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L'article provient de TVA Sports
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«C’était évident que quelque chose perturbait les joueurs» -Steve Shutt

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Louis-André Larivière

2022-03-02T12:00:00Z
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Les anciens porte-couleurs des Canadiens de Montréal à jamais associés aux glorieuses épopées du club dans les décennies qui ont marqué son histoire n’aiment pas voir l’édition actuelle piquer du nez. 

Bien entendu, regarder l’équipe se classer parmi les pires de la ligue dans un grand nombre de catégories n’offre rien de réjouissant. Observer des marqueurs en panne ou des défenseurs perdre le cap soir après soir non plus, ni le constat d’échec après l’extase vécue à l’été 2021. 

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Dans un entretien avec le TVA Sports.ca depuis Sarasota, en Floride, l’ex-attaquant Steve Shutt, nonuple marqueur de 30 buts - dont quatre campagnes de 40 buts et plus - a résumé la saison du CH en trois mots : «la tempête parfaite». 

«C’est tellement inhabituel. La COVID, les blessures... je n’ai jamais vu une équipe traverser tout ce que celle-ci a dû braver», s’est désolé le membre du Temple de la renommée qui jouait à gauche de Guy Lafleur et Jacques Lemaire dans les festives années 1970.

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«Un club de l’ECHL!»     

Au bout du fil, l’agréable légende de 69 ans, cinquième meilleur marqueur de l’histoire de la concession montréalaise, prévient d’emblée qu’il compose avec une douloureuse convalescence à la suite d’une arthroplastie, une complexe intervention subie une semaine plus tôt. 

Par moments, comme si la douleur le piquait, ses propos sont crus. Lorsqu’il les tient, il pousse parfois un rire contagieux pour apaiser le ton. 

Photo AFP
Photo AFP

«Cette année, je suis frustré au même titre que les partisans, mais je regarde ce que je pourrais faire de plus si j'étais joueur. Il y a un tsunami qui arrive devant. Que fais-tu avec huit gars hors de la formation?

«Certains soirs, je les épiais : ils n'avaient pas l’air d’une équipe de la Ligue américaine. Ils avaient un club de l’ECHL!», a-t-il noté sans s’esclaffer.

Climat d'instabilité     

Mais il y a autre chose qui agaçait celui qui a brandi cinq coupes Stanley avec le Bleu-blanc-rouge à mesure que la troupe dirigée par Dominique Ducharme naviguait en eaux troubles.

«Ce qui me dérangeait vraiment, c’est quand on pouvait constater que certains abandonnaient. Quelque chose clochait avec cette formation. Je ne sais quoi... mais c’était évident que quelque chose perturbait les joueurs dans le vestiaire. Que ce soit l’entraîneur ou peu importe.

«À présent, c’est le jour et la nuit. Je ne crois pas que ce soit uniquement l’arrivée de Martin St-Louis. C’est une attitude complètement différente que l’on voit.»

Lorsque la décennie 1970 tirait à sa fin et que les succès de Toulouse tournaient dans toutes les boîtes de nuit de la métropole (on n’a pas demandé à Shutt s’il affectionnait le disco au point d’enregistrer un disque, comme l'a fait un de ses compagnons de trio), puis que Blondie et Kurtis Blow préparaient une révolution musicale de l’autre côté de la frontière, cela coïncidait aussi avec une transformation au sein du Club de hockey Canadien. Sam Pollock avait déjà délaissé son poste de directeur général avant de quitter le giron pour de bon et Scotty Bowman a pris les commandes derrière le banc des Sabres de Buffalo.

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Photo d'archives
Photo d'archives

Dans pareil contexte de transition, le vent de changement peut être tout sauf harmonieux. Pour Shutt, il ne fait aucun doute que la situation contractuelle de Marc Bergevin a créé un climat instable dès le lancement de la campagne 2021-2022. 

«Ce qui se passe dans un vestiaire, c’est que chacun peut capter les moindres vibrations (négatives). Quand Bergevin n'a pas signé son contrat, ou qu’il ne s'en est pas fait offrir un, ça s'est rendu directement dans la chambre et les problèmes ont commencé ainsi. Ç’a fait boule de neige, estime-t-il. 

«Les joueurs savent que quelque chose va se passer à force de perdre. Est-ce le DG qui écopera? L’entraîneur? Ils se demandent "vais-je être échangé?". Les gars pensent constamment à cela.»     

Il cite même l’illustre Pat Burns, qui aurait déclaré : «mes joueurs peuvent me faire congédier en trois semaines».

«La concentration est comme un laser. C’est palpable quand quelque chose ne va pas. Ils savent tous que le trouble s’en vient. Et une fois que ç'en est fait, c'est presque un soulagement. Vous pouvez presque le voir aujourd’hui avec un nouveau directeur général et un nouvel entraîneur-chef. 

«Tout s’est stabilisé et le mot d’ordre, c’est ‘recommençons à jouer et à avoir du plaisir, il y a beaucoup moins de pression’.»

Paul Byron et les leaders indispensables     

Shutt, qui a côtoyé les Jean Béliveau, Henri Richard, Serge Savard et Yvan Cournoyer, ajoute qu’il s’est surtout senti mal pour le noyau de vétérans qui «se faisaient marteler soir après soir» et qui n’éprouvaient «aucun plaisir» à jouer dans une période de misère.

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Selon lui, les départs et absences de plusieurs leaders depuis la finale de la Coupe Stanley ont pesé lourd, tant sur la glace qu’à l’extérieur de la patinoire. Après tout, à qui les jeunes peuvent-ils demander conseil sans la présence d’un Corey Perry? Vers qui peuvent-ils se tourner pour suivre l’exemple?

«C’est un énorme facteur, insiste-t-il. Tu perds ton gardien numéro un toute la saison et avec toutes les blessures, je pense qu’ils ont établi le record pour le nombre d’hommes sur le carreau en une saison! 

Martin Chevalier / JdeM
Martin Chevalier / JdeM

«Paul Byron est un plus grand leader que les gens ne l’imaginent. Il vient de se blesser à nouveau. Ce n’est pas sa faute. Quand tu perds un meneur qui a vécu des guerres, ça laisse un vide.»

À l’époque de Shutt et les autres vedettes, les «Glorieux» avaient leur Paul Byron : un attaquant polyvalent du nom de Jim Roberts.

«Nous avions une abondance de leadership et j’en retirais quelque chose de tout le monde. C’est ce que tu dois faire, collectivement, raconte-t-il. Plusieurs ne se souviennent pas de Jimmy Roberts, car il était dans un rôle défensif sur le quatrième trio. 

«Il était un grand leader dans notre équipe. Ce sont des joueurs comme ça qui te manquent vraiment quand tu dois traverser des hauts et des bas. Cette année, ils n’avaient vraiment personne pour dire ‘regroupons-nous, voici ce qu’on doit faire. Fais ton job et tout ira bien’.

«C’était... la tempête parfaite.»

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