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L'article provient de Le Journal de Montréal
Société

Un HLM pour aînés en panne pendant 5 jours à Montréal: «si on est priorisés, ça ne paraît pas pantoute!»

«On a juste notre pension pour vivre, donc on ne peut pas faire ça ben, ben longtemps.»

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Photo portrait de Olivier Faucher

Olivier Faucher

2023-04-10T18:38:31Z
2023-04-11T01:32:44Z
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Des résidents aînés et vulnérables d’un HLM de Mercier–Hochelaga-Maisonneuve privés d'électricité pendant 5 jours estiment ne pas avoir été priorisés par Hydro-Québec.

Cette clientèle pauvre, âgée et parfois handicapée s’est retrouvée complètement prise au dépourvu en plein cœur de Montréal.

• À lire aussi: Verglas: moins de 35 000 clients d’Hydro-Québec à rebrancher

«Ça a été trop long, franchement. Les premiers, ça [aurait dû] être nous autres, les personnes âgées!» dénonce Danielle De Courcy, qui réside au HLM Adélard-Langevin avec son mari privé de l'usage de ses jambes.

Vers 21 h hier, son immeuble de 69 logements a finalement été parmi les derniers abonnés du quartier à retrouver l’électricité, après la tempête de verglas de mercredi dernier. 

Au passage du Journal, cet avant-midi, plusieurs résidents patientaient près de l’entrée principale et de la salle communautaire en observant entre autres les camions d’Hydro-Québec stationnés devant l’immeuble d’habitation.

«C’est la misère!» s’est exclamé le résident Jean-Paul Ménard, 89 ans. Je me promène avec un foulard et des bas de laine dans les pieds pour ne pas attraper la grippe.»

Rencontré dans son appartement assombri par la panne qui perdure depuis jeudi dans le HLM Adélard-Langevin, le résident Jean-Paul Ménard pose ici devant les quelques aliments qu'il lui reste à manger.
Rencontré dans son appartement assombri par la panne qui perdure depuis jeudi dans le HLM Adélard-Langevin, le résident Jean-Paul Ménard pose ici devant les quelques aliments qu'il lui reste à manger. Photo Olivier Faucher

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Une priorité?

Il y a quelques jours, Hydro-Québec avait annoncé que les CHSLD, les résidences pour aînés et les hôpitaux seraient rebranchés en priorité. Les HLM habités aussi par une clientèle âgée et démunie faisaient-ils aussi partie de ces priorités?

«En ce qui concerne le rétablissement des HLM, [nous] rétablissons un HLM après une RPA, par exemple, mais avant un secteur résidentiel», a expliqué Francis Labbé, porte-parole d'Hydro-Québec.

«Dans le cas présent, il s’agit d’une panne qui touche un réseau souterrain; un conduit se serait affaissé, ce qui est une tâche majeure à accomplir», a indiqué M. Labbé. Une génératrice a finalement été installée en soirée, hier, le temps d’effectuer les travaux. 

Pierre Lessard-Blais, maire de Mercier–Hochelaga-Maisonneuve, a refusé notre demande d’entrevue. «L’arrondissement suit la situation de près et offre sa pleine collaboration à Hydro-Québec et à l’OMHM», a déclaré le porte-parole de l’arrondissement Vincent Fortin.

Quant à l’Office municipal d’habitation de Montréal (OMHM), il nous a été impossible de parler à un représentant.

Monique Bélisle, présidente du comité des résidents du HLM, ne cachait pas sa colère hier en avant-midi au sujet des délais qui s’éternisaient pour rebrancher ses voisins.

«Si on est priorisés, ça ne paraît pas pantoute! peste-t-elle. Je trouve que ça dure trop longtemps.»

Monique Bélisle, présidente du comité des résidents du HLM, en train de manger de la pizza apportée par des citoyens venant en aide au HLM.
Monique Bélisle, présidente du comité des résidents du HLM, en train de manger de la pizza apportée par des citoyens venant en aide au HLM. Photo Olivier Faucher

Mme Bélisle croit que la vulnérabilité des dizaines de résidents du HLM n’a pas été prise suffisamment au sérieux.

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«Il y a beaucoup de gens qui sont malades et à mobilité réduite ici», souligne-t-elle, en insistant également sur leur situation financière précaire.

«Ça va me coûter 400$»

«On a dû commander du resto et jeter la nourriture dans notre frigo. Nous, on a juste notre pension pour vivre donc on ne peut pas faire ça ben, ben longtemps.»

«Ça va me coûter à peu près 400$. Y as-tu quelqu’un qui va nous aider à payer?» demande Mme Bélisle.

En faisant visiter son logement assombri par la panne, Jean-Paul Ménard montre ce qu’il a à manger: quelques boîtes de conserve, une pizza froide et des coupes de fruits. 

«J’ai mangé des cochonneries, dit-il en montrant une canne de pâtes aux tomates. J’ai mangé la canne sans la faire chauffer.»

«Pris à la gorge» par le prix des aliments, il se demande comment il pourra encaisser la perte de tout ce qu’il a jeté dans son frigo. «Le montant que j’ai par mois, c’est juste pour payer mon loyer et mes affaires et c’est tout. Je ne peux rien faire d’autre.»

Des citoyens à la rescousse

Les résidents ont heureusement pu compter sur la générosité de plusieurs citoyens qui sont venus leur porter de la nourriture, du café, en plus d’offrir aux résidents de faire des brassées de linge chez eux.

Le citoyen bon samaritain Claude Ducharme sert au résident Jean-Paul Ménard de la pizza apportée par des citoyens venant en aide au HLM.
Le citoyen bon samaritain Claude Ducharme sert au résident Jean-Paul Ménard de la pizza apportée par des citoyens venant en aide au HLM. Photo Olivier Faucher

Parmi eux, Claude Ducharme s’étonne du peu d’aide offert par l’arrondissement et l’Office municipal d’habitation de Montréal.

«Pourquoi c’est moi qui prends la bâtisse sous ma tutelle? demande-t-il. Il y a un manque quelque part. Il aurait fallu que ce soit pris plus sérieux comme situation.»

Selon lui, l’aide offerte par l’arrondissement obligeait les résidents à se déplacer vers une des haltes-chaleur, alors que plusieurs ont des problèmes de mobilité ou refusaient d'abandonner leur animal de compagnie dans le froid.

Pour Jean-Paul Ménard, pas question de laisser seules ses deux perruches, qu’il a tant bien que mal tenté de réchauffer depuis jeudi. «C’est la seule chose que j’ai depuis que ma femme est morte en 2020», souffle-t-il.

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