Automobilistes sur les pistes cyclables : des cyclistes bloquent des rues pendant «juste 2 minutes»
Julien Bouthillier
Quand une voiture s’arrêtait sur la piste cyclable de la rue McGill vendredi midi, un groupe de cyclistes en faisait de même sur la voie où les autos circulent. Une manière de créer un corridor de sécurité pour les cyclistes, mais également de sensibiliser les automobilistes.
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«Je viens me chercher un lunch, ça dure 2 minutes», a justifié au 24 heures l’un des automobilistes qui s’est fait prendre à se stationner en double sur la piste cyclable par les militants de Vélorution Montréal, le collectif derrière l’action de vendredi.
«Juste deux minutes», c’était justement le slogan de l’activité, une excuse beaucoup trop utilisée par les automobilistes selon ses organisateurs.
«Ces deux minutes peuvent être une question de vie ou de mort. Pourquoi la commodité des conducteurs est plus importante que la sécurité des personnes à vélo?» se demande Sophie Lavoie, une participante à l’événement.
Sensibilisation double
L’action de vendredi visait à sensibiliser les automobilistes, mais également les autorités municipales qui, selon les militants, devraient mieux protéger les pistes cyclables afin qu’il soit plus pour difficile pour les voitures de s’y aventurer. Ils citent en exemple le Réseau express vélo de la rue St-Denis, un modèle qu’ils aimeraient voir implanter sur encore plus de rues, notamment sur McGill.
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Les bollards de protection installés entre la chaussée et la piste cyclable sur la rue McGill ne semblent en effet pas très dissuasifs pour les automobilistes.
Lors des 10 premières minutes du passage du 24 heures aux abords de cette piste cyclable, nous avons été témoins de trois véhicules s’y immobilisant, ce qui est interdit. Le phénomène s’est poursuivi tout au long du moment passé avec les militants, ce qui met en danger les cyclistes selon eux.
«Ce n’est peut-être pas agréable de devoir tourner sur une rue, se stationner, marcher trois minutes pour aller chercher ta bouffe, mais pour moi c’est le minimum de cohabitation, de ne pas tout à coup t’immobiliser dans une place où des personnes vulnérables circulent», explique entre deux interventions dans la rue, Mathieu Murphy-Perron, un membre du collectif Vélorution Montréal.
«Une piste cyclable, ce n’est pas un stationnement. Il y en a plein des stationnements. Il faut juste chercher un peu», ajoute Mme Lavoie.
Le groupe Vélorution espère que son action de vendredi permettra de remettre de l’avant l’enjeu du partage de la route, et rappelle que ces obstacles ne sont pas que des désagréments pour les cyclistes, mais peuvent représenter des enjeux de sécurité.
«Il y a des cyclistes plus aguerris qui vont dire "ok, je vais naviguer comme il le faut", mais quand je vois un kid de 8-9-10 ans avec ses parents essayer de naviguer ces obstacles-là, ça m’émeut beaucoup», estime M. Murphy-Perron.
Bonne réaction des automobilistes
La plupart des automobilistes interpellés par les militants semblaient sympathiques à leur cause et s’avouaient être dans le tort. Un chauffeur de Uber qui circulait sur la rue McGill lorsque celle-ci a été fermée par le groupe de cyclistes le temps qu’un véhicule quitte la piste cyclable, a indiqué être en accord avec l’action des militants, bien qu’il regrettait que celle-ci ait causé du retard à la course qu’il était en train d’effectuer.
«Les quelques personnes qu’on a interpellées à date étaient en train de rire, ils ont pris le trac, ils rentraient dans le jeu. Ils comprenaient que c’est un peu un faux pas ce qu’ils étaient en train de faire», confirme M. Murphy-Perron.
Un seul automobiliste rencontré par le 24 heures faisait preuve d’une certaine animosité envers les cyclistes.
«Veux-tu que je t’en parle de la sécurité des cyclistes moi? Des osties de fous qui passent partout en malade, qui ne font pas attention aux piétons, qui ne font pas attention aux chars, ils se câlissent bien de tout le monde. [...] Il faudrait qu’ils respectent les autres s’ils veulent être respectés», nous a confié Fabien, qui a dit tout de même comprendre les revendications des militants bien qu’il trouve qu’ils «ont beaucoup de temps à perdre».
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Nous avons soumis les commentaires de Fabien aux militants du collectif Vélorution pour savoir comment ils réagissaient à ceux-ci.
«Si les infrastructures étaient mieux réparties, si la redistribution de l’espace se faisait de manière beaucoup plus équitable, probablement qu’il y aurait moins de cyclistes justement qui enfreindraient la loi», a répondu du tac au tac Mme Lavoie.