Situation «dramatique» dans nos écoles: deux fois plus de profs ont démissionné depuis quatre ans

Le nombre d’enseignants qui ont démissionné a doublé en quatre ans, a appris Le Journal. Depuis la rentrée seulement, ce bilan grimpe à près de 800 enseignants alors que la pénurie de profs est criante dans les écoles publiques québécoises.  

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Au total, depuis cinq ans, au moins 6200 enseignants ont pris la même décision. 

«C’est dramatique», lance Carl Ouellet, président de l’Association québécoise du personnel de direction des écoles.

Geneviève Sirois, professeure en administration scolaire à la TÉLUQ, juge aussi la situation inquiétante. «C’est fou, il se passe vraiment quelque chose», dit-elle.

Ces données ont été obtenues à la suite d’une demande d’accès à l’information effectuée par Le Journal au début novembre dans les 72 centres de services scolaires.

Il s’agit d’un portrait partiel, puisqu’une quarantaine d’organisations ont répondu à notre demande. Le ministère de l'Éducation ne détient pas ces informations. Ces chiffres, qui excluent les départs à la retraite, peuvent inclure des enseignants réguliers et contractuels, y compris des profs non qualifiés, ont précisé certains centres de services scolaires.

La grande majorité d’entre eux ignorent toutefois les raisons qui ont mené à ces départs. Tous les enseignants qui ont démissionné n’ont pas forcément quitté l’enseignement, puisque certains peuvent avoir remis leur démission pour aller travailler dans un autre centre de services ou au privé, précise-t-on.

Seul deux centres de services, les Découvreurs à Québec et Marguerite-Bourgeoys à Montréal, affirment que leurs enseignants ont démissionné principalement pour aller travailler dans un autre centre de services scolaire «en raison de la disponibilité des contrats» et «pour se rapprocher de leur domicile», ou encore pour des raisons familiales ou personnelles.

Conditions de travail difficiles

Mais pour Geneviève Sirois, il est clair qu’une augmentation si importante en quatre ans seulement ne peut être attribuable uniquement à des déménagements, à un changement d’employeur ou encore à la hausse du nombre d’enseignants dans le réseau scolaire.

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«Le phénomène est directement relié à l’alourdissement de la tâche et aux conditions de travail», qui sont au cœur des négociations avec Québec présentement, affirme-t-elle.

C’est d’ailleurs ce qui a poussé Edith Lamoureux à rendre les armes, après 17 ans d’enseignement au secondaire.

Le son de cloche est semblable du côté des directions d’école. «Il faut savoir pourquoi ils quittent, mais on leur en demande beaucoup. Avec la pénurie, ils doivent en plus faire de la suppléance pour remplacer les collègues absents», affirme M. Ouellet.

Freiner l’exode

Les négociations en cours avec les enseignants sont cruciales si on veut retenir davantage d’enseignants, ajoute M^me Sirois.

«Si on ne vient pas jouer minimalement sur les conditions de travail, on ne sera pas capable de freiner» l’exode, dit-elle.

Le gouvernement Legault devrait d’ailleurs travailler davantage à «retenir» les enseignants déjà formés, plutôt qu’à ouvrir la porte à des formations plus courtes pour «faire entrer plus de profs dans le système», ajoute-t-elle, surtout dans le contexte actuel. 

«Avec toutes les opportunités d’emplois présentement, il y a des choix qui se font», laisse-t-elle tomber.

Nombre d’enseignants qui ont démissionné*

• 2019-2020: 891
• 2020-2021: 1159
• 2021-2022: 1591
• 2022-2023: 1795
• 2023-2024: 785 (d’août à novembre 2023)

*Ces chiffres excluent les départs à la retraite. Ce portrait est partiel puisqu’il provient de 41 des 72 centres de services scolaires. Le ministère de l’Éducation ne compile pas de données à ce sujet.