Un jugement majeur contre le racisme systémique

Thomas Mulcair
Pendant la campagne électorale, François Legault s’est dit peiné de s’être fait traiter de raciste.
Même si on ne retrouve pas de trace dans les médias principaux d’un tel adjectif ayant été utilisé pour décrire notre premier ministre, on comprend son désarroi après les propos véritablement racistes prononcés par son ex-ministre de l’Immigration.
Oui, les propos de Legault mélangeant immigrants, violence et extrémisme traduisaient une ignorance, mais ils n’étaient pas nécessairement racistes.
Pour affirmer que des propos sont racistes, ceux-ci doivent aller au-delà des préjugés.
En revanche, les propos faux et blessants de l’ex-ministre de l’Immigration Jean Boulet, qui avait dépeint la vaste majorité des immigrants comme des gens qui ne travaillent pas, qui ne parlent pas le français ou qui ne partagent pas nos valeurs, peuvent être qualifiés de racistes.
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Une décision majeure sur le profilage
Plus tôt cette semaine, le juge Michel Yergeau de la Cour supérieure a rendu une décision majeure au sujet du profilage racial.
Dans son jugement, il explique en détail la réalité d’un jeune homme noir avec une feuille de route sans taches, qui s’est fait arrêter à répétition par la police, pour rien.
Pour démontrer le sérieux de la situation, le juge Yergeau a rappelé l’expression américaine, «driving while Black».
C’est une boutade sur un sujet des plus sérieux qui emprunte une vraie expression juridique «driving while intoxicated» – qui signifie «conduire en état d’ivresse» – pour la tourner en dérision et en faire «conduire en état de peau noire».
Le profilage racial, c’est la triste réalité de trop de jeunes Noirs, ici, au Québec, en 2022 et le juge Yergeau était déterminé à y mettre fin.
C’est tout à son honneur.
Un jugement nuancé
Le juge savait qu’il s’attaquait à un gros morceau.
Il est admis par la Cour suprême du Canada depuis une trentaine d’années que la police peut décider, de manière aléatoire, d’arrêter tout conducteur à des fins de vérification.
Selon cette vision des choses, conduire est un privilège et pas un droit, donc on peut vérifier le permis de conduire, le certificat d'immatriculation, etc. Soit.
Mais ce que le juge Yergeau démontre clairement, c’est qu’il n’y a absolument rien d’aléatoire dans le choix des voitures que la police arrête.
Beaucoup plus souvent qu’à leur tour, ce sont les hommes noirs qui vont se faire intercepter et interpeller parce qu’ils sont noirs.
Vous êtes jeune et noir? Vous avez un bon boulot et vous vous êtes payé un beau bolide? Vous allez vous faire arrêter, à répétition, sans le moindre motif valable.
Mais rassurez-vous, ce sera illégal dans six mois lorsque le jugement Yergeau prendra effet et c’est une très bonne chose.
Legault, le pied dans la bouche
Or, qu'est-ce que notre vaillant premier ministre a dit à la suite du jugement Yergeau?
«Il faut comprendre qu’il faut laisser les policiers faire leur travail, quand on voit la violence qu’il y a à Montréal dans certains quartiers»...
Pourtant, le jugement est clair, toutes les règles de la Common Law qui permettent à la police de faire leur travail vont continuer de s’appliquer.
C’est le profilage raciste qui sera interdit.
Si François Legault ne souhaite pas être traité de raciste, il faudrait qu’il arrête de défendre le racisme.