Vous vous trouvez moche sur Zoom? Vous n’êtes pas seul(e)!
BILLET - On risque de voir plus de visages aux traits refaits au cours des prochaines années: les demandes en chirurgie esthétique ont explosé pendant la pandémie, et les réunions et rencontres par webcam y sont pour quelque chose.
C’est facile de comprendre pourquoi: chaque réunion Zoom me rappelle que je n’ai jamais été si cernée. J’ai beau me concentrer sur mes collègues, les poches sous mes yeux restent là, dans le coin de mon écran, à me narguer... La pandémie a multiplié les visioconférences et, avec elles, les occasions d’observer notre visage fatigué.
Une hausse d’interventions esthétiques
Aux États-Unis, on remarque une hausse de consultations pour chirurgie esthétique depuis le début de la pandémie. Des Américains se tourneraient vers les injections pour rectifier leurs «défauts», soudainement devenus évidents. Dans le journal Facial Plastic Surgery & Aesthetic Medicine, des médecins parlent même d'une pandémie de dysmorphie corporelle, soit de préoccupation excessive concernant un défaut de l'apparence physique!
L’ère Zoom serait-elle en train de maltraiter notre estime de soi?
J’en ai discuté avec la Dre Annie Aimé, psychologue et cofondatrice de la clinique Imavi (spécialisée dans les problématiques liées à l'image corporelle).
Lors de notre entretien, la professeure à l’Université du Québec en Outaouais m’a expliqué que les visioconférences peuvent encourager l’objectivation de notre corps. «Quand on se regarde énormément, on finit par traiter notre corps comme un objet. Au lieu d’être un corps, on a un corps. On le regarde, on le juge et on se demande comment on pourrait l’améliorer.»
En traitant ainsi notre enveloppe, on augmente les risques d’être insatisfait(e) de notre image corporelle. Sans oublier que les webcams nous envoient rarement le reflet le plus flatteur: elles nous captent en train d’écouter ou de réfléchir, et non pas en train de rire autour d’une table avec nos amis, illuminés par la passion!
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Des trucs pour mieux s’aimer
Comment entretenir un rapport sain avec notre image, alors? Notamment en fermant sa webcam lorsque possible et en diminuant le temps qu’on passe à regarder les autres sur les réseaux sociaux, m’a expliqué la Dre Annie Aimé. Mais le plus philosophique de ses conseils m’habite encore: « Il faut créer un argumentaire qui va nous permettre d’embrasser la diversité et repousser les standards de beauté», m’a-t-elle dit.
Si on se diminue le corps, c’est qu’on le compare. On tente d’atteindre des standards de beauté en jugeant qu’ils déterminent notre valeur. Pourtant, voudrait-on d’un monde dans lequel tout le monde serait identique? «Comment tomberait-on en amour, si on était tous pareils?» m’a demandé la psychologue. Bonne question. J’ai effectivement souvenir d’avoir flanché devant une dent cassée, une large cicatrice, un nez unique et plusieurs autres caractéristiques témoignant d’histoires à raconter, d’un corps à découvrir...
Ne me reste donc plus qu’à apprendre à tomber en amour avec mon menton fuyant, lors de mes prochaines réunions Zoom.