Debbie Lynch-White explique pourquoi la monogamie ne l’interpelle pas
Samuel Pradier
Fabuleuse comédienne, Debbie Lynch-White est aussi une femme au grand coeur qui a beaucoup donné dans sa vie. Elle est actuellement dans une période où elle apprend à s’occuper davantage d’elle-même. Elle a accepté de nous en parler et de se dévoiler un peu plus.
• À lire aussi: La bande-annonce officielle de «Nos belles-soeurs» vous charmera
1) J’ai toujours voulu être comédienne
«Mon grand-père m’a rappelé, il y a quelques années, que lorsque j’avais huit ans, je disais déjà que je voulais devenir actrice. Je ne sais pas d’où c’est venu, certainement parce que j’étais influencée par les films que je regardais. J’aimais les acteurs et les actrices que je voyais dans les films. À cet âge-là, je pense que je voulais juste jouer, devenir un personnage. Je ne viens pas d’une famille où il y avait beaucoup de culture; mon père a fait mon éducation musicale, mais on n’allait pas au théâtre. Ensuite, quand j’ai commencé à faire du théâtre au secondaire, c’est devenu une évidence. J’étais totalement investie dans mes cours d’art dramatique. J’étais le genre d’élève qui dessinait l’affiche, faisait le programme. J’aidais les autres à se maquiller, je plaçais les costumes dans les loges, je jouais dans le spectacle, je restais avec le prof après la représentation. Quand j’ai dû choisir un programme pour le cégep, je me suis dit que je pourrais faire ça tous les jours de ma vie.»
2) Le chiffre 1 est important pour moi
«J’étais élevée dans la religion catholique. Au cégep, j’ai découvert la philosophie, et je me suis rendu compte que les autres façons de penser le monde me correspondaient beaucoup plus. Aujourd’hui, ma spiritualité concerne surtout mon père. J’ai une relation spéciale avec le chiffre 11, qui était son numéro à la balle molle et au hockey, et qui a ensuite été mon numéro au Ultimate Frisbee. Depuis que mon père est décédé, c’est hallucinant la quantité de 11 qui parsèment ma vie à des moments clés. C’est chaque fois une dose de réconfort, comme si mon père m’envoyait un signe pour me dire qu’il était là et qu’il était fier de moi. Une des dernières fois, c’était au début du tournage du film Nos belles-soeurs. On était 11 actrices, il y avait 11 chansons, ma première date de tournage était le 11 septembre, il y avait un 11 dans l’adresse de la maison de mon personnage, et Denise Robert nous a dit que le film allait sortir le 11 juillet. C’est quand même beaucoup. De son vivant, mon père ne m’a jamais vue jouer sur scène. Ça m’a longtemps fait de la peine, mais je me dis qu’il le sait. Ce sont des signes qui m’apaisent et me réconfortent.»
3) J’aurais aimé être plus bienveillante envers moi
«Plus jeune, j’aurais aimé être capable d’avoir un regard plus doux et bienveillant sur mon corps. Je trouve que c’est le lot de beaucoup de femmes, et d’hommes aussi. Je me sens de plus en plus libérée de tout ça, de toute la pression qu’on nous met dessus, à s’haïr, à se comparer, à être en compétition... Quand je revois des photos de moi lorsque j’étais jeune, je me rappelle que je me trouvais grosse à l’époque, et pourtant je ne l’étais pas. Je me demande si, au final, je vais avoir passé toute ma vie en me regardant de façon aussi sévère. Mais je constate que je suis en train de me libérer de cette pression, autant envers moi qu’envers les autres. Le physique n’a jamais été un critère important pour moi dans ma relation aux autres. Mon regard est de plus en plus bienveillant et attiré par des corps atypiques. J’aurais aimé avoir cette vision de nos corps plus libres et plus décomplexés dans ma jeune vingtaine, j’ai passé beaucoup trop de temps à me taper sur la tête et à me trouver laide.»
4) J’aimerais revivre mon primaire
«J’aimerais revivre toute la période précédant le divorce de mes parents et la maladie de mon père, avant que la vie prenne une autre tournure. Au primaire, je n’avais pas des tonnes d’amis, mais j’en avais quelques-uns. Je jouais au kickball, à l’élastique, c’était le fun. Il y avait aussi tout ce que je faisais avec mon père, autant dans la musique que dans le sport. Notre complicité, c’était une belle période. La vie était plus facile, j’avais beaucoup moins de responsabilités. La présence de mon père dans ma vie, quand il était en santé, c’était quelque chose d’important.»
5) Mon chemin de compostelle reste mémorable
«J’ai vécu un voyage incroyable! J’ai respecté mes limites, j’ai décidé de lâcher alors que ça faisait un an et demi que je m’entraînais pour Compostelle. Je n’ai toutefois pas dit mon dernier mot, il y a une partie de moi qui a envie d’y retourner. Mais ça m’a permis de me retrouver en cavale durant cinq semaines en Europe, et c’est un voyage inoubliable parce qu’il a été marquant. J’ai notamment retrouvé une personne de qui j’avais été très proche et que j’avais perdue de vue depuis des années. Ensuite, ça faisait 10 ans que je n’avais pas voyagé seule, et j’ai vraiment l’impression d’avoir fait le point sur plein de choses avec moi-même. Ça m’a aussi fait du bien d’être complètement anonyme. J’ai rencontré plein de gens qui ne savaient absolument pas qui j’étais ni ce que je faisais dans la vie, et ça a fait du bien.»
6) Je me sens à la bonne place
«J’ai la chance de toucher à beaucoup de zones dans mon métier. Je fais aussi de la musique, de la télé, du théâtre, de l’animation, du documentaire... On me donne l’occasion de toucher à tout. Il y a une confiance et une assurance qui viennent avec l’expérience. J’ai constamment la réflexion que tout peut s’arrêter demain, mais ça ne m’angoisse pas. J’aime la route sur laquelle je suis professionnellement, et personnellement, je suis dans un moment de reconstruction. L’année passée m’a ramassée. Autant j’ai vécu de grands moments avec des projets formidables et des défis professionnels intenses, autant j’ai eu de grosses baisses de régime personnelles. Actuellement, je constate, une fois de plus, que j’ai une bonne capacité à me relever dans la vie. Ce ne sont pas mes premières épreuves, mais c’est un moment de ma vie où je prends le temps de penser à moi. Depuis quelques mois, c’est la première fois de ma vie que personne n’a besoin de moi, et ça m’a beaucoup déséquilibrée. Je me suis occupée de mon père dès l’âge de 14 ans, ensuite de mon grand-père, puis j’ai été en couple. Je me suis longtemps définie par ça. Au départ, j’avais comme perdu le sens de tout, je ne savais plus comment être. Je n’ai jamais eu l’occasion de prendre soin de moi à temps plein, mais ça fait vraiment du bien.»
7) Je tombe sans cesse amoureuse
«Pour moi, l’amour n’est pas seulement l’amour romantique qu’on connaît, qui est dédié à une personne. C’est beaucoup plus large que ça. Je ressens de l’amour pour mes amis, je me sens amoureuse d’eux et d’elles. J’ai aussi été amoureuse au sens habituel du terme, et j’espère que ça va m’arriver encore. Mais en ce moment, j’ai bien envie de voir l’amour et les relations comme un genre de constellation. J’ai de moins en moins envie de hiérarchiser l’amour, c’est-à-dire d’avoir une seule relation dans laquelle je mets tous mes oeufs. La monogamie ne m’intéresse pas. Je suis une grande amoureuse, une grande romantique, mais j’ai de plus en plus envie de positionner mes relations dans une constellation d’amours différents. Je n’ai pas envie qu’une soit plus importante que les autres. Les derniers mois ont été très éprouvants et difficiles, à la suite de mon divorce, et ça m’a forcée à réfléchir et à me recentrer. J’ai réalisé à quel point je suis bien entourée, j’ai des amis incroyables et je ne veux pas les négliger en privilégiant une autre relation. Je suis aussi quelqu’un qui a énormément d’amour à donner, et j’apprends à recevoir. C’est la partie qui me demande un peu plus de travail.»