Professeurs et chercheurs à risque: l’Université de Montréal met en garde des employés voyageant aux É.-U.

L’Université de Montréal (UdeM) a envoyé jeudi après-midi une première mise en garde à tous ses employés et ses étudiants qui comptent voyager aux États-Unis, alors que l’administration Trump multiplie les attaques contre les universités américaines.

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«Nous demandons [...] de faire preuve de prudence dans [vos] déplacements au sud de la frontière canado-américaine et vous rappelons que les douaniers américains ont le droit de vérifier vos appareils électroniques (téléphone, ordinateur ou tablette) lors de votre entrée», peut-on lire dans ce courriel de la direction de l’UdeM, dont Le Journal a obtenu copie.

L’établissement affirme que plusieurs «membres de sa communauté» se sont dits préoccupés à l’avenir de se rendre aux États-Unis pour participer à un congrès, à une conférence ou encore à un cours.

«Nous avons tenu à rappeler à notre communauté quels services sont disponibles pour les soutenir au besoin et nous avons décidé d’écrire à tous parce que nous recevions plusieurs questions, précise l’attachée de presse de l’UdeM, Julie Cordeau-Gazaille. Nous encourageons toujours les collaborations universitaires avec les États-Unis.»

Rappelons que le président Donald Trump a signé ce mois-ci un décret visant à éliminer le ministère de l’Éducation. Son objectif est de lutter contre les idées progressistes et de serrer la vis à des universités.

Du jamais-vu

L’UdeM exige d’ailleurs que ses employés et ses étudiants déclarent, auprès de leur établissement, tout séjour à venir aux États-Unis. Sa «communauté» est également invitée à vérifier que leurs appareils électroniques ne «contiennent aucun fichier avec des renseignements sensibles».

Pierre Martin, spécialiste de la politique américaine et professeur à l’Université de Montréal depuis près de 35 ans, confirme qu’il s’agit de la première «mise en garde de sécurité» sur les voyages aux États-Unis que son employeur lui envoie.

«Ça ne m’a pas surpris dans le contexte politique actuel, admet M. Martin. J’ai certains collègues à l’université qui ont en effet décidé d’annuler leur participation à des événements aux États-Unis dernièrement. Pour les mêmes raisons que certains refusent d’acheter des produits américains à l’épicerie.»

• Regardez aussi ce podcast vidéo tiré de l'émission de Richard Martineau, diffusée sur les plateformes QUB et simultanément sur le 99.5 FM Montréal :

Le professeur ajoute qu’il ne compte pas de sitôt se rendre chez nos voisins du Sud.

«Même moi, si un douanier m’intercepte et qu’il voit mes chroniques écrites sur la politique américaine... il pourrait me poser des questions», explique celui qui écrit pour Le Journal.

L’Université McGill, l’UQAM et ULaval ont confirmé ne pas avoir envoyé à leurs étudiants ou employés ce type de communication.

Une Québécoise annulée

Cette mise en garde de l’UdeM survient après que la D^re Joanne Liu, pédiatre et ex-présidente de Médecins sans frontières, eut publié jeudi dans Le Devoir son expérience qui a mal viré à l’Université de New York (NYU).

«"Après trois heures de discussion et de tergiversation, nous avons décidé d’annuler votre présentation", m’a annoncé, avec grand regret, la vice-présidente à l’éducation de l’Université», écrit M^me Liu, qui était invitée ce mois-ci par l’établissement américain à donner une conférence scientifique.

La pédiatre québécoise qui enseigne également à l’Université de Montréal précise que la NYU craignait toutefois que sa présentation soit «perçue comme antisémite», notamment par rapport au travail humanitaire à Gaza.

«La décision est sans appel, je suis annulée, “cancellée”. Abasourdie, je marmonne qu’ils vont payer mon changement de vol d’avion. J’écoute les excuses de la dame en éducation sans les entendre. Sa voix est émotive, elle ne vit pas bien cette annonce», raconte Joanne Liu, sous le choc.