Un recueil de nouvelles signé Hélène Laforest

Josée Boileau
Sous la plume d’Hélène Laforest, la communion est totale entre les femmes et le monde végétal, et cela mène à une angoisse sourde comme à un grand apaisement.
La couverture illustrant une maison ensevelie sous la végétation et le titre Nous renaîtrons peut-être annoncent le cadre bien particulier de ce recueil de nouvelles. Une aura de mystère qui sied au réalisme magique des récits qu’on y trouve.
Chacun d’eux met en scène une femme en quête d’harmonie, et la nature apparaît le cadre rêvé pour y accéder. À moins que ce soit là un mirage? Mais peut-être que ce qui semble un piège pour le lecteur s’avère une libération pour la protagoniste? Hélène Laforest nous tient en bel équilibre sur ce fil original.
Chacune de ses sept nouvelles court sur une quarantaine de pages, ce qui permet de s’attacher aux personnages. Là une dynamique fillette; ici une septuagénaire affaiblie; ailleurs des femmes qui ont envie de tout changer.
Entre réalisme et ambiguïté
Elles sont toutes bien ancrées dans la réalité, mais avec une part d’elles-mêmes qui leur permet de littéralement se fondre dans les éléments. La nouvelle «Les plantes d’intérieur n’existent pas» en est une bonne illustration.
Laure a 72 ans et les dommages laissés par un AVC survenu deux ans plus tôt l’obligent à recevoir des soins à domicile. Les préposées qu’on lui envoie ne sont pas toutes sympathiques, mais qu’y faire? L’autrice décrit avec finesse ce que cela signifie pour Laure, qui, en plus, voit son état se détériorer. Le temps est-il venu d’aller en résidence?
Mais alors, que faire de ses chères plantes: là où elle appelle, on lui répond qu’elle n’aurait droit qu’à une, ou deux, ou aucune. Or, elle en a une centaine! Et elle y tient comme si c’étaient ses enfants; pourrait-elle être heureuse sans elles?
Justement, quelques mois plus tôt, une amie lui a fait cadeau d’une plante consolatrice. Elle jouera pleinement son rôle...
La nouvelle suivante nous tient plutôt dans l’ambiguïté. Là aussi, la nature se veut un refuge face à un monde exigeant, destructeur. Mais qu’en est-il de la notion de choix? Les participantes à une «retraite de transformation de soi» avaient-elles envie d’autant de profondeur?
Plusieurs héroïnes
On trouve aussi dans ce recueil des maisons bien vivantes et des livres qui palpitent. Sans oublier cette jeune végane qui se bute à beaucoup d’incompréhension. Et encore, si les gens mesuraient à quel niveau élevé d’ascétisme elle aspire! Une tatoueuse saura nourrir ses aspirations. Cette nouvelle, où la narratrice écrit à sa mère, s’avérera lumineuse.
Mais les mères sont parfois décevantes, surtout quand elles ne veulent rien comprendre de phénomènes étranges. La jeune Rosy, dite Porcelaine, en fera l’expérience dans la maison de campagne où sa mère s’est installée avec deux amies. Mais peut-être qu’être adulte implique de se mentir pour ne pas accepter l’évidence...
Les héroïnes de ce recueil, elles, ont au contraire l’esprit bien ouvert, peu importe où cela les mènera!

Nous renaîtrons peut-être
Hélène Laforest
Tête première
336 pages