Victoria Azarenka règle ses comptes en Australie
Jessica Lapinski
Il y avait 10 ans que l’ancienne meilleure joueuse au monde Victoria Azarenka n’avait plus atteint le carré d’as des Internationaux d’Australie. Cette année-là, sur le Rod Laver Arena, la Bélarussienne au sommet de son art avait remporté son deuxième et ultime titre majeur à ce jour.
Mais cette conquête avait aussi été marquée par une controverse. En demi-finale, «Vika» avait pris une pause médicale de 10 minutes vers la fin de la deuxième manche.
Sa rivale du jour, l’Américaine Sloane Stephens, venait de sauver trois balles de match pour la briser et ramener le pointage à 5-4.
Revenant du vestiaire, Azarenka avait remporté la rencontre dès le jeu suivant, brisant à son tour. Puis, elle avait dit à ESPN «qu’elle avait eu besoin de se calmer».
Le match était disputé sous une chaleur accablante à Melbourne et la jeune championne «n’arrivait plus à respirer».
«C’est comme si je faisais une crise de cœur», avait-elle affirmé.
En conférence de presse un peu plus tard, elle s’était corrigée, disant avoir mal compris la question posée par le réseau américain. «La raison pour laquelle je ne pouvais pas respirer, c’est parce que mon dos était coincé», avait-elle nuancé.
Son pire moment
Cette pause médicale prolongée et ce rectificatif avaient valu à la Biélorussienne bon nombre de critiques de la planète tennis. Sur les réseaux sociaux, Azarenka avait été traitée de menteuse.
Clairement, cet épisode a laissé des marques. Dix ans plus tard, après avoir battu l’Américaine Jessica Pegula, troisième favorite, par la marque de 6-4 et 6-1 mardi en quart grâce à un jeu inspiré, la raquette de 33 ans a qualifié cet épisode de «pire moment de sa carrière».
«La façon dont j’ai été traitée, la façon dont j’ai dû m’expliquer jusqu’à 22 h 30, parce que personne ne souhaitait me croire...», a laissé tomber la 24e tête de série à Melbourne.
Pas de méchants ni de héros
Il était impossible de lire dans le regard de l’ex-top 10 à ce moment, car elle porte des lunettes de soleil en conférence de presse pour éviter que la lumière ne lui cause des migraines.
Mais le ton laissait peu de doute. Azarenka avait encore des comptes à régler. «Savez-vous ce qui s’est passé réellement il y a 10 ans? C’est ça, le problème», a-t-elle répondu au journaliste qui l’a questionnée à ce sujet.
Avant le début de la quinzaine, le Serbe Novak Djokovic déplorait le fait qu’il était dépeint comme un «méchant» dans les médias l’an dernier, après que son visa australien eut été annulé.
La Biélorussienne a fait écho aux propos de l’homme aux 21 titres majeurs, mardi.
«Il y a parfois cet incroyable désir d’écrire une histoire avec un méchant et un héros, a-t-elle soulevé. Mais nous ne sommes pas des méchants ni des héros, nous sommes des humains normaux qui traversent beaucoup, beaucoup de choses.»
«Les hypothèses et les jugements, ces commentaires, c’est de la merde parce que personne ne connaît le fin fond de l’histoire. Je l’ai expliquée plusieurs fois et personne ne m’a crue.»
«Ça m’a pris 10 maudites années à passer par-dessus. J’ai finalement réussi.»
Accepter la peur et l’anxiété
Au-delà de cet épisode, Azarenka a dit qu’elle travaillait depuis six mois à calmer l’angoisse qui l’envahit parfois sur le court et qui a miné une partie de sa carrière.
«Je tente d’accepter cette anxiété, cette peur qui m’habite, a dit la vétérane. De n’être ni positive ni négative sur le terrain, mais simplement neutre.»
Cela semble fonctionner pour «Vika» depuis le début de la quinzaine, puisque l’on croirait voir par moments l’Azarenka d’antan.
Mais n’allez pas lui dire. Elle n’aime pas cette expression.
Ne pas penser au titre
Toujours est-il que la Biélorussienne est de retour en demi-finale de ces Internationaux d’Australie, qui sont le théâtre de ses deux seuls titres du Grand Chelem en carrière.
Elle affrontera, mercredi soir ou dans la nuit subséquente (à l’heure de l’Est), la Kazakhe Elena Rybakina, 22e favorite et championne à Wimbledon l’an dernier.
Et maintenant qu’elle est passée par-dessus les événements d’il y a 10 ans, Azarenka croit-elle qu’elle est prête à finalement réussir le triplé à Melbourne?
«Il est trop tôt pour y penser. Je crois que les réponses que je vous ai données plus tôt sur ma mentalité actuelle permettent de comprendre que je ne souhaite pas songer tout de suite à la victoire.»