Hockey féminin: le Québec fait piètre figure
Kevin Dubé
Même si l’impression générale est que le hockey féminin gagne en popularité au Québec, la réalité sur le terrain est tout autre alors qu’il demeure très difficile d’attirer les jeunes filles à pratiquer notre sport national.
C’est l’un des constats réalisés lors du Sommet du hockey féminin 2021, tenu en juin, et dont le rapport a été officiellement rendu public lundi. Il avait été présenté, il y a quelques semaines par Danièle Sauvageau aux autres membres du Comité sur la relance du hockey présidé par Marc Denis.
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Le premier des neuf constats stipule que «le nombre de filles inscrites en hockey (mixte et féminin) est bien en deçà des niveaux qui seraient jugés acceptables pour le Québec».
Selon le rapport, le nombre d’inscriptions de jeunes filles au hockey n’a à peu près pas bougé depuis la saison 2014-2015, passant de 6517 à 6618 en 2019-2020 (il n’y a pas eu de hockey mineur l’an dernier en raison de la pandémie).
Loin derrière la Saskatchewan
En comparaison aux autres provinces canadiennes, le Québec fait aussi figure d’enfant pauvre. Deuxième plus important bassin de population au pays, la Belle Province compte un ratio d’une joueuse par 1296 habitants, ce qui se situe très loin derrière la Saskatchewan (1/201), l’Ontario (1/287), la Colombie-Britannique (1/571), le Manitoba (1/229) et l’Alberta (1/368).
«Ça démontre bien la réalité sur le terrain», mentionne la coordonnatrice principale du Sommet du hockey féminin et assistante-entraîneuse avec les Carabins de l’Université de Montréal, Stéphanie Poirier.
«Les gens voient les Marie-Philip Poulin, Mélodie Daoust, Caroline Ouellette ou Kim St-Pierre et pensent que le hockey est en croissance au Québec. Au niveau des chiffres, c’est tout le contraire et c’est un constat triste», ajoute celle qui n’arrive pas à s’expliquer que le nombre d’inscriptions au hockey féminin ne parvient pas à se distancer de la ringuette au Québec (6618 au hockey contre 5856 à la ringuette en 2019-2020).
Éducation et accessibilité
Plusieurs pistes de solution sont proposées par le comité dans le rapport publié lundi. On propose, entre autres, de favoriser l’accessibilité au sport en bas âge chez les jeunes filles en ayant un programme de type « première présence », en créant des activités parascolaires et des événements dans les écoles et en recrutant dans les sports d’équipes estivaux tels que le baseball et le soccer.
«C’est un travail qui doit se faire sur le terrain. On doit attirer les jeunes filles et créer des environnements et des moments pour qu’elles veuillent continuer», explique Mme Poirier.
Parmi les autres constats, le rapport déplore «l’absence d’option viable pour que les femmes puissent gagner leur vie en jouant au hockey professionnel au Québec».
«On a l’impression que puisque peu de femmes réussissent à vivre du hockey, les parents préfèrent que leur fille se concentre sur ses études. Pourtant, ce désir de réussir dans le hockey peut être aussi fort pour les filles que les gars. Le sport, ça amène beaucoup. À l’inverse, il n’y a jamais trop de bâtons de hockey à 300 $ pour les gars, d’entraînements sur ou hors glace. Pourtant, on sait tous que la majorité des garçons n’atteindront pas la LNH. Il faut simplement offrir une chance égale aux jeunes de jouer au hockey», ajoute-t-elle, soulignant qu’il ne s’agit pas «d’une guerre gars contre filles».
«Il y a 90 000 gars qui jouent au hockey contre 7000 chez les filles. Il y a une réalité de chiffres et on la comprend.»
Meilleur Calibre
Tout n’est pas négatif, toutefois, au Québec, tient à préciser Mme Poirier.
«Le niveau s’est beaucoup amélioré et on le voit par la qualité de notre programme à travers le Canada. On est une des meilleures équipes à chaque année sur la scène nationale. On a des joueuses qui jouent universitaires et dans la NCAA et les meilleures joueuses sont souvent des Québécoises. On est reconnues pour avoir des joueuses avec beaucoup d’habiletés, c’est notre marque de commerce. Nos filles élites sont meilleures et ont de meilleures habiletés.»
Les neuf constats :
1. Le nombre de filles inscrites en hockey (mixte et féminin) est bien en deçà des niveaux qui seraient jugés acceptables pour le Québec.
2. Les joueuses et leurs parents ne sont pas au courant des possibilités et des opportunités qui s’offrent à eux en termes de hockey féminin au Québec.
3. Il existe différents parcours de développement en hockey féminin, mais ceux-ci sont mal connus et surtout mal communiqués aux clientèles ciblées.
4. Il existe une faiblesse au niveau des opportunités de développement en raison d’une attribution estimée inéquitable des ressources.
5. L’identification des joueuses élites est déficiente et doit être améliorée.
6. L’encadrement et les ressources fournies aux joueuses identifiées élites sont insuffisants.
7. Il n’y a pas d’option viable pour que les femmes puissent gagner leur vie en jouant au hockey professionnel au Québec.
8. La présence de femmes dans l’encadrement du hockey féminin au Québec est insuffisante.
9. La reconnaissance et les opportunités pour les femmes dans le domaine du hockey sont limitées et souvent mal adaptées à leur réalité.