Pris avec des ennuis de santé, Philippe Laprise a eu peur de mourir
Patrick Delisle-Crevier
C'est au tour de Philippe Laprise de prendre place dans notre coloré fauteuil. Avec lui, il est bien sûr question d’humour, mais aussi de choses sérieuses, comme cette fois où il s’est cru condamné par la maladie. Il parle aussi de Pourquoi pas, son nouveau spectacle qui est né de cette période de sa vie. Nous jasons également famille, TDAH, projets, etc.
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Philippe, comment ça va?
Je vais bien. C’est le fun de venir à Montréal par une belle journée de tempête: je planifie mes déplacements six heures à l’avance! (rires) Je suis un fanatique de motoneige et je planifie déjà mon hiver. J’ai cette passion depuis des années. C’est un exutoire, ça me permet de décrocher, de ne penser à rien et j’ai du fun. J’aime aussi faire du ski et, plus rarement, de la raquette.
Tu es actuellement en tournée avec Pourquoi pas. Peux-tu me parler de ce spectacle?
Il va très bien. Nous sommes rendus à 75 000 billets de vendus et nous allons arriver à 100 000 durant l’année. Je suis vraiment content, c’est plus que je ne pensais au départ. Ça me touche de voir que le public est au rendez-vous. Je me sens super privilégié, car je sais que l’offre pour les spectacles d’humour est grande. Je suis hyper heureux parce que, je ne m’en cache pas, la pandémie m’a véritablement remis en question. Je doutais de pouvoir refaire mon métier un jour.
Tu as vécu la pandémie difficilement, d’autant plus que tu as eu une petite frousse côté santé...
Oui, une petite bosse est apparue sur un sein, et c’est d’ailleurs cette expérience qui m’a amené à mon spectacle. J’étais tellement angoissé d’avoir ça. L’attente des résultats a été difficile, longue, et j’imaginais le pire des scénarios. Le fait d’avoir eu cette peur d’être malade et d’en mourir, ça m’a un peu ébranlé dans mes valeurs et dans ce que j’ai le goût de faire du reste de ma vie. Je me suis aperçu que j’étais bien entouré, que j’avais des amis très proches et une famille extraordinaire. Je le savais déjà, mais c’est venu encore plus renforcer ce sentiment. J’étais déconnecté, dans l’inquiétude. Finalement, le diagnostic a été moins grave que ce à quoi je m’attendais. Mais je n’en dis pas plus, car c’est le punch de mon spectacle.
Tu as vraiment eu peur de mourir?
Oui, vraiment. Et avec ce qui s’est passé dernièrement avec Karl Tremblay, ça me fait encore plus réfléchir, j’ai envie de prendre davantage soin de moi. Je ne dis pas que Karl ne prenait pas soin de lui, bien sûr, mais il avait le même âge que moi, et sa mort m’a beaucoup ébranlé. Je mets des choses en place pour faire plus attention à moi. Je dois développer des réflexes afin d’avoir une meilleure hygiène de vie. Je m’entraîne un peu, mais je suis loin de le faire chaque jour. Le plus important dans ma vie en ce moment, c’est d’être en forme et ça passe par aller marcher une demi-heure par jour avec mon chien. Je dois aussi dire que je suis un gars d’excès; donc, si je commence à faire du vélo, eh bien, je le fais de façon excessive et, à un moment donné, je me brûle et je me décourage.
Tu as un surplus de poids... Quel est ton rapport aux régimes?
Mon poids m’obsède, et sérieusement, plus je vieillis, plus j’y pense. J’ai toujours été dodu et, en ce moment, je ne pèse pas autant que par le passé, mais je me rapproche de ce poids et ça me dérange. Ce qui est décourageant avec les régimes, c’est qu’on essaie plein d’affaires qui ne fonctionnent jamais. J’ai l’impression que c’est toujours toute une histoire de perdre du poids, pour finalement en reprendre. Il y a eu une période où mon poids a beaucoup descendu et puis, tout à coup, je me suis mis à en reprendre. Là, je suis dans une période où j’ai de la misère à redescendre. À un moment donné, je viens écoeuré et j’ai le goût de manger comme je le veux et d’avoir du fun. Je suis du genre à faire des kilomètres en vélo pour ne pas avoir à me priver. Dans ma garde-robe, j’ai des vêtements de différentes grandeurs: ça va du 6 au 9. En ce moment, je porte du 8, et si j’arrive à 9, je vais être à mon plus gros, c’est-à-dire à mon poids d’il y a 10 ans. Mais tout ça fait partie de ma vie. J’oscille entre 260 et 310 lb depuis 10 ans.
Parle-moi de ton parcours dans le métier d’humoriste...
J’ai vu Michel Courtemanche sur scène en 1986, à Chicoutimi. Je devais avoir huit ou neuf ans. Après ce spectacle, c’était clair que je voulais faire comme lui dans la vie. Souvent, à cause de mon TDAH, j’étais dans les blagues. J’aimais faire rire les autres, parce que je n’étais pas très bon à l’école. C’était ma façon de me valoriser. J’ai toujours aimé faire rire les gens et j’ai suivi cette voie. J’ai fait de l’improvisation, du théâtre, et j’avais cet appel de faire de l’humour. Alors, lorsque j’ai terminé mes études en éducation spécialisée, je suis venu à Montréal, j’ai tenté ma chance à l’École nationale de l’humour, et ça a fonctionné. Pendant un certain temps, j’ai fait mes deux métiers. Et puis, quand ça a vraiment décollé pour moi en humour, j’ai mis l’autre de côté.
Quels souvenirs gardes-tu de tes années en éducation spécialisée?
De magnifiques souvenirs! Je dirais même que c’est le métier le plus valorisant qui soit. J’ai vraiment eu l’impression d’être utile, j’aimais aider. J’ai travaillé avec des gens souffrant de déficiences intellectuelles, et ç’a été incroyable comme expérience. J’ai adoré ça, mais c’était une charge de travail énorme.
As-tu le parcours en humour que tu pensais avoir?
Je ne me suis jamais tracé de parcours, je savais où je m’en allais, je voulais une carrière. Aujourd’hui, quand je regarde ça, je suis heureux. J’ai fait quatre one man shows et j’ai participé à des projets fantastiques! Donc, si ça devait s’arrêter demain, je serais très content du chemin parcouru. J’ai été capable de faire un bon bout dans ce métier, de durer dans le temps, tout ça à travers tous les mouvements et les changements. Je n’ai jamais voulu voler la place à qui que ce soit ni écraser personne pour y arriver. Je me suis fait ma place à moi, je l’ai gagnée et j’en suis fier.
Que ferais-tu si ça s’arrêtait?
Probablement que je travaillerais en excavation. J’ai toujours été fasciné par ces appareils de machinerie lourde et j’ai l’impression que je m’amuserais à faire ça. Sinon, j’irais voir Parker Schnabel de l’émission Alaska: La ruée vers l’or, je l’aiderais dans sa mission et je deviendrais chercheur d’or à ses côtés. C’est fascinant!
Tu as parlé ouvertement de ton TDAH et du temps que ça t’a pris pour apprendre à bien vivre avec ce diagnostic. C’était important pour toi?
Oui, mais j’ai appris à vivre avec ça avant même de le traiter. Je me doutais que j’avais un déficit d’attention. Par contre, je n’avais jamais pris le temps de m’asseoir et de faire les examens nécessaires pour établir un diagnostic. Ça a pris du temps. Nous sommes trois dans ma famille à avoir un TDAH et nous avons la médication pour nous aider. Je ne cache pas que, pour ma blonde, le fait de vivre avec trois TDAH, c’est un défi. On est spécialisés en la matière, on est une famille très équilibrée et informée. La prise de médication pour le TDAH a changé ma vie. J’avais 39 ans et, pour la première fois de ma vie, j’avais l’impression d’enfin avoir une pause de moi, de mon cerveau qui roulait tellement vite, qui partait dans tous les sens, qui posait des questions sans attendre les réponses. Finalement, c’est quand tu prends de la médication que tu réalises que tu étais vraiment difficile à vivre, pour toi et pour les autres. Donc, je veux en parler pour aider ceux qui n’ont pas encore les connaissances sur le sujet.
Tu es père de trois adolescents. Quel genre de papa es-tu?
Ma fille aînée a 21 ans, mon fils a 19 ans et mon autre fille a 13 ans. C’est la belle vie qui commence, parce que mes enfants sont rendus grands et que le gros du travail est fait. Être père a été une magnifique expérience pour moi. Mais au début, avec la première, ç’a été plus difficile, parce que je n’étais pas médicamenté. J’ai eu besoin de faire une thérapie et de travailler sur moi. Durant cette période-là, dans ma vie, j’étais perdu, mais je ne le savais pas parce que mon gérant et mon équipe géraient pas mal de choses à ma place. Mais à un moment donné, j’ai réalisé que je n’allais pas bien et que mon TDAH prenait toute la place. Il m’aidait beaucoup quand j’arrivais sur scène, car jepouvais improviser une demi-heure à partir d’une simple idée, mais dans ma vie hors de la scène, c’était plus compliqué de vivre avec cette situation. Et encore plus dans mon nouveau rôle de père. Quand mes deux autres enfants sont arrivés, tout est allé mieux. Ma plus vieille a un TDAH, comme moi. Nous sommes très proches, elle me fait penser à moi à son âge. Aujourd’hui, nous sommes très complices, et je pense que je suis désormais un très bon papa.
Ta thérapie, à 38 ans, a donc été salutaire...
Oui, même qu’il fallait absolument que j’en fasse une, parce que je ne comprenais plus rien de ce qui se passait dans mon couple, dans ma famille et dans ma vie. J’ai eu besoin de prendre une pause. Je me souviens que durant cette période, j’avais fait 67 jours de tournages d’affilée sur différents projets et je suis arrivé à Noël brûlé raide. Au point où j’étais tellement fatigué, mêlé et perdu que j’ai gâché le Noël de tout le monde. J’étais probablement en dépression et j’ai eu à consulter, à aller chercher de l’aide, à changer des affaires dans ma vie. Ça a changé ma vie au complet. Le plus important, ç’a été de me rendre capable de nommer les affaires et de comprendre que mes enfants avaient aussi le droit de nommer les choses.
As-tu l’impression que, parmi tes trois enfants, il y en a un qui va suivre tes pas dans ce métier?
Ma blonde est professeure de théâtre, et je pense que nos trois enfants sont très stimulés culturellement. Cependant, je ne pense pas que mes filles s’intéressent à une carrière dans ce domaine, même si elles ont du talent et du charisme. Mon fils étudie en sciences, mais il aime beaucoup la scène, les arts et il fait de l’improvisation. Je ne serais pas surpris de le voir faire ce métier. Pour le moment, ce n’est pas dans ses plans, mais on ne sait jamais...
On te verra cet hiver dans Sortez-moi d’ici!. Que retiens-tu de cette expérience?
J’ai adoré mon expérience! Ça m’a amené à sortir de ma zone de confort et je le referais n’importe quand. Disons que j’ai pu confronter certaines de mes peurs. Ç’a été une expérience extraordinaire, vécue avec des gens qui sont devenus des amis. J’ai appris beaucoup de choses, entre autres, que j’avais plus d’habileté, de courage et de force que je le pensais.
Tu partages ta vie avec ta conjointe depuis plus de 25 ans. Cherchais-tu cette stabilité amoureuse?
Oui, j’ai toujours souhaité une stabilité dans les différentes sphères de ma vie. Je n’ai pas vraiment connu le célibat, et c’était important pour moi d’avoir une famille. J’avais cette image d’être entouré quand j’allais mourir.
Qu’est ce que tu n’as pas encore fait et que tu aimerais faire à tout prix?
J’aimerais beaucoup faire un film, avoir un premier rôle, et encore plus dans un film de Noël. J’aimerais explorer beaucoup plus le cinéma et le jeu. J’aimerais aussi jouer dans une série. Je suis d’ailleurs en période d’écriture pour réaliser un tel projet.
En terminant, qu’est-ce qui t’occupera dans les prochains mois?
Je vais reprendre ma tournée Pourquoi pas jusqu’en 2025 et je serai de la prochaine saison de Sortez-moi d’ici!. Je suis copropriétaire d’une équipe de baseball de la Ligue de baseball majeure du Québec, qui a pour nom le Big Bill de Coaticook. J’aime aller aux matchs, jaser avec le monde, gérer les commanditaires et plein de petits trucs comme ça. Je suis aussi dans la deuxième saison de LOL: Qui rira le dernier?. Je rêvais d’y participer et c’est chose faite! Enfin, j’ai un rôle dans la saison 3 de la série Le bonheur, où j’incarne le ministre de l’Éducation. Je suis content de revenir au jeu dans une telle série. Je suis arrivé là préparé comme je ne l’ai jamais été. Je connaissais mes textes sur le bout des doigts et j’espère que ce n’est que le début, car j’ai vraiment envie de retourner jouer...
Le bonheur, mercredi 21 h 30, à TVA. Sortez-moi d’ici!, dimanche 18 h 30, à TVA, dès le 3 mars. LOL: Qui rira le dernier? est disponible sur Prime Video. Infos pour son spectacle: philippelaprise.com.