Soins infirmiers: les inscriptions stagnent dans les cégeps de l’Estrie
Claude Fortin | Agence QMI
Pendant que le premier ministre du Québec, François Legault, veut convaincre les infirmières à revenir dans le réseau public de santé, la relève se fait tirer l’oreille dans les cégeps de l’Estrie.
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Le nombre d’inscriptions en technique de soins infirmiers atteint 117, cet automne, au Cégep de Granby. Il s’agit du même nombre d’inscriptions qu’à l’automne 2020, qui cache toutefois une réelle diminution par rapport aux années précédentes. En 2017, par exemple, 179 candidates s’étaient inscrites dans cette discipline, et 168 en 2016.
Le même phénomène s’observe au Cégep de Sherbrooke. Cent huit personnes ont présenté leur candidature pour le trimestre d’automne actuel, contre 121, un an plus tôt. Selon les données obtenues par l’Agence QMI, l’année 2020 était peut-être exceptionnelle étant donné qu’à l’automne 2019, 106 candidates à la profession d’infirmières s’étaient inscrites, soit sensiblement le même nombre que cet automne.
Nancy Bédard, présidente de la Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec (FIQ), n’est pas étonnée.
«Ce qu’il faut se dire, c’est que les conditions gagnantes pour attirer les jeunes ne sont pas présentes», dit-elle.
Mme Bédard soutient que le réseau public de la santé ne s’est pas adapté à la mentalité différente qu’entretiennent les travailleurs de la nouvelle génération par rapport à leur travail.
«Les dernières générations aspiraient, et c’est encore plus vrai aujourd’hui, à une meilleure conciliation travail-vie personnelle, puis malheureusement, le réseau de la santé, actuellement, ne correspond pas à ces nouvelles attentes», observe-t-elle.
Baisse des inscritptions
Au Cégep de Granby, Samia Plante, directrice adjointe à la direction des études, souligne que la plupart des établissements de la province affichent une baisse du nombre d’inscriptions en soins infirmiers, depuis quelques années.
Mme Plante hésite à poser un diagnostic précis quant aux causes de la baisse des inscriptions, mais, selon elle, les échos entendus suggèrent que l’obligation de faire du temps supplémentaire expliquerait en bonne partie la désaffection des nouvelles étudiantes pour la profession.
«On sait que le travail d’infirmière a eu mauvaise presse, ces derniers temps. On a mis beaucoup l’accent sur les heures supplémentaires obligatoires, puis ça semble avoir un effet sur le nombre d’inscriptions», analyse Samia Plante.
La présidente de la FIQ confirme l’analyse de Mme Plante. Selon elle, le temps supplémentaire obligatoire reste le principal obstacle au recrutement d’infirmières et au retour dans le réseau public de celles actuellement embauchées par les agences privées de placement.
«Les jeunes n’aspirent plus à travailler 70 heures par semaine, soutient Nancy Bédard. Ce qu’elles veulent, c’est avoir un horaire prévu, être capables d’avoir une vie, avoir de la reconnaissance pour leur travail, se sentir valorisées, et actuellement, depuis des années, les conditions de travail dans le réseau de la santé n’ont tout simplement pas été compétitives dans un contexte de pénurie de main-d’oeuvre.»