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L'article provient de Le Journal de Montréal
Opinions

Un homme d’honneur

Guy Lafleur saluant la foule lors de sa tournée d’adieu le 5 décembre 2010 au Centre Bell.
Guy Lafleur saluant la foule lors de sa tournée d’adieu le 5 décembre 2010 au Centre Bell. Photo d’archives, Martin Chevalier
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Photo portrait de Jean-Charles Lajoie

Jean-Charles Lajoie

2022-04-23T09:00:00Z
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Outre les obligations scolaires, L’ombre et la lumière est le premier livre que j’ai lu au cours de ma vie. Mes doigts me retardaient, pas assez rapides à tourner les pages que je dévorais. La plume de Georges-Hébert Germain y était à son mieux. 

J’ai rencontré Guy Lafleur au mieux, s’en doutait-il. Il était dans le meuble télévisuel à lampes de grand-maman Flore. J’avais 5 ans, j’étais ébloui par autant de vitesse et de beauté. Le Démon blond, regard franc et conquérant, cheveux hirsutes. Cette décampe à l’aile, « le long de la clôture » dixit Gilles Tremblay. Puis la dégaine. Le tir puissant et précis. Le but. La respiration profonde de Guy Guy Guy, de retour au banc. Puis son sourire. Puis le but... encore et encore... le but.

Heureux dans un vestiaire

À l’aréna Grondin de Granby, match des Anciens. Trois heures avant le match, Guy était déjà dans le vestiaire en combinaison. Détendu et heureux. Pour Guy, un casier de vestiaire, c’était un Lay-Z-Boy. Il y était comme dans son salon. Ce jour-là encore, il a survolé la glace. Deux bonnes heures après le match, Guy était toujours dans le vestiaire. Il signait avec soin son nom et son célèbre numéro 10. Il n’avait pas d’heure. Il était heureux et bien. 

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Ce que Guy Lafleur a fait dans le cœur des gens ne s’explique pas. Il est l’une des trois étoiles de la riche histoire du CH. La dernière à rejoindre le ciel après Maurice et Monsieur Béliveau. La marque de neuf saisons de 50 buts ou mieux de Mike Bossy, Wayne Gretzky et Alex Ovechkin eut très bien pu être celle de Guy. Hélas, il a dû subir le purgatoire imposé par Sam Pollock et Scotty Bowman pendant trois longues saisons. Je ne m’explique toujours pas pourquoi son joueur de centre et prétendu ami Jacques Lemaire l’a cloué au banc au début des années 1980.

Un homme libre est parti

Si l’on comprend que le vestiaire était la maison principale de Guy, on comprend qu’il était plus que l’ultime coéquipier. Il était un frère parmi ses frères. Le Canadien, c’était sa famille, toute sa vie. Un des derniers hommes libres vient de partir. Un homme bon et dévoué. Investi à faire le bien autant qu’à dire vrai. Toujours. Les notables n’aiment pas beaucoup ces hommes d’honneur authentiques. Heureusement, ils ne peuvent rien contre le cœur qui bat en chacun des simples mortels. Ça a permis au monde ordinaire d’aimer l’imparfait Guy Lafleur d’un amour aussi profond qu’inconditionnel.

Guy LafleurGuy Lafleur | 1951-2022
30 mars 1991 - Ovation pour Guy Lafleur lors de son dernier match a vie au Forum dans l'uniforme des Nordiques. Les archives / Le Journal de Montreal
Guy Lafleur durant ses années avec Le Canadien Bruce Bennett Studios via Getty Images
Guy Lafleur André Toto Gingras LE JOURNAL DE MONTRÉAL/AGENCE QMI
Le club de hockey Canadien présente les récipiendaires des prix d’excellence et du mérite Guy-Lafleur pour 2017-2018 CHANTAL POIRIER / LE JOURNAL DE MONTRÉAL
Guy Lafleur lors du dernier match de sa tournée d'adieu au Centre Bell, le dimanche 5 décembre 2010. Sébastien St-Jean / 24Heures / Agence QMI
11 septembre 1971 - À la veille de son premier camp d'entrainement avec le Canadien de Montréal, pour la première fois Guy Lafleur en profite pour donner quelques coups de patin sur la patinoire du Forum. Sur la photo il est en compagnie de Jean Béliveau. Les archives / Le Journal de Montreal
Photo dédicacée de Guy Lafleur dans son uniforme des Remparts de Québec Courtoisie
Guy Lafleur dans le cadre de la soirée du retrait du numéro 4 de Guy Lafleur au Centre Slush Puppie de Gatineau le mercredi 29 septembre 2021 MARTIN CHEVALIER / LE JOURNAL DE MONTRÉAL
Guy Lafleur et sa bannière dans le cadre de la soirée du retrait du numéro 4 de Guy Lafleur au Centre Slush Puppie de Gatineau le mercredi 29 septembre 2021 MARTIN CHEVALIER / LE JOURNAL DE MONTRÉAL
Dernier match de Guy Lafleur avec les Nordiques de Québec, à Montréal le 30 mars 1991 Les archives / Le Journal de Montreal
Sculpture de Guy Lafleur en bronze Les archives / Le Journal de Montreal
Guy Lafleur, Pee-Wee Collection Tournoi Pee-Wee de Québec, Fonds Photo Moderne
Guy Lafleur, Pee-Wee Collection Tournoi Pee-Wee de Québec, Fonds Photo Moderne
Guy Lafleur et les trophée Art Ross, Conn Smythe et Lester B. Pearson, Forum de Montréal, 1976 Denis Brodeur / NHLI via Getty Images
Guy Lafleur, alors membre de Team Canada, signe des autographes durant un entraînement pour la Coupe Canada, Montréal 1976 Denis Brodeur / NHLI via Getty Images
Guy Lafleur et le gardien de but Murray Bannerman #30 des Blackhawks de Chicago, Forum de Montréal 1980 Denis Brodeur / NHLI via Getty Images
Guy Lafleur et le gardien Mike Palmateer des Maple Leafs de Toronto Dick Darrell / Toronto Star via Getty Images
7 mars 1975 - Guy Lafleur devient le premier joueur de toute l'histoire du club Canadiens à atteindre les 100 points en une seule saison Lors d'une victoire de 8 à 4 contre les Capitals de Washington Les archives / Le Journal de Montreal
Guy Lafleur sur le banc durant un match (3) de finale contre les Bruins de Boston, Boston Gardens, 1977 Dick Raphael / Sports Illustrated via Getty Images
Annonce de la première retraite de Guy Lafleur Les Archives / Le Journal de Montréal
La LHJMQ retire le numéro 4 de Guy Lafleur au Centre Videotron de Québec, jeudi le 28 octobre 2021 STEVENS LEBLANC / JOURNAL DE QUÉBEC / AGENCE QMI

Paraît qu’il faut profiter puisque ça passe trop vite. Comme la Ferrari dans laquelle Guy est monté au cœur de la nuit en sortant du Thursday’s après une soirée arrosée. Guy était assis côté passager. Son chum Gilles Villeneuve conduisait. L’autre idole de tout un peuple voulait étaler la vitesse de sa nouvelle monture. Gilles savait que la nuit, les feux de circulation étaient synchronisés. Il a traversé le boulevard Dorchester sur la même verte. Les deux « mohicans » ont filé d’ouest en est, de Dorchester vers ce qui est devenu René-Lévesque. De ce qu’ils n’ont jamais voulu être vers ce qu’ils ont toujours été. Des extraordinaires hommes ordinaires.

J’estime que nous, vivants, ne faisons plus le poids. Le club du Bon Dieu est désormais bien meilleur. Guy peut enfin se reposer. Je suis certain qu’il le fera en paix. Ça ne peut pas être autrement lorsqu’il s’agit de l’idole de toutes les idoles. Lorsqu’il s’agit d’un immortel. Salut Guy, merci pour tout. Ton gin est dans mon congélateur, comme tu me l’as conseillé. Il va être doux à ma gorge et à mon cœur meurtri ce soir. 

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