Y'a-t-il une guerre à l'automobile au Québec?
Élizabeth Ménard
Les partisans du transport en commun sont parfois vocaux, la sortie du maire de Québec Bruno Marchand, mercredi, en faisant foi. Mais y’a-t-il réellement une guerre à l’automobile au Québec? Voici les faits.
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«Le maire de Québec dit qu’il ne veut pas faire une guerre à l’automobile, qu’il le prouve et qu’il arrête de polluer l’existence des conducteurs avec des projets comme ça!» lançait le ministre de l’Innovation numérique Éric Caire à l’endroit du maire de Québec Bruno Marchand, mercredi.
Il réagissait à la configuration du tramway de Québec qui prévoit une portion de route partagée de 500 mètres sur le boulevard René-Lévesque.
Le ministre s’est par la suite rétracté sur son compte Twitter, mais la graine était semée.
Ce matin, je suis allé trop loin. Même si j'ai un désaccord avec le maire @brunomarchand quant au tramway, il est une personne de bonne foi et son intention n'est pas de polluer l'existence des automobilistes. Les citoyens ont des questions légitimes et la Ville doit y répondre.
— Éric Caire (@ericcaire) March 23, 2022
Inspirés par la chronique de notre collègue Antoine Robitaille, on a décidé de sortir quelques données pour offrir une perspective juste sur la place de l’automobile et des autres modes de transport au Québec.
Données sur la place de l'automobile au Québec
- Le budget provincial dévoilé cette semaine prévoir deux fois plus d’investissements pour le réseau routier que le transport collectif.
- À Montréal, l’automobile occupe 73,8% de la voirie, contre 1% pour le transport collectif, 18,8% pour les piétons et 1,3% pour le vélo.1
- Entre 1990 et 2017, le nombre de véhicules à usage personnel (véhicules de promenade) immatriculés au Québec a augmenté de 64 % alors que la population adulte a augmenté de seulement 25 %.2
- Non seulement le nombre de véhicules croit, mais la taille des véhicules augmente elle aussi. Entre 1990 et 2018, le nombre de camions légers (VUS, multisegments, camionnettes et mini-fourgonnettes) a augmenté de 306% au Québec.3
- Peu importe que vous soyez piéton, cycliste ou automobiliste, chaque famille de quatre personnes au Québec assume 6900 $ par année en dépenses publiques pour le transport automobile dans la province.4
Guerre à l'objet, pas au voyageur
La voiture est donc encore reine sur les routes du Québec et elle prend d’ailleurs de plus en plus de place.
« Il y a clairement un déficit d’options autres et d’espacés dédiés à autre chose qu’aux véhicules privés, une allocation très inéquitable de l’espace actuellement», affirme la titulaire de la Chaire de recherche sur la mobilité des personnes de Polytechnique, Catherine Morency.
Mais elle n’est pas prête à dire qu’il n’y a pas de guerre à l’auto pour autant.
«Guerre aux automobilistes, non. Diversification des options de transport, réduction de l’obligation de posséder un ou plusieurs véhicules et de devoir l’utiliser partout, oui. Donc guerre a l’objet, pas au voyageur, car on peut lui souhaiter de ne plus être otage de l’objet», souligne-t-elle.
Il faut travailler à rendre les autres options efficaces, sécuritaires et confortables si on prend les changements climatiques aux sérieux, estime l’experte.
Sources:
1. Caractérisation du partage de la voirie à Montréal
2. L’état de l’automobile au Québec: constats, tendances et conséquences
3. Comprendre la hausse des camions légers au Canada pour renverser la tendance
4. Évolution des coûts du système de transport par automobile au Québec