Kamila Valieva: de la controverse aux pleurs
Jessica Lapinski
La plus grande controverse des Jeux de Pékin s’est terminée par des pleurs.
La jeune sensation du Comité olympique russe, Kamila Valieva, testée positive à un produit dopant en décembre, a réalisé lors du programme libre de jeudi une performance à des années-lumière de celles qu’elle avait offertes cette saison et a terminé au bas du podium de l’épreuve féminine de patinage artistique.
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On l’avait déjà vue émotive au terme de son programme court, mardi. Mais malgré le poids de la controverse qui pesait sur ses épaules depuis plusieurs jours, Valieva avait surclassé toutes ses adversaires.
Pas jeudi. Jeudi, la patineuse de 15 ans s’est effondrée.
S’élançant la dernière, au son du Boléro de Ravel, Valieva a été coupable de deux chutes, la première sur une combinaison de sauts, la seconde sur un quadruple. Puis, elle a effectué un triple Axel à la rotation incomplète et avec une réception main sur la glace.
L’adolescente russe a ainsi patiné sa pire prestation de cette saison. Elle n’a obtenu que 141,93 points jeudi et une note totale de 224,09 points, qui lui a valu la quatrième place.
Une fois sa performance terminée, Valieva y est allée des traditionnelles révérences aux juges et au public. Sur ses joues, on pouvait voir les larmes qui coulaient. Et au banc, son entraîneuse, la sévère Eteri Tutberidze, l’attendait pour la vilipender.
« Pourquoi tu as baissé les bras ? Pourquoi tu as cessé de te battre ? Explique-moi... Tu as laissé tomber ! » a lâché Tutberidze à sa jeune protégée.
C’est finalement un autre membre de l’équipe du ROC qui a réconforté la jeune prodige : « Ce n’est pas ta défaite. Le monde entier était contre toi. Tu vas continuer de patiner et tu leur montreras », a-t-il dit à Valieva, avant que cette dernière ne quitte les lieux sans s’adresser aux membres des médias.
Dans la tourmente
Valieva est dans la tourmente depuis qu’il a été révélé qu’elle avait été contrôlée positive à la trimétazidine le 25 décembre dernier.
Le résultat a été rendu public le 8 février, au lendemain du triomphe du Comité olympique russe à l’épreuve par équipe. Une compétition dans laquelle Valieva s’était montrée impériale.
Valieva, un produit de l’usine à championnes de Tutberidze, basée près de Moscou, a été autorisée à concourir à l’épreuve féminine à la dernière minute. Le Tribunal arbitral du sport (TAS) a confirmé lundi la levée de sa suspension provisoire appliquée d’abord par l’agence russe antidopage
Mais le TAS ne s’est pas encore prononcé sur le fond du dossier. Il a permis à Valieva de patiner lors de l’épreuve individuelle mardi et jeudir parce qu’« empêcher l’athlète de concourir aux Jeux lui causerait un préjudice irréparable », notamment en raison de son jeune âge, ont fait savoir les trois arbitres.
Il y aura un podium
En attendant la fin de l’enquête sur la jeune patineuse, le Comité international olympique avait décidé qu’aucune médaille ne serait remise dans les compétitions auxquelles Valieva prenait part si celle-ci faisait partie des trois récipiendaires
Son quatrième rang à l’épreuve féminine signifie donc que les trois médaillées pourront grimper sur le podium olympique, vendredi.
Mais si l’on pouvait croire que cette quatrième place de Valieva mettrait un terme à la controverse entourant cette compétition, ce fut plutôt le contraire.
En pleurs, sa compatriote, la médaillée d’argent Alexandra Trusova, a d’abord refusé de prendre part à la cérémonie protocolaire.
De son côté, la nouvelle championne olympique Anna Shcherbakova – également du ROC – a reconnu que cette journée l’avait « émotionnellement vidée ».
« Je ne suis pas en mesure de ressentir quelque chose pour les autres », a-t-elle reconnu, lorsque questionnée sur la déroute de Valieva, sa partenaire d’entraînement.
Sur le podium ce matin, les deux représentantes russes seront accompagnées par la Japonaise Kaori Sakamoto, qui, elle, sera sans doute bien heureuse d’y être.
– Avec l’AFP