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Environnement

Guerre en Ukraine: notre dépendance aux hydrocarbures finance la Russie

AFP
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Photo portrait de Anne-Sophie Poiré

Anne-Sophie Poiré

2022-03-07T23:00:32Z
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La guerre en Ukraine, intimement liée à la hausse draconienne du prix de l’essence, serait-elle l’ultime signal d’alarme qu’il est temps de mettre fin à la dépendance aux énergies fossiles? Plusieurs voix s’élèvent dans cette direction et estiment que le conflit géopolitique pourrait même accélérer la transition énergétique.

Dans certaines stations-service de la grande région de Montréal, le prix à la pompe frôle le seuil des 2$ le litre depuis le week-end. 

L’offre mondiale de pétrole est mise à mal par l’invasion russe en Ukraine qui a commencé le 24 février. 

«Il y a une conjoncture avec l’augmentation du prix du pétrole et du gaz, et le fait que les pays prennent conscience qu’ils sont dépendants des hydrocarbures et des importations, et qu’ils doivent se couper de cette dépendance», souligne le responsable de la campagne Climat-Énergie à Greenpeace Canada, Patrick Bonin.

L’Allemagne, dont 32% du gaz naturel utilisé provient de la Russie, a ainsi l'intention d'accélérer les projets d'énergie éolienne et solaire, annonçait le ministère de l'Économie la semaine dernière.

Le gaz russe représente la moitié des importations allemandes et est la principale source d'approvisionnement énergétique du pays. 

Et la guerre en Ukraine semble souligner la nécessité d’en réduire sa dépendance. 

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«La décision de l’Allemagne, le prix de l’essence, le nouveau rapport du [Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat] GIEC sorti la semaine dernière: ça démontre qu’il faut continuer la transition énergétique qui est amorcée en Europe, parce que le conflit est entre autres alimenté par les hydrocarbures», fait valoir Émile Boisseau-Bouvier, analyste des politiques climatiques à Équiterre.

• À lire aussi: Changements climatiques: il n’est pas trop tard, mais ça presse, alerte le GIEC

La guerre et le pétrole  

Avant la pandémie, 40% du budget fédéral de la Russie provenait du pétrole et du gaz, indique le Réseau action climat du Canada dans un communiqué diffusé la semaine dernière. L’automne dernier, le pays gagnait 641 M$ par jour grâce à ces combustibles fossiles.

«La dépendance du monde aux combustibles fossiles a donné du pouvoir à Poutine et a financé son invasion de l’Ukraine», signalent les 130 organisations canadiennes ayant signé la lettre du réseau.

«L’argent qui finance cette agression est directement lié au changement climatique», a même ajouté la climatologue à la tête de la délégation ukrainienne du GIEC, Svitlana Krakovska, dans la dernière réunion vidéo du groupe de scientifiques avant que son équipe ne soit contrainte de se retirer des négociations pour se mettre à l’abri des bombes.

Exploiter le conflit  

Le Réseau action climat du Canada a également profité de sa lettre pour dénoncer l’instrumentalisation du conflit pour favoriser l’exportation d’hydrocarbure vers l’Europe. 

L’expansion massive de l’extraction de combustibles fossiles canadiens est présentée par le lobby canadien comme la solution aux besoins énergétiques du continent.

Le discours a été repris par plusieurs politiciens, dont le premier ministre de l’Alberta, Jason Kenney.

«On voit chez l’industrie pétrolière et gazière, et chez certains politiciens même, une tendance à vouloir utiliser les crises pour mettre de l’avant leur agenda», explique Patrick Bonin de Greenpeace. «Pensez à la catastrophe de Mégantic. Le brasier n’était même pas éteint que l’industrie est sortie pour dire qu’il fallait davantage de pipelines parce qu’il y avait eu une tragédie ferroviaire.»

«Et là, avec la guerre, on voit le même réflexe de la part de l’industrie», poursuit-il. «La solution au conflit et à l’augmentation du prix de l’essence n’est pas de rajouter du pétrole et du gaz sur le marché, au contraire.»

Pour augmenter l’autosuffisance et l’indépendance énergétique des États, il faudra miser sur le solaire, l’éolien et l’efficacité énergétique, affirment les experts.

• À lire aussi: Bonne nouvelle: année record pour la croissance des énergies renouvelables

«Il n’y a jamais eu de guerre contre le vent et le soleil. Il n’y a jamais eu d’invasion de pays parce qu’il y avait du solaire et de l’éolien», lance M. Bonin. 

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