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L'article provient de Le Journal de Montréal
Culture

Quand les femmes se tiennent debout

Après avoir refusé de porter le voile pour une entrevue avec le président iranien Raïssi, la journaliste Christiane Amanpour s’est retrouvée devant une chaise vide.
Après avoir refusé de porter le voile pour une entrevue avec le président iranien Raïssi, la journaliste Christiane Amanpour s’est retrouvée devant une chaise vide. Capture d'écran, CNN
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Photo portrait de Sophie Durocher

Sophie Durocher

23 septembre 2022
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Ça s’appelle avoir du front tout le tour de la tête.

Christiane Amanpour, la journaliste vedette de CNN, devait faire une entrevue avec le président iranien Raïssi à New York. Mais quand l’entourage du président a demandé à Amanpour de porter le voile, le hijab, elle a refusé. L’entrevue a été annulée.

L’image de Christiane Amanpour, les cheveux détachés, assise devant une chaise vide, est un immense doigt d’honneur au régime patriarcal de l’Iran. 

Bravo ! Ça fait tellement de bien de voir une femme occidentale se tenir debout devant les leaders religieux.

  • Écoutez l'édito de Sophie Durocher diffusé chaque jour en direct 14 h 35 via QUB radio :

NOUS SOMMES MAHSA

Depuis que la police de la moralité a arrêté une jeune femme de 22 ans, Mahsa Amini, en Iran, parce qu’elle ne portait pas son voile comme il faut, et depuis qu’Amini est morte en prison, l’Iran se soulève. 

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Partout au pays, des femmes courageuses enlèvent leur voile, le brûlent et défient les autorités.

Une image plus que toute autre symbolise cette révolte. On voit une femme tenant d’une main son voile qui brûle et de l’autre, une pierre qu’elle s’apprête à lancer contre ses oppresseurs.

Quel courage ! Pour moi, cette image est aussi forte, aussi symbolique que celle du jeune Chinois tenant tête aux tanks, place Tiananmen en 1989.

Un individu, seul devant l’oppresseur, qui se tient debout avec pour seule défense sa détermination et son courage.

Vous savez ce qu’Amanpour a répondu au collaborateur du président iranien qui lui demandait de porter le voile ? 

« Nous sommes à New York, où il n’existe aucune loi ou tradition concernant le port du foulard. J’ai fait remarquer qu’aucun président iranien précédent ne l’avait exigé lorsque je l’avais interviewé en dehors de l’Iran ». 

À Rome, on fait comme les Romains.

Les femmes journalistes se voilent quand elles couvrent l’actualité dans les pays où le port du hijab (ou de la burqa) est obligatoire. Mais rien ne les oblige à le faire quand elles sont dans un pays libre. 

Si Amanpour avait accepté de se voiler, vous imaginez le message que cela aurait envoyé aux femmes courageuses qui se battent en ce moment en Iran ? 

Si tu es à Téhéran et que tu risques ta vie en brûlant ton voile, comment aurais-tu pu accepter qu’une femme le porte... devant le chef d’un régime qui a tué Mahsa Amini ?

  • Écoutez la rencontre Durocher - Dutrizac diffusée chaque jour en direct 12 h 40 via QUB radio :

Amanpour est elle-même d’origine britannique et iranienne. Il est sûr et certain que les autorités auraient été trop heureuses d’exhiber son image de femme voilée sur tous les écrans iraniens. 

Il est sûr et certain que le message envoyé aux femmes iraniennes aurait été : « Pourquoi refusez-vous le voile ici alors que cette gentille journaliste à des kilomètres d’ici a accepté docilement de le porter ? Si elle le fait, vous le pouvez aussi. »

Amanpour a tracé une limite claire devant un leader religieux. « Tu ne peux pas nous donner d’ordre, aux femmes libres d’Occident. » 

Le geste d’Amanpour n’est pas juste un réflexe d’indépendance journalistique. 

C’est un signe concret de solidarité avec les femmes iraniennes.  

On n’en attend pas moins de la part des féministes québécoises.

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