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Monde

Victoire de Lula au Brésil: l’Amazonie peut respirer un peu

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Photo portrait de Anne-Sophie Poiré

Anne-Sophie Poiré

2022-11-17T16:54:06Z
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La lutte contre la déforestation de l’Amazonie au Brésil, essentielle pour limiter les effets de la crise climatique, sera centrale dans la politique du nouveau président élu, Luiz Inacio Lula da Silva, a-t-il promis à la Conférence des parties (COP27) de Charm el-Cheikh, en Égypte.

• À lire aussi: Voici les engagements de Québec à la COP27

«Le Brésil est de retour!», a lancé Lula mercredi au sommet des Nations unies sur le climat (COP27) sous un tonnerre d’applaudissements. Son discours marque la première apparition sur la scène internationale de celui qui a présidé le Brésil de 2003 à 2011, depuis son élection le 30 octobre dernier. 

Le nouveau président élu du Brésil, Luiz Inacio Lula da Silva, après son allocution à la COP27 de Charm el-Cheikh, en Égypte.
Le nouveau président élu du Brésil, Luiz Inacio Lula da Silva, après son allocution à la COP27 de Charm el-Cheikh, en Égypte. AFP

Il a remporté la présidence du pays de justesse contre le président sortant d’extrême droite Jair Bolsonaro, dont les quatre années de pouvoir ont été marquées par un saccage sans précédent de la forêt amazonienne, dont plus de 60% sont situés en territoire brésilien. 

Lula, icône de la gauche, a été accueilli en superstar à la COP27. 

Le nouveau président élu du Brésil, Luiz Inacio Lula da Silva, après son allocution à la COP27 de Charm el-Cheikh, en Égypte.
Le nouveau président élu du Brésil, Luiz Inacio Lula da Silva, après son allocution à la COP27 de Charm el-Cheikh, en Égypte. AFP

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«La salle était bondée. Des foules immenses se sont rassemblées un peu partout sur le site de la COP pour le voir parler», lance la directrice générale de Greenpeace Brésil, Carolina Pasquali, en entrevue au 24 heures, quelques minutes à peine après la fin de l’allocution du nouveau président. 

«Les gens sont heureux que le Brésil soit de retour, ajoute-t-elle. On le ressent à la COP.» 

Sous la présidence de Bolsonaro, qui a pris le pouvoir en 2019, la déforestation annuelle moyenne de l’Amazonie a augmenté de 75% par rapport à la décennie précédente, en favorisant l'agro-industrie et le secteur minier. Il avait également refusé d'organiser la COP25 initialement prévue au Brésil. 

AFP
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«Après quatre années de très mauvaise gouvernance climatique, nous avons espoir. C’est le retour de la démocratie. Lula s’est engagé publiquement sur la question climatique. J’ai confiance qu’il respectera ses promesses», affirme Mme Pasquali. 

Renverser l’héritage de Bolsonaro

La directrice générale de Greenpeace Brésil juge que l’arrivée au pouvoir de Lula est aussi une bonne nouvelle pour le reste de la planète. «Il n’y a pas de sécurité climatique dans le monde si l’Amazonie est détruite», dit-elle. 

Mais comme plusieurs experts, elle admet que renverser l’héritage de Bolsonaro ne sera pas facile. 

Le président défait du Brésil, Jair Bolsonaro.
Le président défait du Brésil, Jair Bolsonaro. AFP

Le nouveau président doit faire face à une opposition importante au Congrès brésilien, ce qui pourrait rendre difficile la réalisation de certaines de ses promesses. 

«Plusieurs gouverneurs ont des orientations partisanes différentes de celle du Parti des travailleurs. Les négociations seront longues et coûteuses», précise le professeur au Département de science politique de l’Université de Montréal, Philippe Faucher. 

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«Dans ses 100 premiers jours de mandat, Lula va devoir reconstruire parce que le système ne fonctionne plus: les budgets, les agences environnementales, il faut aussi dégeler le Fonds pour l’Amazonie, détaille Carolina Pasquali. Bolsonaro a démantelé toute la gouvernance de la région amazonienne.» 

Et il faut agir vite: l’Amazonie s’approche déjà d’un point de non-retour, rappelle-t-elle. Une partie de la forêt produit maintenant plus de gaz à effet de serre qu’elle ne parvient à en absorber, alertait une étude publiée dans la revue Nature l’an dernier

• À lire aussi: Amazonie: le Brésil n’atteindra pas son objectif de réduction de la déforestation

• À lire aussi: La forêt amazonienne en train de devenir source de CO2

La crise climatique pourrait transformer cette région tropicale en une savane aride d’ici quelques décennies à peine. 

Mais il sera possible d’y arriver, selon Mme Pasquali, puisque beaucoup de ces décisions ont été prises par le président sortant sans être appuyées par des projets de loi. 

Plus de déforestation avant le changement de gouvernement

À six semaines de la fin de l’ère Bolsonaro, la déforestation continue de s’intensifier. Elle a même atteint des records pour les mois de septembre et d’octobre, selon le système de surveillance par satellite de l’Institut national de recherche spatiale (INPE). 

AFP
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«C’est une vraie course effrénée à la dévastation» avant le changement de gouvernement, déplore le Fonds mondial pour la nature (WWF). Et les données préliminaires pour novembre sont toutes aussi «effrayantes», selon l’organisme. 

L’année 2022, qui n’est pas encore terminée, est déjà pire que la précédente, avec 9494 km2 de végétation rayée de la carte contre 9178 km2 pour l’ensemble de l’année 2021. 

«75% des émissions de gaz à effet de serre au Brésil sont dues à la déforestation et à l’exploitation du territoire. Nous avons augmenté nos émissions de 12% en 2022, c’est la première année que ça arrive», signale Carolina Pasquali. 

Le Brésil, hôte de la COP30?

C’est dans ce contexte donc que Lula a promis que les changements climatiques seraient la priorité absolue de son gouvernement. 

Il souhaite par ailleurs que le Brésil soit le pays hôte de la COP30 en 2025. 

«Il veut amener les leaders et les négociateurs du monde entier au cœur de la forêt amazonienne, pour qu’ils constatent les dommages», précise Mme Pasquali. 

Le pays s’était isolé sur la scène international sous le mandat de Jair Bolsonaro, notamment à cause de ses politiques accélérant la déforestation. 

«Personne ne voulait travailler avec le Brésil. Mais depuis l’élection de Lula, plusieurs pays reviennent pour signer des accords internationaux», fait valoir la directrice de Greenpeace, qui cite un accord entre le Congo, l’Indonésie et le Brésil où se trouve la majeure partie de la forêt tropicale mondiale. 

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