Tourner le dos à la porno: une bonne idée?
BILLET - Vous connaissez le mouvement «No Fap»? Il préconise l’abstinence de pornographie et de masturbation. Une communauté grandissante s’y intéresse sur les réseaux sociaux. Même qu’il existe maintenant des applications pour nous éloigner de tout contenu explicite en ligne... Qu’est-ce qui se passe donc entre le plaisir solitaire et le numérique?
La pandémie nous a encouragés à nous masturber. Le populaire site Pornhub a notamment connu une croissance de trafic de 20% en mars 2020.
Et c’est peut-être cette consommation grandissante qui explique que de plus en plus de personnes se détournent aujourd’hui de leur écran, selon le sexologue François Renaud. «Avec la pandémie, des gens ont commencé à utiliser la porno pour répondre à la solitude, apaiser un certain mal-être ou réguler leurs émotions. Peut-être qu’ils en sont venus à se sentir mal avec leur consommation et à vouloir la couper.»
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Parce que la pornographie peut avoir une influence négative sur notre vie. Certaines personnes en souffrent, la voient prendre une place bien trop importante dans leur quotidien ou alors teinter leur perception de la sexualité.
«C’est une source assez prévalente de mauvaises informations», souligne le sexologue. Or il y va d’un bémol: sur le plan clinique, en Amérique du Nord, on n’a pas encore défini le diagnostic de dépendance. Et en attendant, on a tendance à rapidement juger la pornographie: «Si je dis que j’ai regardé 10 heures de la série télévisée Friends, on va valoriser ça. Si je dis que j’ai regardé 10 heures de pornographie, on va me répondre que j’ai un problème. Mais est-ce un jugement de valeur?»
Bonne question!
Pour une diversité masturbatoire
Alors, le mouvement «No Fap»? François Renaud n’encourage pas nécessairement l’abstinence, bien qu’on puisse toujours décider que la sexualité ne fait pas partie de notre vie.
«Les sexologues, on a plutôt tendance à vouloir créer une meilleure relation avec la masturbation que de l’éliminer complètement. Des fois, la consommation de pornographie est le symptôme d’un mal-être. C’est ce mal-être qu’il faut explorer, même si c’est peut-être plus facile de pointer du doigt la pornographie que de voir les problèmes dans notre vie sexuelle. La majorité des gens consomment de la pornographie et ce n’est pas la majorité d’entre eux qui ont des soucis avec elle...»
Effectivement, 80% des hommes et 25% des femmes regardent de la pornographie au moins une fois par semaine. Or certaines personnes qui se détournent de ces contenus y trouvent des avantages. Notamment un meilleur imaginaire sexuel et une plus grande facilité à avoir du plaisir avec d’autres formes de stimuli.
«C’est pourquoi je recommande une variété de sources, conseille François Renaud. Des livres érotiques, des balados, de la pornographie, de l’imagination ou même des sensations purement physiques. Ça permet d’avoir plus de diversité... De diversité masturbatoire!»
Vous voilà maintenant mieux outillés pour retourner à votre programmation régulière! Ou pas...