Révolution COVID: Pour le meilleur et pour de bon
Un dossier spécial
Dominique Scali
Nous sommes déjà dans le monde d'après
Dossier
La peste noire au Moyen Âge a transformé l’agriculture. La Première Guerre mondiale a accéléré le développement des avions et des automobiles. Le sida a contribué à normaliser le port du condom. Et la pandémie de Covid-19, quels seront ses legs ? Le Journal a parlé à une cinquantaine d’experts et intervenants d’une panoplie de milieux afin de recenser 43 choses qui ne seront plus comme avant.
« C’est un moment splendide pour recréer un monde du travail à l’image de ce qu’on veut », dit Manon Poirier, directrice de l’Ordre des conseillers en ressources humaines agréés.
Son domaine est en pleine ébullition et pour cause : le télétravail est là pour rester, ce qui aura un effet domino sur la manière d’organiser le boulot, sur l’économie des villes, le marché immobilier en région, la consommation, etc.
En santé, la médecine est en pleine « révolution » technologique.
Dans les aéroports, l’impact à long terme risque d’être aussi grand que celui des attentats du 11 septembre 2001, bien qu’on ignore quelles mesures sanitaires perdureront.
Changements de mœurs
Un changement culturel vis-à-vis du port du masque se profile à l’horizon.
« Ça va peut-être entrer dans les mœurs », espère Laurence Monnais, professeure d’histoire de la santé à l’Université de Montréal.
« Chaque événement qui marque l’imaginaire, chaque catastrophe modifie les comportements, ça, c’est certain », dit Denis Goulet, auteur du livre Brève histoire des épidémies au Québec.
Les grandes épidémies de l’histoire n’ont pas seulement été des drames. Elles ont aussi été des catalyseurs d’innovations. Par exemple, l’invention de l’imprimerie pourrait être un produit indirect de la peste noire et de sa forte mortalité, puisqu’il n’y avait plus assez de gens pour copier à la main, illustre Alain Gagnon, professeur de démographie à l’Université de Montréal.
De plus en plus numérique
Avec la Covid-19, un élément revient constamment dans les boules de cristal : l’accélération vers un monde de plus en plus numérique en raison des confinements.
« C’est comme si la pandémie avait été une grande formation générale de la population sur les habiletés numériques », dit Jean-Philippe Meloche, professeur d’urbanisme à l’Université de Montréal.
Plusieurs experts observent aussi une plus grande préoccupation de l’environnement chez les consommateurs.
« J’ai l’impression que la pandémie a montré que des changements importants étaient possibles à très court terme », dit Christophe Hennebelle, vice-président aux affaires publiques chez Transat.
Reste que tout ce renouveau ne doit pas éclipser une possibilité plus sombre : les grandes crises ont toujours accentué l’écart entre les riches et les pauvres, prévient l’historienne Laurence Monnais.
« Nous sommes à la croisée des chemins. C’est maintenant qu’il faut agir pour faire bouger les décideurs dans la bonne direction », insiste Jason Prince, professeur d’urbanisme à Concordia.