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L'article provient de Le Journal de Montréal
Opinions

Sexto et porno sont issus de la même culture dégradante

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Photo portrait de Josée Legault

Josée Legault

12 juillet 2023
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Le monde ne va pas bien... Combien de fois on entend cette phrase autour de nous? Pour l’expliquer, la pandémie a cependant le dos un brin trop large.  

L’isolement social dû aux confinements et la peur fondée d’un virus meurtrier ont multiplié les problèmes sérieux de santé mentale. C’est vrai. Les listes d’attente en psychologie et psychiatrie n’explosent pas pour rien. 

D’autres phénomènes sociaux inquiétants datent toutefois de bien avant la COVID-19. Incluant notre dépendance croissante aux écrans et particulièrement les téléphones dits intelligents. 

Jusque dans les écoles, cette dépendance sert aussi de plus en plus à nourrir l’industrie mondiale du porno et son rejeton de la même eau: les sextos.  

Données à l’appui, Le Journal rapportait mardi que «des centaines d’accusations en matière de pornographie juvénile sont déposées chaque année contre des mineurs qui produisent ou partagent du contenu explicite sans le consentement de leur partenaire, et ce, de plus en plus souvent dès le primaire». 

Ouf. Dès le primaire... Depuis 2018, «plus de 300 chefs d’accusation de possession, de distribution ou de production de pornographie juvénile ont été déposés en moyenne chaque année en Chambre de la jeunesse». Et ce ne serait qu’une toute petite pointe de l’iceberg. 

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Absence de conscience

Selon Me Louis-David Bénard, procureur au Bureau des affaires de la jeunesse du Directeur des poursuites criminelles et pénales, «ils se retrouvent avec des appareils électroniques qui sont ultraperformants. Puis, ils ne se rendent pas compte nécessairement qu’en envoyant des photos, ils vont commettre deux, trois infractions criminelles». 

Soit. Plus troublante encore est toutefois l’absence de conscience du mal réel, pour ne pas dire des traumatismes, que peut causer une telle «pratique» à ses victimes. La plupart du temps, de jeunes filles.  

On voit ici une incapacité montante à comprendre le mal que peut faire à une autre personne l’envoi de sexto. 

Il n’y a pas d’explication simple à un tel détachement des sentiments des autres lorsqu’il existe. Le fléau des textos est sûrement en partie le reflet d’une atomisation croissante des sociétés occidentales.  

Un des effets les plus toxiques de cette atomisation étant de rendre indifférent aux souffrances et aux besoins des autres. Appelons ça de l’hyper-individualisme. 

Banalisation de la violence

Le fléau des sextos est aussi le sous-produit de l’industrie mondiale du porno, qu’il soit juvénile ou adulte. L’internet et les téléphones intelligents ont même permis la banalisation du porno dès le jeune âge.   

Ce faisant, ils ont normalisé sa consommation régulière. Or, pour les filles et les femmes, les contenus du porno se font de plus en plus dégradants et violents. Elles y sont privées de leur propre humanité.  

La violence sous-jacente à la pratique du sexto reproduit en fait ces mêmes codes. Les images sexualisées de filles souvent prises à leur insu servent uniquement comme des objets de plaisir ou de vengeance contre elles. 

Le nœud du problème n’est-il pas là? N’est-il pas dans l’absence de respect le plus élémentaire pour les filles et les femmes dont toutes ces pratiques témoignent? Malgré même les avancées du féminisme et le mouvement #moiaussi. 

On ne s’en sort pas. Il est urgent d’offrir plus d’éducation dans nos écoles au respect des filles, y compris par et pour elles-mêmes, et à des rapports amoureux plus égalitaires.  

Bref, il faut un contrepoids sérieux aux ravages du porno et des sextos. Là-dessus, je persiste et signe depuis bien avant la pandémie... 

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