Québec 2022: la pénurie de main-d’œuvre frappe plusieurs secteurs de l'économie
La rareté de la main-d’œuvre soulève plusieurs enjeux pour les petites et moyennes entreprises
![Le domaine de la construction fait partie des secteurs où le manque de main-d’œuvre est particulièrement criant au Québec.](/_next/image?url=https%3A%2F%2Fm1.quebecormedia.com%2Femp%2Femp%2F60317930_44489170a4396d-513e-4823-942a-36bc05cd817b_ORIGINAL.jpg&w=3840&q=75)
Gabriel Côté
En manque de personnel, les petites et les moyennes entreprises sont à bout de souffle, clament les milieux économiques, qui désignent la pénurie de main-d’œuvre comme le plus grand défi que devra relever le prochain gouvernement.
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La difficulté de trouver des employés fait en sorte que les PME sont contraintes de verser des salaires plus élevés, alors même que l’inflation fait augmenter les autres coûts liés à la production de biens ou à la livraison de services.
« Ça fait que les dirigeants de PME doivent travailler plus, réduire leurs heures d’ouverture, annuler des projets, et même dans certains cas refuser des contrats », déplore François Vincent, vice-président pour le Québec à la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante (FCEI).
« C’est un frein à notre reprise économique, renchérit Karl Blackburn, président et chef de la direction du Conseil du patronat du Québec (CPQ). La vigueur de notre économie ne sera pas à la hauteur de ce qu’elle devrait être, à cause de la pénurie de main-d’œuvre. C’est l’enjeu numéro un au Québec, et les partis politiques doivent se prononcer là-dessus pendant la campagne électorale. »
Véritables motifs ?
Selon M. Blackburn, la cause de la pénurie de main-d’œuvre est avant tout démographique. « C’est simple : il y a plus de travailleurs qui quittent le marché du travail qu’il y en a qui y entrent. Alors on est confronté à un gros défi : on doit trouver 1,4 million de travailleurs d’ici 2030. »
D’aucuns considèrent néanmoins que cette façon de voir le problème est viciée.
« Il y a juste au Québec qu’on pense ça, mais ce n’est pas vrai, lance l’économiste Pierre Fortin. La population active continue d’augmenter au Québec. Il n’y a pas de manque. La demande des entreprises roule plus fort que l’augmentation de la disponibilité de la main-d’œuvre parce que l’économie roule fort, tout simplement. »
« Un taux de chômage aussi bas, c’est quelque chose de normal dans une économie qui fonctionne régulièrement à un haut niveau. Les dirigeants d’entreprises vont éventuellement le comprendre », ajoute-t-il.
Bassin de travailleurs
Même s’ils ne s’entendent pas sur les causes de la pénurie de main-d’œuvre, l’économiste et le président du Conseil du patronat conviennent qu’il n’existe pas de remède universel au manque de personnel.
« Il y a plusieurs solutions, comme le maintien des travailleurs expérimentés sur le marché du travail, le virage numérique ou encore l’amélioration de la formation en entreprise, mais ce n’est pas un choix de menu », signale Karl Blackburn.
Selon le président du CPQ, il faut « élargir le bassin de travailleurs de toutes les façons possibles », notamment en revoyant à la hausse nos seuils d’immigration. Dans le milieu économique, le mot d’ordre est qu’il faudrait accueillir jusqu’à 100 000 nouveaux immigrants annuellement, alors que le gouvernement Legault chiffre à 50 000 la capacité d’intégration du Québec.
De leur côté, les libéraux ont déjà annoncé qu’ils ont l’intention d’accueillir 70 000 immigrants par année jusqu’à ce que les régions aient elles-mêmes cerné leurs besoins en la matière, dans l’optique de pallier l’augmentation du nombre de postes vacants.
Ce seuil est le même que celui qui a été déterminé par la CAQ pour l’année 2022, pour rattraper un retard accumulé pendant la pandémie. « Si on est capable d’intégrer ce nombre pour une année donnée, je ne vois pas pourquoi on ne pourrait pas le faire tout le temps », dit François Vincent de la FCEI.
Situation complexe
« Évidemment, l’immigration est une solution. Mais c’est une mesure d’une grande complexité, et le processus est très long avant de porter des fruits », nuance Pierre Fortin, qui laisse entendre que l’immigration sélective peut servir à régler des problèmes à l’échelle locale, mais que l’immigration de masse risquerait de faire augmenter à nouveau le chômage, entre autres.
« C’est comme peser sur une balloune : en mettant de la pression d’un côté, ça gonfle de l’autre bord », résume l’économiste.
LES PME SOUS PRESSION
- Selon les données les plus récentes de Statistique Canada, il y aurait 253 825 postes vacants dans la province de Québec, soit plus du double par rapport au quatrième trimestre de 2019 (126 730)
- Les secteurs de l’hébergement, de la construction et manufacturier sont les plus touchés par le manque de travailleurs
- 63 % des dirigeants de PME doivent travailler plus d’heures pour compenser le manque de main-d’œuvre
- 39 % des PME sont contraintes de refuser des ventes ou des contrats
- Selon 61 % des PME, le gouvernement ne comprend pas les impacts de la pénurie de main-d’œuvre sur les entreprises
Source : Fédération canadienne de l’entreprise indépendante
DES EMPLOYÉS HEUREUX... DANS CERTAINS DOMAINES
- De 2017 à 2021, le salaire moyen au Québec est passé de 24,85 $ de l’heure à 28,81 $.
- C’est dans le secteur des services publics que les salaires ont le plus augmenté pendant cette même période, passant d’une moyenne de 36,49 $ à 46,21 $ pour chaque heure travaillée.
- Dans les domaines de l’agriculture, du commerce de détail, de l’enseignement, et des services d’hébergement et de restauration, les salaires ont moins augmenté que dans les autres secteurs.
Source : Statistique Canada
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