Publicité
L'article provient de 24 heures

Un documentaire pour déconstruire les mythes entourant la femme noire

Photomontage Marilyne Houde
Partager
Photo portrait de Anne-Lovely Etienne

Anne-Lovely Etienne

2022-11-25T22:26:51Z
Partager

BILLET - Mardi soir. Salle comble. C’est la projection du documentaire Le mythe de la femme noire, qui traite de l'image des femmes noires que véhiculent les médias et la société, une image construite autour de préjugés qui remontent à très loin dans l’histoire. Dans le documentaire, 21 femmes noires ont pris la parole. J’en suis sortie, comment vous dire... bouleversée.

Tellement de questions ont envahi mon esprit. J’ai décroché le téléphone et... qui de mieux contacter que la comédienne et réalisatrice du film, Ayana O’Shun, pour répondre à mes interrogations.

Pourquoi avoir voulu réaliser un long métrage sur l’image de la femme noire?

C’est venu parce que je suis comédienne également dans la vie et que lorsqu’on me demandait d’auditionner, c’était souvent pour jouer des stéréotypes. Je me devais de comprendre pourquoi et j’ai commencé mes recherches.

Plus je lisais et je remontais dans le temps, plus je réalisais que les stéréotypes qui existent depuis le 17e siècle, on les retrouve encore aujourd’hui. Je n’en revenais pas! Ils sont présents dans les œuvres d’art, la littérature ou encore le cinéma.

Publicité

Quels sont donc les stéréotypes qui sont rattachés à la femme noire?

Il y a la Jézabel, soit la femme noire hyper sexualisée: c’est la maîtresse des colons blancs ou une prostituée. Dans le documentaire, il y a cette actrice qui raconte son expérience et c’est assez choquant: on l’a souvent interpellée dans les hôtels, croyant qu’elle cherchait des clients comme prostituée, et pourtant elle y était pour se reposer, après ses journées de tournage.

Il y a ensuite la nounou ou la mamie: c’est celle qui prend soin de tout le monde. On la voit au cinéma comme l’amie qui est là pour écouter sa meilleure amie blanche qui parle de ses problèmes, ou encore l’infirmière...

Finalement, il y a la femme noire en colère: c’est la femme hystérique, qui n’est jamais contente de rien. Et c’est dangereux, parce qu’on invalide ce qu’elle essaie d’exprimer.

Quel est le pire rôle stéréotypé que l’on t’a proposé comme comédienne?

Dernièrement, on m’a offert le rôle d’une mère d’un membre d’un gang de rue. Cela renvoie au stéréotype de nounou/mamie, soit la femme monoparentale qui s’occupe d’un fils délinquant qui n’a jamais eu de père... J’ai finalement refusé le rôle. Dans les médias, on voit peu de femmes noires qui vivent leurs vies, simplement. Il s’agit toujours de rôles qui renforcent l’image stéréotypée et c’est problématique. Il ne faut pas mettre toutes les femmes noires dans le même bateau! 

Est-ce un film qui fait écho au mouvement Black Lives Matter?

C’est effectivement important, le Black Lives Matter, mais lorsqu’on parle de ce combat et de racisme, ce sont les hommes noirs qui sont mis de l’avant. 

Publicité

Et lorsqu’on parle de combat des femmes et de féminisme, ce sont beaucoup les femmes blanches qui sont mises de l’avant. 

Qu’en est-il des femmes noires? Elles sont invisibles d’un côté comme de l’autre et avec ce film, c’est une manière de leur donner la parole pour qu’elles soient vues et entendues. 

Étant toi-même une femme noire, qu’est-ce qui t’a le plus surprise en réalisant ce film?

Toute la question autour de la santé mentale. Les femmes interrogées m’ont toutes parlé de cette pression de réussir et que c’est deux fois plus difficile quand on est femme et quand on est noire. Le stress est parfois si grand qu’il y a beaucoup de femmes qui souffrent en silence et chez les Noirs, c’est encore très tabou. La dépression est vue comme une «maladie de Blanc».

Quel message veux-tu porter à travers ce film?

Il faut continuer à se battre! Quand je pense à Rosa Park... Sa manière tranquille et silencieuse a changé le cours de l’histoire aux États-Unis... Alors, ensemble, à force de parler et d’avoir une voix, on arrivera à changer les choses. 

Est-ce un film qui s’adresse à tout le monde?

Ah oui! Il y a des hommes blancs qui sont venus me voir après le film et qui m’ont confié avoir appris tellement de choses, soit par rapport aux cheveux, au colorisme, aux enjeux... En fait, ça touche tout le monde concerné par ce genre de sujet social.


Dans le cadre du festival des RIDM, le documentaire Le mythe de la femme noire sera présenté le 25 novembre 2022 au Cinéma Quartier Latin à 17h45 (salle 10). 

Dans le cadre du Mois de l’histoire des Noirs, le documentaire Le mythe de la femme noire sera à l’affiche, à partir du 10 février 2023, dans plusieurs salles de cinéma au Québec.

Pour plus d’informations:

https://www.instagram.com/mythedelafemmenoire/ 

https://www.facebook.com/mythefemmenoire 

Publicité
Publicité