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L'article provient de TVA Sports
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Pékin 2022: Pierre de Coubertin n’aurait pas été fier

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Photo portrait de Jessica Lapinski

Jessica Lapinski

2022-02-21T01:27:32Z
2022-02-21T03:29:28Z
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Du moment où ces Jeux d’hiver ont été attribués à Pékin, les voix de contestataires se sont élevées. Pourquoi la Chine, accusée de génocide et de crimes contre l’humanité, obtenait-elle à nouveau le droit d’accueillir le monde entier ? 

C’était donc, de prime abord, les Jeux de la controverse. Des Jeux boycottés par des dignitaires occidentaux, qui ont refusé d’assister à la cérémonie d’ouverture. Mais pas par le président russe, Vladimir Poutine,
qui est allé rencontrer son homologue chinois, Xi Jinping, quelques heures avant que la vasque olympique soit allumée. 

À cela s’ajoutait la COVID-19, crainte par les athlètes surtout, qui redoutaient qu’un test positif anéantisse quatre ans d’efforts et de sacrifices. 

Mais finalement, une fois le coup d’envoi de la première compétition donné, les Jeux ont simplement été les Jeux, ponctués par leurs exploits sportifs, leurs larmes de joie et de déception, mais aussi leurs traditionnelles polémiques sportives. 

Dopage, contestations, gestes disgracieux : voici quelques moments qui ont défini les deux dernières semaines, pour les mauvaises raisons, et qui n’auraient pas rendu très fier Pierre de Coubertin, fondateur du Comité international olympique.  

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La détresse de Valieva   

Photo AFP
Photo AFP

C’est l’image crève-cœur de ces Jeux. Kamila Valieva, 15 ans seulement, assise jeudi dans le fameux « kiss and cry », mais sans les baisers, avec seulement les larmes. 

Neuf jours plus tôt, la planète apprenait que la patineuse artistique avait échoué à un contrôle antidopage en décembre. La veille de ces révélations, pourtant, elle menait les représentants du Comité olympique russe (ROC) vers l’or à l’épreuve par équipe. 

Dès lors, les questionnements. À qui la faute dans cette énième histoire de dopage russe ? Comment une adolescente peut-elle être dopée ? Le blâme va-t-il à son pays, à son entraîneuse (voir autre texte) ? Ou est-ce un cas de contamination croisée, comme le plaident ses avocats ? Car Valieva a eu un test positif à la trimétazidine, un médicament que son grand-père prend pour soigner son cœur malade. 

Kamila Valieva
Kamila Valieva Photo AFP

Malgré ces soupçons de dopage, la patineuse a été autorisée par le Tribunal arbitral du sport à concourir dans l’épreuve individuelle. Excellente dans le programme court, même si elle était en deçà de son niveau du début de saison, Valieva s’est effondrée deux jours plus tard dans le programme libre, sans doute coulée par le poids de la controverse.  

Coupable de deux chutes, elle a été exclue du podium, finissant quatrième. Une épine de moins dans le pied du Comité international olympique : si la Russe avait remporté une médaille, il aurait fallu attendre la fin de l’enquête – qui risque de s’étirer sur des mois – pour décorer les trois premières athlètes. Ce sera d’ailleurs le cas dans la compétition par équipe. Le Canada pourrait éventuellement hériter du bronze.

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Cette triste histoire pourrait chambouler les règles en patinage artistique. La Fédération internationale songe à rehausser l’âge minimum pour compétitionner chez les seniors, le faisant passer de 15 à 17 ans. 

Mais surtout, quel sera le destin de Valieva dans ce sport où les étoiles, surtout les russes, s’éteignent rapidement ? 

La méchanceté (et les méthodes) de Tutberidze   

L’entraîneuse russe Eteri Tutberidze et Kamila Valieva
L’entraîneuse russe Eteri Tutberidze et Kamila Valieva Photo AFP

Elle est reconnue pour diriger d’une main de fer, mais sans gant de velours, dans une usine à championnes en banlieue de Moscou. La déchéance de la patineuse Kamila Valieva dans le programme libre aura révélé au monde la sévérité, voire la méchanceté, de l’entraîneuse russe Eteri Tutberidze.

Quand Valieva a patiné vers le banc jeudi, en pleurs après ses chutes qui l’ont sortie du podium, Tutberidze a invectivé l’adolescente : « Pourquoi tu as baissé les bras ? Pourquoi tu as cessé de te battre ? Explique-moi... Tu as laissé tomber ! »

Capté sur caméra, ce manque d’empathie a horrifié les néophytes et même Thomas Bach, président du Comité international olympique. Mais dans le milieu, malgré l’omerta russe, les méthodes de Tutberidze semblent bien connues. Au-delà de sa méchanceté, ses prodiges connaissent pour la plupart de courtes carrières. Certaines ont souffert d’anorexie, d’autres, de graves blessures.

Princesse des neiges... et des critiques   

Eileen Gu
Eileen Gu Photo AFP

On l’a appelée la « princesse des neiges » grâce à ses deux titres olympiques et à sa médaille d’argent, mais la gloire de la skieuse Eileen Gu ne vient pas sans controverse. Née à San Francisco d’un père américain et d’une mère chinoise, la sensation du ski acrobatique a décidé de concourir sous le drapeau de la Chine il y a trois ans. 

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Si une majorité de Chinois ont adopté l’athlète de 18 ans, d’autres critiquent son statut de Sino-Américaine, dans un pays où la double nationalité n’est généralement pas permise. Et de l’autre côté du Pacifique, certains déplorent qu’elle ait choisi de représenter une nation reconnue pour brimer les droits de la personne.  

« Venez à mes entraînements »   

Alexander Bolshunov
Alexander Bolshunov Photo AFP

Phénoménalement rapide au 30 km le 6 février, le fondeur du ROC Alexander Bolshunov a été questionné par les journalistes au terme de sa course. Manifestement, certains doutaient de la légitimité de ce résultat. Il faut dire que Bolshunov a devancé son plus proche poursuivant, son compatriote Denis Spitsov, par une minute, et le favori, le Norvégien Johannes Klaebo, par 10 ! Depuis l’ajout de cette discipline aux Jeux à Turin, en 2006, la plus grande différence de temps entre les médaillés d’or et d’argent avait été de... 10 secondes. 

Bolshunov a répondu aux représentants des médias de venir assister à ses entraînements, s’ils souhaitaient chasser les doutes. Le fondeur n’a été trouvé coupable de rien, mais d’autres cas de dopage ont assombri ces Jeux. Il y a bien sûr eu sa compatriote Kamila Valieva, en patinage artistique, mais aussi la bobeuse ukrainienne Lidiia Hunko, notamment.  

Des patineurs sud-coréens en colère  

Photo AFP
Photo AFP

Choqué de voir deux de ses patineurs disqualifiés des demi-finales du 1000 m courte piste au profit d’athlètes chinois, le Comité olympique sud-coréen a porté plainte devant le Tribunal arbitral du sport, le 8 février. Il a demandé à la plus haute instance sportive internationale de « rendre publique l’injustice » dont ses athlètes ont été victimes. Pour l’instant, c’en est resté là. 

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McMorris voulait l’or de Parrot  

Maxence Parrot et Mark McMorris
Maxence Parrot et Mark McMorris Photo AFP

On croyait que tous les Canadiens – voir la planète sportive en entier – avaient été conquis par la médaille d’or de Maxence Parrot en slopestyle, trois ans après son combat contre le cancer. 

Mais son compatriote Mark McMorris (à droite sur la photo), troisième à cette même épreuve, n’a pas donné dans les éloges, lui. En fait, le 11 février, quelques jours après la finale, le planchiste de Regina a laissé savoir que c’est lui, et non Parrot, qui aurait dû grimper sur la première marche du podium. 

Dans son argumentaire, McMorris a évoqué le fait qu’il avait réussi « l’une des meilleures descentes de sa vie » et que l’athlète de Bromont avait commis une erreur grave en saisissant son genou, et non sa planche, lors de sa performance en or. 

Il s’est finalement excusé auprès de Parrot, puis sur Twitter. Et le Québécois a ajouté l’argent au big air, pendant que McMorris terminait 10e.   

Les doigts d’honneur russes  

Daniil Aldoshkin
Daniil Aldoshkin Photo AFP

Comme si les Russes – ou plutôt, les représentants du Comité olympique russe – avaient encore besoin de faire parler d’eux pour les mauvaises raisons, le jeune patineur longue piste Daniil Aldoshkin a choisi de célébrer la qualification de son pays pour la finale de la poursuite en brandissant bien haut deux doigts d’honneur, mardi dernier. 

L’athlète de 20 ans et la Fédération russe de patinage de vitesse ont été contraints de présenter leurs excuses et d’assurer que ce geste n’avait rien de politique. C’est que les adversaires du ROC dans cette demi-finale étaient les États-Unis, pays qui critique vertement une possible invasion de l’Ukraine par la Russie. 

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À ces majeurs s’ajoute celui, plus subtil, de la patineuse du ROC Alexandra Trusova, jeudi. Deuxième de la compétition féminine, l’athlète de 17 ans a d’abord refusé de prendre part à la cérémonie protocolaire. Cette autre protégée d’Eteri Tutberidze, en pleurs, criait que « tout le monde avait une médaille d’or, sauf [elle] ». 

Alexandra Trusova
Alexandra Trusova Photo AFP

Mais elle a fini par se présenter sur la glace. Et en empoignant la petite mascotte Bing Dwen Dwen, on peut la voir lever discrètement le doigt du milieu de sa main gauche. Était-ce voulu ? Contrairement à son compatriote, Trusova n’a pas eu à s’épancher sur la question.  

La polémique des combinaisons amples   

Le Canada a remporté sa première médaille en saut à ski, discipline qui figure au programme des Jeux d’hiver depuis 1924. Mais ce bronze historique n’aurait sans doute pas été possible sans la disqualification de quatre pays favoris à l’épreuve mixte. Le 7 février, une concurrente allemande, deux Norvégiennes, une Japonaise et une Autrichienne n’ont pu terminer l’épreuve en raison de combinaisons trop amples. 

L’habit des skieurs est surveillé de près en saut, car le poids constitue un grand avantage dans ce sport. Mais semble-t-il que ces athlètes avaient toutes déjà concouru avec ces mêmes habits. L’Allemande Katharina Althaus, médaillée d’argent individuelle, a accusé la Fédération internationale de ski de « détruire le saut à ski féminin ». 

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