Toute une surprise attend les jeunes du CH
Michel Therrien
Les Canadiens sont tombés en plein dans le piège, mardi soir. Cette rencontre contre les Sharks faisait partie des «matchs pièges» qui composent une saison, comme ceux au retour d’un voyage sur la route.
Ceux-là sont toujours plus difficiles mentalement, je peux en témoigner. On dit souvent que le sport est mental. On en a eu une autre preuve contre les Sharks.
Les joueurs étaient pourtant conscients du danger qui les guettait en affrontant une équipe qui a toujours connu du succès à Montréal. C’est aussi plus dur de se motiver lorsqu’il n’y a aucune rivalité. De plus, les Sharks forment une équipe moyenne. Bref, tous les ingrédients y étaient pour offrir une contre-performance. C’était évident en regardant le match que la concentration n’était pas maximale et qu’il n’y avait aucune émotion ou intensité sur la glace.
Les joueurs avaient visiblement déjà en tête le traditionnel périple dans l’Ouest canadien. Certains avaient même commencé à préparer leurs valises en vue de ce séjour de plusieurs jours qui arrive vite. Dès jeudi, ils seront à Calgary.
Le trajet vers l’Alberta aurait été bien plus agréable avec une victoire. Les joueurs le savaient très bien. Je suis convaincu que les entraîneurs leur avaient passé clairement le message et les avaient préparés en conséquence.
Avant même le début de la saison, Martin St-Louis, comme tous les «coachs» de la LNH, avait identifié six ou sept «matchs pièges» en analysant le calendrier. Il l’avait vu venir d’avance que celui contre les Sharks serait ardu.
Tout le monde était bien au courant du piège à éviter, mais la nature humaine a eu le dessus sur les bonnes intentions. C’est comme lorsque tu dis à un enfant de ne pas toucher le rond du poêle pour ne pas qu’il se brûle : il va essayer quand même, c’est plus fort que lui. Pour une raison que j’ignore, tout le monde est tombé dans le panneau!
Un mal nécessaire
Certains commentateurs ont souligné que la tenue du fameux souper des recrues le week-end dernier à Chicago n’a pas aidé la cause du CH face aux Sharks.
Personnellement, je trouve que le «timing» était bon puisque les joueurs ont eu plusieurs jours par la suite pour récupérer. Je ne pense pas que ce party a été un facteur dans la défaite.
Le souper des recrues, c’est un mal nécessaire dans une saison. Tous les clubs en organisent un.
Lorsque je dirigeais, je demandais toujours à mes vétérans de garder un œil sur les autres pour ne pas que ça dérape. Le bon déroulement est souvent lié à la qualité de tes joueurs d’expérience.
Heureusement pour eux, ils étaient quatre recrues cette année à se séparer la facture : Kaiden Guhle, Jordan Harris, Arber Xhekaj et Juraj Slafkovsky.
Ça m’est déjà arrivé d’avoir une seule recrue dans mon équipe. Dans ce cas-là, je fixais un montant maximal à payer pour éviter d’exagérer avec les bouteilles de vin à des prix qui n’ont pas d’allure.
L’équipe de tout un pays
Si la foule était tranquille au Centre Bell plus tôt cette semaine, ce sera tout le contraire dans les trois prochains matchs, contre les Flames, les Oilers et les Canucks.
L’atmosphère est toujours extraordinaire à Calgary, à Edmonton et à Vancouver. Ce genre de voyage est unique. L’ambiance est survoltée dès la période d’échauffement. Ça procure beaucoup d’énergie aux joueurs. Pour les jeunes, ça leur permet de découvrir l’importance du Tricolore à travers tout le pays.
Je me rappelle ma première fois. Je savais bien sûr que l’équipe était immensément populaire au Québec, mais je ne pensais pas qu’elle l’était aussi à ce point dans l’Ouest canadien. J’en ai réalisé l’ampleur dès mon arrivée. Tu te croirais presqu’à la maison avec tous ces chandails du CH. Ça m’avait beaucoup marqué.
C’est impressionnant de voir un tel engouement. Guy Carbonneau, qui était mon adjoint à l’époque, m’avait averti que ce serait spécial. Et il avait bien raison. J’ai savouré pleinement cette première expérience. Je vais m’en souvenir pour le reste de ma vie.
C’est phénoménal de sentir le grand attachement de tous les Canadiens pour... les Canadiens. Tu te rends compte que c’est l’équipe du pays en entier. Cet amour ne date pas d’hier, le Bleu-Blanc-Rouge est mythique depuis longtemps. Après tout, c’est l’une des six équipes originales.
Grâce à ces circonstances particulières, ces visites annuelles en Alberta et en Colombie-Britannique en décembre ressemblent un peu à des matchs de séries éliminatoires.
Avec une telle frénésie, c’est impossible pour les deux équipes de ne pas être motivées. De leur côté, les Canadiens ne veulent pas décevoir leurs nombreux partisans qui se sont déplacés pour les voir jouer, tandis que l’équipe locale a sa fierté à défendre dans son propre amphithéâtre.
Ça donne toujours lieu à des matchs excitants. Espérons que ce sera encore le cas cette année.