes portant des vêtements civils, dont au moins trois avaient les mains liées dans le dos avec des bandes de tissu blanc.
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Les corps ont été retirés un à un de la cave et placés dans des sacs plastique mortuaires noirs, avant d'être emportés dans une camionnette.
Boutcha, ville d'environ 37 000 habitants (avant la guerre) à 30 km de la capitale, a été, avec sa voisine Irpin, le théâtre de combats parmi les plus féroces depuis le début de l'invasion russe de l'Ukraine, le 24 février.
La localité a été occupée par l'armée russe dès le 27 février, restant inaccessible pendant plus d'un mois. Les bombardements y ont cessé jeudi et les forces ukrainiennes n'ont pu complètement y pénétrer qu'il y a quelques jours.
L'AFP y a vu samedi les cadavres d'au moins 22 personnes portant des vêtements civils dans des rues. L'une d'elles était couchée près d'un vélo et une autre avait des sacs à provisions à côté d'elle. Un cadavre avait les mains liées dans le dos.
On ne pouvait dans l'immédiat déterminer la cause de leur mort, mais deux personnes présentaient une large blessure à la tête.
Selon le maire de la ville, Anatoly Fedorouk, 280 personnes ont dû être enterrées dans des «fosses communes» à Boutcha.