Survivant d’un cancer colorectal, Dan Bigras lance un cri du coeur pour les hommes
Daniel Daignault
Dan Bigras est ambassadeur de la 7e édition de la campagne Ensemble, détrônons le cancer du côlon qui a lieu en mars. Un choix qui va de soi, puisqu’il est un survivant de ce cancer qui est la deuxième cause de décès par cancer au Québec et qui touche surtout la population âgée entre 50 et 74 ans, hommes et femmes. C’est chez lui, dans son coin de paradis, en forêt, que le chanteur nous a reçus pour nous parler de ce qu’il a vécu et sensibiliser les gens à tout faire pour éviter d’emprunter le même chemin que lui grâce au test RSOSi.
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Dan est en grande forme. Il vit en pleine nature et apprécie grandement ce mode de vie. «Ça fait six ans que j’habite ici. La covid, le cancer, j’ai tout passé ça ici! C’est très tranquille, mais il y a souvent du monde à la maison: j’ai des chums du coin, des amis de Montréal et il y a des musiciens qui viennent répéter ici. Je ne fais plus de disques, mais tous les jours, je m’installe derrière le clavier et je m’amuse à composer. Quand j’ai des nouvelles tounes, je les fais en show, et les gens sont contents. C’est le fun, parce que j’ai leurs réactions dans la face», lance-t-il. Celui qui dit bien manger et prendre soin de lui a perdu pas moins de 25 lb. «Je cuisine beaucoup plus qu’avant. J’aime me faire des bonnes petites bouffes. Je peux rester devant un four ou un poêle qui sent bon, je n’ai pas besoin d’être ailleurs.»
Cette entrevue a pour but de nous faire réaliser à quel point la prévention est importante lorsqu’il est question du cancer colorectal. C’est entre autres pour cette raison que Dan, qui a célébré ses 66 ans en décembre, a accepté de se confier sans retenue. «Je sais de quoi je parle, de l’intérieur. Les médecins vont parler de la science qu’ils connaissent, et moi, j’ai des amis qui sont morts et qui n’affrontaient pas assez la vérité pour se dire qu’ils allaient s’occuper de leur santé, se battre et s’en sortir. Ils attendaient et se disaient que le médecin allait les rappeler. C’est un mélange de déni et peut-être aussi de paresse. C’est pas conscient. Il faut dire que se faire examiner dans ces endroits-là, on n’aime pas vraiment ça, mais il n’y a pas de temps à perdre. Je suis passé par là et je comprends les hommes qui se disent: “Ah! ça ne doit pas être ça...” Moi-même, au début, je me trouvais des raisons. C’est la culture des hommes de faire semblant de rien. De faire semblant d’être tough. Être tough, c’est affronter la vie jusqu’à ce qu’on soit heureux et qu’on rende les gens autour de nous heureux, et qu’eux, à leur tour, nous rendent heureux. Ça peut être facile ou difficile d’affronter l’adversité; ça prend du caractère pour le faire. Mais ne pas dire qu’on a mal, ce n’est pas tough. C’est triste de rester enfermé avec son secret. C’est inutile et aussi dangereux.»
Retour en arrière...
C’est en 2017 que des signes inquiétants ont commencé à se manifester pour lui. «Un jour, j’ai fait une grosse fièvre, et je me suis dit que la grippe allait être laide le lendemain, mais je me suis levé en grande forme le matin. Puis, quelques jours plus tard, j’ai vécu la même chose, et comme j’arrivais de République dominicaine, je pensais avoir contracté un virus. Peu de temps après, pour mon lancement du livre, du disque et de la tournée Le temps des seigneurs, j’étais à l’Usine C avec mes techniciens quand j’ai eu des douleurs. J’étais plié en deux. J’ai donc décidé de me rendre à l’urgence de l’Hôpital Saint-Luc.»
Un peu plus de 24 heures plus tard, Dan avait les résultats des tests passés. «Je savais ce que j’avais: c’était un cancer colorectal. On pensait qu’il était de stade 2. Quand les médecins m’ont opéré et qu’ils ont retiré la masse cancéreuse, ils ont vu que j’avais beaucoup de métastases dans les ganglions lymphatiques. Mon oncologue était inquiet, car ça semblait être un cancer de stade 3. Il est venu me voir après l’opération et il m’a dit: “Habituellement, je recommande la chimio, mais vous, je vous dis que vous n’avez pas grand chances de vous en sortir si vous ne faites pas de chimio.” Je lui ai dit que je ne m’obstinerais pas avec lui, j’étais là pour me faire soigner.»
«J’ai décidé de continuer mes spectacles»
Le médecin voulait que Dan annule son lancement ainsi que Le show du Refuge. «C’est fort, la chimio, tu ne pourras pas», lui a-t-il dit. Pour Dan, il n’en était pas question. Finalement, il a été convenu qu’il commencerait les traitements après la tenue des deux événements. «Il savait que je serais magané. J’ai quand même décidé, par la suite, de garder les spectacles prévus à mon agenda. Mon seul rêve dans la vie, c’est de faire de la musique sur un stage. Ça me soigne! Alors, je ne voulais pas les annuler. Mon oncologue m’a dit que je pouvais faire mes shows si je pensais en être capable, tout en me conseillant d’être prudent. Le premier soir, à l’Anglicane de Lévis, j’étais en train de tomber sur scène quand mon bassiste m’a vu devenir blanc. Il m’a ramassé à temps, pendant que je faisais ma dernière toune. Je suis descendu dans la loge, je me suis couché sur le sofa durant 10 minutes. Après, je suis allé signer des autographes.»
Quand il avait des traitements, Dan était magané durant deux jours. Il a donc été convenu qu’il ferait sa chimio en fonction de son horaire de spectacles. «Ç’a été pratique de pouvoir ajuster mon horaire de cette manière-là. J’ai été correct pour mes autres spectacles: je ne suis pas passé près de m’évanouir. Quand je revenais chez moi, j’étais pas mal fatigué, mais j’avais un osti de grand sourire dans le visage! Faire de la musique m’a rendu heureux: je suis sûr que ça a fait partie de mes traitements.»
Les traitements de chimiothérapie ont duré six mois. «On devait me surveiller; j’ai eu mon dernier scan. Mon oncologue m’a dit qu’on me suivrait durant un autre cinq ans. Je lui ai dit qu’il n’y avait pas de problème. Ça me rassure. Mais tout est beau, tout est parfait. J’en ai vu beaucoup partir. Je suis moi-même passé près de partir à un moment donné. J’avais une chance sur deux de m’en sortir. Je pense que le cancer est la maladie du siècle. Les cas ont augmenté à une vitesse de fou, mais cela dit, la science va vite aussi. Je pense à Gerry qui est mort à 44 ans (Gerry Boulet, rappelons-le, est décédé en juillet 1990, victime d’un cancer colorectal). C’est triste. S’il y a une chose pour laquelle il n’y a aucune justice, c’est bien la mort. Tu ne décides de rien. Et tu fais ce que tu peux pour te garder en forme, vivre le plus vieux possible et avoir une belle vie. Bon, c’est sûr que la chimio que Gerry a eue il y a un quart de siècle n’était pas la même que celle que j’ai reçue. Je n’ai pas eu non plus la même opération. On réalise que la médecine et la recherche avancent. On en a un bel exemple quand on pense au test qu’on peut faire à la maison. Moi, je vais me le faire tous les trois mois!»
Un test qui pourrait tout changer
Pour ce nouveau test de dépistage du cancer colorectal, nommé de RSOSI, on se rend sur Clic Santé pour prendre rendez-vous avec une infirmière praticienne ou un infirmier praticien qui nous remettra le test. C’est simple: c’est une petite languette qui est simplement frottée ou grattée sur les selles. Après il faut porter le test dans un centre de prélèvements. «Il y a plein de tests qui requièrent plus d’efforts quand on veut les passer, mais celui-là est facile! Je ne savais pas que la science arriverait à ce point-là. Les avantages sont multiples. On peut te sauver la vie parce que la prévention, c’est la clé. Si tu es pris à temps, tu as des chances; si tu es pris trop tard, tu n’en as pas. C’est mathématique! C’est comme ça, on ne peut rien y faire.»
«Tout le monde a un minimum d’angoisses dans la vie. Tu vieillis, et on te dit qu’à ton âge, les cas sont plus fréquents. Ce test, c’est une bonne façon de faire passer tes angoisses. Tu as peut-être des problèmes personnels comme bien du monde, mais tu es rassuré de savoir que tu n’as pas de cancer. Ça change tout, y compris tes relations avec tout le monde, parce que tu n’es pas en train de préparer une mort possible. Moi, je suis encore là à 66 ans, et c’est beaucoup grâce à la science. Si j’avais eu le cancer dans les années 1990, je ne sais pas comment ça se serait passé. Si ce test-là avait existé à cette époque, Gerry l’aurait passé et peut-être qu’il aurait pu se faire soigner à temps. Il a attendu d’avoir des grosses douleurs avant de se rendre à l’hôpital. Il faut faire connaître ce test. Quand on m’a demandé d’être ambassadeur du mois de la prévention, j’ai accepté avec grand plaisir d’y participer. C’est du bon monde qui a le coeur et la tête à la bonne place. C’est très agréable de travailler avec eux. Ça ne me demande pas tellement de temps. À l’âge que j’ai, je voulais travailler un peu moins, alors, j’ai le temps de le faire.» En plus de Dan, la campagne de sensibilisation compte sur d’autres ambassadeurs pour la cause, soit Dominique Michel, Alain Crête, le Dr Nicolas Benoit, la Dre Mélanie Bélanger et Ysabel Viau, survivante du cancer du côlon.
La force de la famille
Dans l’épreuve, il a pu compter sur son entourage. «Dès le moment où j’ai eu le diagnostic, j’ai appelé mon fils. Je lui ai demandé s’il était avec sa blonde. Je lui ai dit que j’avais quelque chose à lui annoncer. Je me suis rendu chez lui, et on a passé la journée ensemble. Je l’ai tenu au courant de tous les développements. Chacun a sa façon de faire, mais je pense que tu ne peux pas cacher ça à tes enfants. J’aurais été incapable de faire ça à mon fils. Il l’a pris dur au début, puis il s’est organisé pour être comme moi, le plus calme et efficace possible. On a fait ça en famille, et ça s’est bien passé.» Puisqu’il est question de famille, Dan est un bienheureux grand-père de deux garçons âgés d’un an et demi et de six mois. En décembre dernier, il a d’ailleurs publié sur Instagram un clip du plus vieux qui s’amusait à pianoter sur le clavier de grand-papa Dan.
Côté carrière, pour l’instant, Dan Bigras n’a pas beaucoup de spectacles à son agenda, mais l’an prochain, il pourrait en être tout autrement. «Je prends ça smooth. Je ne peux pas t’en parler tout de suite, mais pour l’année prochaine, je prépare quelque chose de bien tripant, avec du monde que j’aime beaucoup.» Ça tombe bien, en 2025, il y aura déjà 35 ans que le chanteur et auteur-compositeur a lancé son tout premier album, Ange Animal!
Dan se joint à Alain Crête et Dominique Michel comme ambassadeur de la campagne Ensemble, détrônons le cancer du côlon. Pour plus d’informations, allez à cancer.ca/detronons.