Publicité
L'article provient de 24 heures

Voici pourquoi des politiciens mettent leurs pronoms dans leur bio

La vice-présidente des États-Unis a inscrit ses pronoms dans sa bio Twitter.
La vice-présidente des États-Unis a inscrit ses pronoms dans sa bio Twitter.
Partager

Camille Lalancette et Camille Dauphinais-Pelletier

9 février 2021
Partager

Avez-vous remarqué que la nouvelle vice-présidente des États-Unis, Kamala Harris, a écrit dans sa bio Twitter les pronoms «she/her»? La communauté LGBTQ+ américaine était généralement heureuse de cette marque de soutien, mais plusieurs espèrent que ce ne sera pas seulement une façon d'attirer quelques électeurs. 

Voici ce qu’il faut savoir sur ce phénomène.  

C’est quoi les pronoms en bio? 

Les pronoms qu’on met dans notre petit texte de description sur les réseaux sociaux sont ceux avec lesquels on souhaite être interpellé, une précision souvent utilisée pour montrer son soutien envers la communauté LGBTQ+.  

À la base, cette pratique était surtout appliquée par les personnes trans ou qui ont une identité de genre non conforme aux standards répandus pour éviter qu’on réfère à eux de la mauvaise façon. Une partie plus large de la population y participe pour déstigmatiser la pratique.  

Des politiciens font ça? 

Aux États-Unis, des politiciens bien en vue ont ajouté leurs pronoms à leur bio au cours des dernières années. 

La plus connue est Kamala Harris, mais il y en a d’autres : lorsque le parti démocrate a élu son chef en 2019, pas moins de la moitié des candidats avaient leurs pronoms dans leur bio.  

Au Canada, le premier ministre Justin Trudeau et le chef du NPD Jagmeet Singh n’en font pas mention, même s’ils sont au fait des dernières pratiques sur les réseaux sociaux. On n'est pas totalement en reste : le ministre des Ressources naturelles Seamus O’Regan les indique, tout comme le député du NPD Randall Garrison.  

Publicité

Au Québec, un tour d’horizon des comptes de médias sociaux des élus nous laisse bredouilles : aucun pronom clairement identifié en fin de bio. Comme partout dans le monde, des profils d’élus contiennent des mots genrés comme député/députée ou père/mère, mais ils n’ont pas la connotation militante des pronoms. 

Ça donne quoi aux politiciens de mettre leur pronom en bio? 

Mettre son pronom dans sa bio ne prend que quelques secondes, ne coûte rien et est fort en symbolique. Plusieurs organisations LGBTQ+ ont pris la parole pour dire qu’elles appréciaient le geste de la part de politiciens.  

Mais bien sûr, elles espèrent que ça ne soit pas juste pour bien paraître et que l’action aille au-delà des mots.  

«Je trouve que c’est un peu de la parade et je cherche la substance», soulève par exemple Manon Tremblay, professeure en science politique depuis 28 ans à l’Université d’Ottawa, qui croit que le geste est noble mais qu’il doit s’accompagner d’engagements. 

Des solutions plus concrètes 

Pour les politiciens, c’est possible d’amener des solutions concrètes aux problèmes rencontrés par la communauté LGBTQ+.  

«Si les politiciens et politiciennes veulent être des alliés de la communauté LGBTQ+, bien qu’elles et ils passent des politiques publiques pour [éliminer les lois] discriminatoires systémiques qui existent toujours. Qu’on donne de l’argent aux communautés pour qu’elles puissent soutenir [les personnes affectées] et combattre le harcèlement, l’intimidation à l’école. Ce sont des engagements qui me convainquent davantage qu’un politicien ou une politicienne qui change sa signature», déclare Manon Tremblay.  

«On peut espérer que ça montre la volonté de ces figures politiques de faire des changements réels et concrets qui permettraient d’améliorer nos situations. Mais ça peut aussi être utilisé pour faire bonne figure, sans faire de gestes concrets», renchérit Charli-Augustin Savignac, responsable au service aux membres chez Enfants transgenres Canada, qui ne banalise toutefois pas la portée du geste. 

Publicité

Pas juste les politiciens 

Vous l’avez sûrement vu sur Instagram, TikTok ou Twitter : Il n’y a pas que les politiciens qui mettent leurs pronoms dans leur bio pour marquer leur solidarité envers la communauté LGBTQ+. Dans le grand public, la tendance est bien rendue au Québec.  

Par exemple, l’illustrateur jeunesse Julien Castanié, qui s’est toujours identifié comme homme, a décidé de mettre ses pronoms dans sa bio en remarquant que plusieurs de ses amis queer – mais pas seulement – inscrivaient leurs pronoms sur leurs profils.  

«C’est pour éveiller des personnes qui ne sont pas habituées à ça, pour qu’eux et elles soient à leur tour intéressés à se positionner là-dessus», avance celui qui remarque la souffrance que peuvent subir des personnes mégenrées. «Ce n’est pas grand-chose d’ajouter le pronom avec lequel on veut être appelé», dit-il.  

L’autrice Ève Landry est dans la même situation. Elle a publié en novembre sur Instagram un message voulant démocratiser la spécification des pronoms dans les descriptions. Elle encourage les gens à les inscrire, tout en soulignant qu’il doit demeurer libre à chacun de les écrire ou pas.  

Elle croit qu’au premier contact, il ne faudrait pas genrer les gens avant de leur avoir demandé leur pronom. «[Le but] c’est de travailler à une société où on genre moins tout et n’importe quoi», dit-elle.  

Publicité

Charli-Augustin Savignac renchérit d’ailleurs qu’une façon d’être un meilleur allié est de parler de ses pronoms et de s’introduire avec ceux-ci en souhaitant que ceci devienne une pratique générale. «Au travail, je me présente toujours avec mes pronoms, je demande ceux des autres, alors ça normalise la question des pronoms dans la présentation d’une personne», relate-t-il.   

Comment ça marche les pronoms neutres en français? 

Certaines personnes préfèrent qu’on utilise un pronom neutre, donc qui n’est ni masculin ni féminin, pour référer à eux.    

En anglais, ce n’est pas compliqué d’utiliser un pronom neutre : they/them existe déjà et sert cette fonction. En français, c’est plus compliqué, mais des néologismes tentent d’émerger avec plus ou moins de succès selon le cas.   

Difficile de savoir lequel est le bon : l’Office québécois de la langue française ne recommande pas l’utilisation de pronoms neutres. Mais un guide d’écriture inclusive de l’Université McGill recommande cette liste, tirée du blogue En tous genres :   

  • Iel (prononcé « ièlle ») : Il s’agit du pronom inclusif le plus utilisé actuellement en français. Une orthographe variante du terme, yel, se prononce de la même manière.     
  • Ul et ol : Ces pronoms sont plus souvent utilisés par les personnes se définissant en dehors du spectre masculin/féminin. Étant donné que ces termes ne mélangent ni «il» ni «elle», contrairement à iel, il est préconisé par ces personnes.     
  • Ael : C’est un pronom neutre qui propose un accord en «ae» à la fin des mots. Cette pratique s’inscrit dans les tendances de l’écriture inclusive. Exemple : Ael s’est endormiæ.    
  • Im et em : Ces pronoms sont créer afin de convenir aux personnes qui s’identifie partiellement à un genre tout en restant dans cette culture anticonformiste du genre.     
  • El et ille (ille prononcé [ij] comme dans le mot «grille» ) : Ces pronoms s’inscrivent dans la même démarche que «im» et «em».     
Publicité
Publicité
Image du contenu audio en cours
En directQUB en rafale