Martin St-Louis : le petit gars de Laval
![Martin St-Louis lors de la pratique du Canadien d’hier matin à Brossard.](/_next/image?url=https%3A%2F%2Fm1.quebecormedia.com%2Femp%2Femp%2F65853472_408937e70562e8-59ba-4149-9200-d9dedd29027d_ORIGINAL.jpg&w=3840&q=75)
![Photo portrait de Jean-François Chaumont](/_next/image?url=https%3A%2F%2Fm1.quebecormedia.com%2Femp%2Femp%2Fjfceeac4afa-baed-4f03-bf7c-534826ee05ca_ORIGINAL.jpg&w=3840&q=75)
Jean-François Chaumont
«Tu vas leur montrer, Martin. Tu n’as pas à t’en faire, tu vas leur montrer. Tu n’as pas à te décourager, tu vas leur montrer.»
Martin St-Louis s’agite sur son siège dans la salle de conférence au complexe sportif de Brossard en répétant le discours classique de sa mère, France.
- À lire aussi: Martin St-Louis veut faire la différence
- À lire aussi: Rob Ramage décortique la relève des Canadiens
Du haut du ciel, France St-Louis (Théroux) regarde avec fierté le nouveau chapitre de son fils comme entraîneur en chef par intérim du Canadien.
Comme il le faisait à 10 ans, à 16 ans ou à 20 ans, St-Louis cherchera à prouver à ses détracteurs qu’il peut mener la barque du CH à bon port. Et il reprend l’expression de sa mère pour se motiver.
«J’y pense tout le temps, j’ai toujours ça dans ma tête, a confié St-Louis lors d’une entrevue avec Le Journal. Ma mère m’a procuré tellement de confiance. Il n’y avait jamais de problèmes, il y avait toujours des solutions. Elle mesurait 4 pi 11 po, elle était toute petite, mais c’était une femme déterminée et convaincante. Ma mère était gentille avec tout le monde, c’était une femme formidable.»
La voiture avant l’avion
«Du petit garçon à l’Université du Vermont, il est aujourd’hui l’entraîneur en chef du Canadien de Montréal. Sa belle histoire ne s’arrête jamais.»
La voix au bout du fil est celle de Lewis Gross, conseiller, ensuite agent et maintenant ami de St-Louis depuis ses débuts avec les Catamounts du Vermont dans la NCAA en 1993-1994.
Gross a dessiné un bon portrait de l’homme, simplement en racontant une anecdote.
«On se parle pratiquement tous les jours au téléphone depuis 30 ans. Le jour de son embauche (9 février), je lui ai demandé s’il conduisait jusqu’à Montréal. Il m’a répondu que oui. Je lui ai dit qu’il ne changerait jamais. Il aurait pu sauter dans un avion nolisé, mais il préférait conduire. Il m’avait dit aussi qu’il aurait besoin de sa voiture pour conduire à Montréal.»
À ses premiers jours à Montréal, St-Louis a également dormi chez son père, Normand.
«Mes parents m’ont enseigné de bonnes valeurs. Je traite le monde de la même manière, peu importe son statut. Je n’ai jamais été un gars qui a vécu la vie d’une vedette. Je me suis retiré et j’ai choisi de rester près de mes enfants. Je reconduisais les gars vers l’autobus ou je retournais les chercher à l’école, comme tous les parents. J’ai une vie simple. Pour moi, c’était juste normal d’aller dormir chez mon père à la place d’une chambre au Ritz-Carlton. Je n’ai jamais voulu d’une vie de star.»
![Martin St-Louis St-Louis entouré de sa défunte mère, France, et de son père, Normand.](/_next/image?url=https%3A%2F%2Fm1.quebecormedia.com%2Femp%2Femp%2F51254825_4090254f51c04a-2464-4325-ac0c-6fa0f0cb0e0d_ORIGINAL.jpg&w=3840&q=75)
Le salaire minimum
À ses trois premiers matchs derrière le banc du CH, St-Louis a subi trois revers. Il n’a pas encore goûté à la joie d’une victoire avec cette équipe en reconstruction.
Dans la LNH, le petit ailier n’a pas atteint la gloire en un claquement de doigts. Les Flames de Calgary lui ont donné une première chance en 1998-1999, mais c’est à Tampa qu’il a réellement lancé sa carrière deux ans plus tard.
À l’été 2000, il a paraphé un contrat de deux ans avec le Lightning. C’était le début d’un merveilleux parcours.
L’histoire de son premier contrat avec le Lightning est savoureuse.
«Le Lightning lui proposait le salaire minimum dans la LNH qui était de 250 000 $ à cette époque, a rappelé son ami Lewis Gross. J’avais dit à Marty de dire oui. Il avait un an pour montrer à l’équipe ce qu’il avait dans le ventre. Mais il ne voulait pas, il recherchait un contrat de deux ans.»
«Je redoutais qu’il devienne une aubaine, je savais à quel point il était bon. Je me disais qu’il était pour devenir le joueur le moins bien payé de la LNH pour deux saisons. C’est exactement ce qui est arrivé.»
À ses deux premières saisons à Tampa, St-Louis a amassé 40 points en 78 matchs et 35 points en 53 matchs.
«C’était le salaire minimum, mais c’était aussi de la sécurité, a répliqué St-Louis avec le sourire. Je voulais deux ans, je trouvais que j’avais besoin de temps. En deux ans, tu as plus le temps de voir le caractère et le cœur, tu ne regardes pas juste l’athlète et le joueur de hockey. Je n’ai jamais regretté.»
C’était finalement un investissement. Il avait parié sur lui. Comme il vient de parier sur lui pour occuper le poste d’entraîneur du CH sans une réelle expérience du métier.
À sa façon
Comme joueur, St-Louis a un curriculum vitæ des plus glorieux : une conquête de la coupe Stanley, une médaille d’or aux Jeux olympiques, un trophée Hart, deux trophées Art-Ross et une place au Temple de la renommée.
Mais quand on lui demande de dire ce qu’il retient le plus de sa carrière, il revient à des éléments simples.
«Quand je repense à ma carrière, ce que j’apprécie le plus, c’est comment je suis rentré dans la LNH et comment je suis sorti. Je suis rentré par moi-même, on ne m’a jamais repêché. Et je suis sorti par moi-même. J’avais marqué 21 buts à ma dernière année, mais je trouvais que c’était assez. Je voulais me consacrer à ma vie de père.»
Ce qu’il a dit
Sans rancune
Deux fois au cours de sa carrière, Martin St-Louis a vu le Canadien lui tourner le dos. La première fois, à la fin de son stage universitaire, alors qu’il souhaitait obtenir un simple essai. La seconde, lorsque les Flames de Calgary ont placé son nom au ballottage au tout début de sa carrière. Près d’un quart de siècle plus tard, il assure n’en avoir jamais voulu au Tricolore.
«Tout arrive pour une raison dans la vie. Toutes ces déceptions, ces obstacles, ont fait de moi qui je suis maintenant. Je ne changerais rien. D’ailleurs, si j’avais joué pour le Canadien, je n’aurais peut-être pas eu la même carrière. Et je ne serais peut-être même pas ici aujourd’hui.»
Harris, un défenseur rapide
Ryan, le fils aîné de St-Louis, évolue présentement avec les Huskies de Northeastern. Parmi ses coéquipiers, on retrouve Riley et Jack Hughes, les fils de Kent, ainsi que Jordan Harris, choix de troisième tour du Canadien en 2018. Puisqu’il a choisi de disputer une quatrième et dernière saison dans la NCAA, Harris n’a toujours pas d’entente avec le Tricolore. En Martin St-Louis, le Canadien pourrait avoir un argument de plus pour le convaincre.
«Si mes patrons veulent que je les aide, je vais les aider. Harris est un bon joueur, un très bon patineur. La game est rendue très rapide. Quand tu es doté d’un bon coup de patin, tu as de bonnes chances de jouer dans la LNH.»
Une longue route
Détermination. C’est un mot qui colle à la peau de Martin St-Louis. Courage est un autre mot. On lui a dit des centaines de fois qu’il était trop petit pour atteindre la LNH, mais il a fini par tracer son chemin.
«Honnêtement, je me concentrais toujours sur le prochain niveau. Je me disais que si je dominais à mon niveau, j’étais pour atteindre l’étape suivante. Dans le Midget AAA, je dominais. À Hawkesbury, je dominais. J’ai ensuite joué dans la NCAA au Vermont. Je ne savais pas à quoi m’attendre contre des joueurs plus vieux. Mais j’ai encore connu du succès, j’ai eu une bonne saison recrue. »
«Après ma deuxième année, j’ai encore eu une très bonne saison. Je voyais des gars de la NCAA qui obtenaient des contrats dans la LNH. Je me disais que c’était possible pour moi, que mon tour allait venir. Je n’ai pas sauté d’étapes dans ma carrière. Après le Vermont, j’ai joué à Cleveland dans la Ligue internationale. Ensuite, c’était la Ligue américaine, et après, Calgary. Dans la LNH, j’ai eu besoin d’un peu de temps. Mais quand on m’a offert une réelle chance, j’ai trouvé une façon de la saisir.»
Une rondelle dans l’œil
Au mois de décembre 2011, St-Louis a subi une blessure à un œil. Il jouait pour le Lightning de Tampa Bay et il avait reçu un tir du revers de Dominic Moore directement au visage lors d’un entraînement matinal sur la glace du Madison Square Garden. Lewis Gross, son agent, se remémore l’événement.
«Les docteurs l’avaient transporté à l’hôpital à New York. Il était dans un mauvais état. À mon arrivée à l’hôpital, il n’était pas conscient. Il y avait juste moi et un entraîneur de l’équipe. Sa femme était en Floride. Il s’est réveillé vers 20 h et le match se déroulait. À son réveil, sa première question était, c’est quoi le pointage dans le match. C’était tellement Marty. Le hockey représente beaucoup pour lui.»
«Il m’avait donné trop de médicaments, j’étais embrouillé totalement, a répliqué St-Louis en reparlant de cet incident. Je ne me souviens pas de la phrase que j’avais dite à Lewis, mais ça aurait bien du sens!»
– Propos recueillis par Jean-François Chaumont et Jonathan Bernier
St-Louis décrit 7 entraîneurs dans la LNH en un seul mot
Brian Sutter – Flames de Calgary (1998-1999 à 1999-2000) «Travail»
John Tortorella – Lightning de Tampa Bay (2001 à 2008) «Inspirant»
Barry Melrose – Lightning (2008) «Gentil»
Rick Tocchet – Lightning (2008 à 2010) «Intense»
Guy Boucher – Lightning (2010 à 2013) «Stratégique»
Jon Cooper – Lightning (2013 à 2014) «Charisme»
Alain Vigneault – Rangers de New York (2014 à 2015) «Défensif»