«Pornographie extrême»: le nouveau vidéoclip de Sam Smith fait scandale
Sarah-Florence Benjamin
«Pornographie extrême», «vulgaire», «hypersexualisé», voilà le genre de réactions qu’a suscité le nouveau vidéoclip de Sam Smith. Pourtant, la vidéo n’est pas très différente de ce que les artistes populaires ont sorti dans les dernières années. C’est plutôt l’identité de genre et l’apparence de Smith qui dérangent ici, répondent de nombreux internautes.
Pour accompagner la sortie de son nouvel album Gloria, Sam Smith a fait paraître le vidéoclip de son simple I’m Not Here to Make Friends. Le clip met en vedette Smith en tenues extravagantes, dont un corset assorti de pastilles sur les mamelons ainsi que de nombreux danseurs et figurants, comme la drag queen française La Big Bertha dans un luxueux château.
Ce n’est pas la première fois qu’on voit des danseurs en culotte de cuir ou des bouteilles de champagne qui jaillissent au visage dans un vidéoclip. Pourtant, I’m Not Here to Make Friends a vivement fait réagir une partie des médias et des internautes anglophones.
«Ce n’est pas bon ni sain pour notre société»
Invitée à l’émission Good Morning Britain, la journaliste Alex Phillips a déclaré que le vidéoclip rappelait la «pornographie extrême» par ses allusions à la culture BDSM.
Selon l’ancienne députée au parlement européen pour le parti du Brexit, la vidéo normalise la pornographie, ce qui mènerait à «la hausse des agressions sexuelles et les relations qui s’effondrent». Elle affirme: «Ce n’est pas bon ni sain pour notre société et c’est [le vidéoclip] un symptôme.»
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Alex Philips s’inquiète que ce genre de contenu soit accessible par des jeunes sur internet: «C’est beau d’empêcher les enfants de le voir, mais ils ont des tablettes et des téléphones, ils vont le voir.»
Elle n’est pas seule à appeler à ce que le clip soit bloqué sur YouTube pour les usagers âgés de moins de 18 ans. Oli London, personnalité web britannique qui s’est fait connaître pour ses multiples opérations de chirurgie plastique visant à imiter le visage d’un des membres du groupe de K-pop BTS, a aussi avancé sur Twitter: «Des enfants de 5 ans peuvent chercher et regarder [la vidéo] sans restriction! [...] C’est monstrueux!»
YouTube does not have any age restrictions on Sam Smiths degrading sexualised new music video.
— Oli London (@OliLondonTV) January 28, 2023
5 year olds can search this up and watch it with no content restrictions!
Sam Smith, this is not art. This is not trendy. This is not empowering. This is monstrous! #SamSmith pic.twitter.com/NoDec6rtEE
D’autres internautes ont comparé l’artiste britannique au controversé Andrew Tate, qui fait face à des allégations de trafic humain en Roumanie. «Andrew Tate est en prison pour rien et cet homme ne l’est pas? Dégoûtant», a tweeté l’un d’eux.
Messed up badly, sick of seeing people trying to push this on everyone. The bloke is very clearly mentally Ill. Children will see this as well.. Andrew tate is in jail for nothing and this man isn’t? Vile. https://t.co/r2IGdefP9F
— Matt (@mztty) January 29, 2023
«Sam Smith est l’exemple parfait de ce que la culture dégénérée d’Hollywood fait aux gens», a tweeté Dominique Samuels, une commentatrice politique conservatrice. «Elle rend les célébrités vulgaires, hypersexualisées et obsédées par leur sexualité qu’elles portent comme un costume [...]»
Sam Smith is a perfect example of what degenerate Hollywood culture does to people.
— Dominique Samuels (@Dominiquetaegon) January 28, 2023
It makes celebrities vulgar, hyper-sexualised and obsessed with wearing their sexuality like a costume and shoving it in everyone’s face.
And to make matters worse, kids look up to this man! pic.twitter.com/0xpUryCl3a
Homophobie et grossophobie
Ce qui sépare le clip de Sam Smith de celui d’autres artistes connus n’est pourtant pas son contenu, mais plutôt son identité de genre et son apparence, selon plusieurs commentateurs et internautes. Smith, qui utilise le pronom iel, a fait son coming out en tant que personne non-binaire en 2019.
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Alors que les droits de personnes trans sont remis en cause autant au Royaume-Uni qu’aux États-Unis et que les personnes queer son régulièrement accusées de pervertir la jeunesse dans les médias de droite, il n’est pas étonnant qu’une personne non-binaire mis.e en scène de manière suggestive dans un clip choque, avance la journaliste Daisy Jones dans une chronique pour British Vogue.
Sex has always been a running theme in modern pop music, and music videos often flaunt it.
— Owen Jones (@OwenJones84) January 30, 2023
But Sam Smith has made the criminal offence of being a) queer and b) not skinny, and in an increasingly anti-LGBTQ culture, that can’t be tolerated.
L’apparence de Smith a aussi été invoquée pour expliquer l’outrage. La mise en scène aguichante n’aurait causé aucune réaction «si Smith avait été mince et cisgenre», argue un commentateur culturel dans The Independent.
C’est ce que plusieurs internautes ont également soulevé pour défendre l’artiste britannique contre des critiques qui ne venaient pas seulement de commentateurs conservateurs. «Si Harry Styles avait porté la même chose à la Une d’un magazine, vous auriez crié “YAS QUEEN”», tweete une internaute pour illustrer le double standard avec lequel on juge les personnes queer et grosses.
If Sam Smith were thin, cis, and straight, they wouldn’t be ridiculed for how they present and dress. If Harry Styles wore the same fits on a magazine cover, y’all would be screaming YAS QUEEN. Anyway, support fat queer people.
— Mae Murray (@maemurrayxo) January 30, 2023