Serge Boutin enterré vivant: les deux présumés meurtriers seraient retournés sur les lieux du crime
Guillaume Cotnoir-Lacroix
Charles Lassonde et son ex-conjointe Lana Dubois seraient retournés à l’endroit où ils venaient d’enterrer Serge Boutin, quelques heures auparavant. C’est du moins ce qu’a affirmé Mme Dubois, qui a poursuivi son témoignage mercredi, dans le cadre de la troisième journée du procès pour meurtre au premier degré de Charles Lassonde, au palais de justice de Sherbrooke.
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La témoin, qui témoigne contre son ex-conjoint après avoir signé une entente de collaboration avec les policiers, a détaillé les heures et les jours qui ont suivi le crime allégué, mercredi matin. Quelques minutes après avoir vraisemblablement enterré la victime vivante, les deux individus se seraient rendus dans une garderie de Victoriaville au petit matin pour y compléter une ronde de ménage, travail qu’occupait Lana Dubois.
«C’est sûr qu’un ménage qui est censé prendre 4h, là, on est deux et on le fait en une heure. C’était vite et "botché"», a expliqué la témoin.
Les deux se seraient ensuite rendus, à la demande de Lana Dubois, au site où ils avaient enterré, quelques heures auparavant, la victime Serge Boutin.
«J’avais espoir – ça va vous sembler idiot peut-être – j’avais espoir qu’il avait pu se pousser de là, qu’il était encore en vie, qu’il avait pu s’échapper. [...] Quand je suis revenu sur les lieux et que j’ai vu que les bois étaient encore placés, j’ai constaté qu’il était mort, qu’il ne s’était pas échappé finalement», a affirmé Lana Dubois, témoin clé de la Couronne.
Les deux se seraient également rendus sur un terrain, d’abord décrit comme un site d’enfouissement par Dubois. Ils ont creusé un autre trou, avec des pelles. Un trou qui devait vraisemblablement servir de menace à Lana Dubois.
«C’est un terrain où les gens peuvent amener des branches. [...] C’est Charles qui a décidé d’aller là. Si j’allais le dénoncer, si j’allais dire où "Bibitte " était, je serais probablement la prochaine», a témoigné Lana Dubois
La veille du meurtre, quelques personnes ont été en contact avec Lassonde et Dubois et étaient au courant de leurs recherches pour retrouver celui qui était surnommé «Bibitte». L’une de ces personnes s’est enquise de son état de santé le lendemain. «C’est là que les mensonges ont commencé», a relaté Dubois.
«Charles m’avait bien préparé à leur dire à eux que [Charles] avait rencontré un gars qui cherchait "Bibitte" pour payer une dette de drogue et qu’ils s’étaient donné un rendez-vous», a mentionné Lana Dubois. Ils auraient aussi relayé cette version à des proches de Serge Boutin, avant leur arrestation.
Arrestation
Lana Dubois a aussi expliqué avoir reçu la visite de «deux armoires à glace», le 31 juillet 2021, soit environ trois semaines après le crime.
«C’étaient des agents d’infiltration pour nous questionner. Ils se faisaient passer pour des gars de Montréal qui cherchaient "Bibitte", a lancé la témoin. Ils ont demandé à Charles d’essayer de joindre ces deux gars de Sherbrooke où on aurait déposé "Bibitte", si on savait où était Serge. On a tenu la même version, qu’on l’avait débarqué à Danville. La même version qu’on avait dite à toutes les autres personnes. Ça venait de Charles», a-t-elle précisé.
Le lendemain, le 1er août, un avis de recherche a été publié sur les ondes de TVA Nouvelles. La disparition de Serge Boutin y est soulignée et deux individus «dans la cinquantaine» sont recherchés par les policiers. Un membre de la famille de Lana Dubois l’appelle pour l’en informer, alors que la description leur correspond.
Ce jour-là, Lassonde aurait entamé des démarches pour parler à un avocat. Dubois aurait parlé à son fils par la suite.
«J’expliquais à mon fils que je n’avais pas l’intention de me cacher, de me sauver et qu’on allait aller au poste de police. Avant ça, on voulait rencontrer un avocat. L’avocat ne pouvait pas nous rencontrer le dimanche, il nous a donné rendez-vous le lundi matin», a-t-elle expliqué.
«Même mon fils me disait: "Maman, rends-toi. Rends-toi. Vous êtes des suspects"», a affirmé Lana Dubois
Dubois et Lassonde ne se sont toutefois pas rendus à cette rencontre avec l’avocat, prévue le lundi. Le jour même de l’avis de recherche, une escouade policière a mené une intervention dans le local d’une entreprise de Victoriaville où les deux étaient en train de faire du ménage et ont procédé à leur arrestation.
«Ils sont descendus dans le sous-sol, je suis sortie du local et j’ai levé les mains pour ne pas résister à l’arrestation», a expliqué Dubois.
La témoin a décidé de collaborer avec les policiers en novembre 2023, alors que son propre procès pour meurtre au premier degré allait commencer incessamment. Elle a plaidé coupable à un chef d’homicide involontaire et a écopé d’une peine d’emprisonnement d’un peu plus de quatre ans. Elle a déjà purgé sa peine. Sa collaboration avait permis de retrouver le corps de la victime, plus de deux ans après l’événement.
Son contre-interrogatoire a débuté mercredi après-midi.