Qui est Robert Pickton, le tueur en série qui s’est fait enfoncer un manche de balai dans le nez en prison?

Anne-Sophie Poiré
Le tueur en série canadien Robert Pickton, qui aurait assassiné 49 femmes entre 1978 et 2001, a succombé à ses blessures après avoir été violemment agressé le 20 mai dernier par son codétenu du pénitencier à sécurité maximale de Port-Cartier, sur la Côte-Nord. Mais qui était donc ce criminel considéré comme l’un des plus dangereux de l’histoire?
Robert Pickton, 74 ans, est mort après s’être fait «enfoncer» dans le nez un manche de balai cassé par son compagnon de cellule il y a près de deux semaines, selon des informations du Journal.
Il a été transporté par avion après l’agression à l’hôpital de l’Enfant-Jésus, à Québec, où il a été placé sous assistance respiratoire le lendemain. La Sûreté du Québec (SQ) a ouvert une enquête sur l’incident.
Les familles des femmes assassinées par celui qui a été qualifié «d’un des criminels les plus dangereux au pays» par le ministre canadien de la Sécurité publique, Dominic LeBlan, ont exprimé leur «joie» après avoir appris la nouvelle.
«Le diable est parti», a déclaré au Vancouver Sun Cynthia Cardinal, dont la sœur Georgina Papin, 34 ans, a été tuée par Robert Pickton vers 1999.
Le tueur en série de la Colombie-Britannique a été condamné à la prison à vie en 2007 pour le meurtre au second degré de six femmes, dont celui de Georgina Papin. Elles étaient principalement des travailleuses du sexe et des toxicomanes d’un quartier pauvre de Vancouver, le Downtown Eastside.
Mais, il aurait fait beaucoup plus de victimes de son propre aveu.
L’ADN de dizaines de femmes retrouvé
Robert Pickton a été arrêté en février 2002 après une fouille policière menée à sa ferme porcine de Port Coquitlam, à une trentaine de kilomètres de Vancouver, d’abord pour une affaire de possession d’armes illégales. Des têtes sont alors découvertes dans des seaux de plastique rangés dans deux grands congélateurs.
En prison, il avoue à un policier qui se faisait passer pour son codétenu, avoir tué 49 femmes et qu’il comptait récidiver. Il affirme aussi avoir éliminé les corps dans une «usine de dépeçage».

Un témoin aurait même affirmé qu’il donnait ses victimes en pâture à ses cochons.
Pendant près de deux ans, des dizaines de pelles mécaniques ont creusé la terre de sa ferme à la recherche de cadavres.

L’ADN de 33 femmes a été retrouvé.
En mars 2004, le gouvernement a par ailleurs révélé que le tueur avait possiblement broyé de la chair humaine pour la mélanger à de la viande de porc, qu’il vendait au public. Un avertissement a alors été émis par les autorités sanitaires de la province.
Pickton sera finalement accusé du meurtre prémédité de 26 personnes.
Seuls six chefs d’accusation ont été retenus par la Couronne, qui a suspendu les 20 autres en 2010, faute de preuves.
Une enquête bâclée
Le dossier du tueur en série a été l’un des plus chers et médiatisés au Canada. Il aura coûté plus de 102 millions $ à la province de la Colombie-Britannique pour l’enquête et les frais d’avocats, selon Radio-Canada.
L’affaire Pickton a permis, plus largement, de mettre en lumière le sort réservé aux femmes et filles autochtones disparues et assassinées (FFADA) au Canada, ses victimes étant pour la plupart autochtones.
Si bien qu’en 2012, une enquête du gouvernement provincial a conclu que les «échecs flagrants» de la police dans cette affaire, aggravés par ses préjugés à l’égard des travailleuses du sexe et des femmes autochtones, avaient mené à la tragédie.
Une thèse longtemps réfutée
De 1978 à 2001, au moins 65 femmes ont disparu du quartier Downtown Eastside.
Pendant des années, les autorités ont réfuté la thèse du tueur en série, rapporte Radio-Canada. Tôt dans l’enquête, des indices pointaient pourtant vers le coupable.
Le 23 mars 1997, Robert Pickton avait été accusé de tentative de meurtre sur la travailleuse du sexe Wendy Lynn Eistetter, qu’il avait poignardée à plusieurs reprises lors d’une altercation à la ferme.
L’accusation a toutefois été suspendue près d’un an plus tard. Les procureurs au dossier avaient jugé que la victime, qui avait des problèmes de toxicomanie, était trop instable pour que son témoignage puisse aboutir à une condamnation.
La ferme des frères Pickton était également reconnue pour ses soirées festives.
En 1996, ces hommes ont lancé l’organisme à but non lucratif Piggy Palace Good Times Society, qui prétendait organiser des événements-bénéfice. Ils pouvaient attirer jusqu’à 1700 personnes, dont des membres du crime organisé et des travailleuses du sexe de Downtown Eastside.
L’endroit a été fermé en 2000 par la Ville de Port Coquitlam.
– Avec les informations de L’Encyclopédie canadienne, Le Figaro et BBC News