Projet de loi 51: les syndicats veulent protéger les travailleurs des régions
Jean Houle
Les travailleurs de la construction s'inquiètent des conséquences du projet de loi 51, dont la consultation publique a débuté mardi et qui permettrait notamment la mobilité de la main-d'œuvre à la grandeur du Québec.
Si le projet de loi 51 avait existé au moment de la construction de l'usine AP-50 de Rio Tinto de Jonquière en 2010, de nombreux travailleurs du Saguenay-Lac-Saint-Jean auraient été écartés du chantier.
L'entrepreneur responsable des travaux provenait de la Mauricie.
«Il aurait pu amener ses travailleurs, et pendant que nous, on n'aurait pas travaillé sur un chantier de chez nous!» a dit Alain Brochu, qui représente les 850 électriciens du Saguenay-Lac-Saint-Jean membres de la FIPOE, affiliée à la FTQ. Ça crée des comités de chômeurs, des gras qui manifestent à l'entrée des chantiers. En 2011, on crevait de faim partout au Québec dans le secteur de la construction.»
La mobilité de la main-d'œuvre est le principal grief exprimé par les travailleurs de la construction au projet de loi, qu'ils soient affiliés à la FTQ, à la CSN ou à la CSD. Ils reprochent au gouvernement de sacrifier un acquis gagné par la négociation il y a 50 ans.
«Le gouvernement vient d'enlever ça et de s'ingérer dans la négociation», a indiqué le président provincial de la CSD Construction, Carl Dufour.
«On sacrifie les travailleurs en région pour avantager les entreprises des grands centres, qui font affaire avec des sous-traitants, et qui ne dépensent jamais leur argent dans la région!» a ajouté le président de la CSN Construction, Pierre Brassard.
«La mobilité, c'est toujours davantage des grands centres vers les régions, et non l'inverse», a renchéri Geoffrey Larouche du syndicat des opérateurs de machinerie de la FTQ du Saguenay–Lac-Saint-Jean.
De nombreux chantiers de la région ont rappelé l'importance, selon les syndicats, de protéger la main-d'œuvre régionale. L'entrepreneur responsable du palais de justice de Roberval et des maisons des aînés, par exemple, Pomerleau, est basé à Montréal. Rio Tinto devrait éventuellement entreprendre une nouvelle phase de cuves AP-60. Des travaux majeurs sont aussi envisagés à la base militaire de Bagotville.
«Il n'y a pas beaucoup d'entreprises régionales qui peuvent déposer des soumissions sur ces contrats. C'est donc un enjeu majeur pour nous», a souligné M. Brochu.
La FTQ a sensibilisé les députés de la CAQ du Saguenay–Lac-Saint-Jean, incluant la ministre Andrée Laforest.
«Ils semblaient surpris de voir à quel point l'équilibre est fragile», a noté Alain Brochu.
La rétroactivité salariale au terme du prochain renouvellement du contrat de travail est aussi une préoccupation.