Retour de congé de maternité: une infirmière butée à la bureaucratie
Katia Laflamme
Une infirmière qui souhaite retourner au travail après des congés de maternité se bute à la bureaucratie et risque même d'abandonner la profession.
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Sabrina Turcotte est infirmière depuis 2003.
Dans les quatre dernières années, elle a eu trois enfants et s’est absentée pour ses congés de maternité.
En mars 2019, elle était enceinte, mais travaillait tout de même dans le département d’obstétrique. Lorsque la pandémie a frappé, elle a dû être retirée de façon préventive en raison des risques pour les femmes enceintes associés à la COVID-19.
«Je n’ai pas pu continuer d’exercer la profession avec les recommandations, ce qui a fait en sorte que j’ai été en retrait préventif de façon prématuré», a expliqué Sabrina Turcotte.
Dans les dernières semaines, lorsqu’elle s’est informée à son gestionnaire des modalités de son retour au travail, après son dernier congé de maternité, l’infirmière a été informée qu’elle n’avait pas complété les 500 heures de travail requis, sur une période de quatre ans, et qu’elle ne pouvait pas retourner au travail sans une mise à jour de ses compétences.
Puisqu’elle a été retirée prématurément en mars 2019, il lui manque trois semaines pour atteindre la cible des 500 heures.
«Le règlement de l’OIIQ applique prévoit que si une personne n’a pas exercé 500 heures au cours des quatre dernières années elle doit faire l’objet d’une mise à jour de ses connaissances», a expliqué Chantal Lemay, directrices aux admissions et au registrariat de l’Ordre des infirmières et infirmiers du Québec.
Sabrina Turcotte a deux options pour mettre à jour ses connaissances. Elle doit retourner sur les bancs d’école et suivre un stage pour un total de 480 heures ou s’entendre avec son employeur sur un programme de formation de plusieurs mois. Ces formations ne sont pas rémunérées.
Sabrina Turcotte estime que si elle n’avait pas été retirée prématurément elle ne se retrouverait pas dans cette situation. Surtout qu’elle a toujours suivi les formations pour se mettre à jour depuis qu’elle pratique la profession d’infirmière.
«Je trouve ça très injuste, je vis beaucoup de colère, beaucoup de tristesse par rapport à tout cela, parce qu’il y a un besoin criant, mes collègues sont épuisés, font du temps supplémentaire. Moi je suis ici, je suis prête à travailler et je n’ai jamais fait de fautes professionnelles», a confié Sabrina Turcotte en entrevue à TVA Nouvelles.
La directrice des admissions et du registrariat de l’Ordre des infirmières et infirmiers du Québec est consciente de la situation actuelle de pénurie de main-d’œuvre au Québec, mais soutient que le règlement est en place pour s’assurer que les soins sont adéquats et sécuritaires.
«En temps de pandémie, on le sait, ce n’est pas facile dans les milieux, mais l’OIIQ a tout de même un rôle et une responsabilité d’assurer le contrôle de l’exercice de ses membres», a expliqué Chantal Lemay.
Selon Mme Lemay, il existe un comité à l’OIIQ composé d’infirmières et d’un représentant du public qui se penche sur ce type de dossier.
«Pour les accommodements ou les considérations particulières, le dossier doit être présenté à ce comité, qui pourra prendre une décision individualisée», a confirmé Chantal Lemay.
Sabrina Turcotte ne souhaite pas que cette réglementation soit abolie, mais plutôt que son dossier soit traité avec «le gros bon sens».
Il y a actuellement 190 postes vacants d'infirmières, d’infirmières auxiliaires et d’inhalothérapeute au Centre intégré de santé et de services sociaux du Bas-Saint-Laurent.