Plus de 40% des élèves échouent en orthographe à la fin du secondaire
Des experts interrogés par Le Journal proposent 10 solutions concrètes pour corriger le tir

Daphnée Dion-Viens
Alors que plus de 40% des élèves échouent en orthographe à la fin du secondaire, 10 sommités québécoises et enseignants interrogés par Le Journal proposent 10 pistes de solution concrètes pour corriger le tir, une initiative inédite qui, espèrent-ils, incitera Québec à agir.
L’automne dernier, le gouvernement a mis sur pied un groupe de travail afin de rehausser les compétences en français écrit des étudiants des cégeps et des universités, dont les recommandations seront rendues publiques sous peu.
Or, plusieurs estiment qu’il est aussi le temps de redresser la barre dans le réseau scolaire et accusent le ministre de l’Éducation, Jean-François Roberge, de se traîner les pieds.
Marie-France Morin, professeure à l’Université de Sherbrooke, constate que «le ministre est assez peu volubile sur cette question qui semble cruciale pour la réussite des élèves».
Même son de cloche de la part de Luc Papineau, enseignant en français au secondaire: «Pourquoi ce silence assourdissant au primaire et au secondaire? Comment se fait-il que le ministre Roberge n’ait pas répondu présent?»
Un «drame national» qui perdure
Depuis des décennies, les lacunes des élèves en français écrit font pourtant la manchette. Les années passent, mais les résultats aux épreuves ministérielles d’écriture ne s’améliorent pas vraiment.
L’orthographe grammaticale est la bête noire de plusieurs élèves: 42% n’ont pas eu la note de passage à ce critère lors de l’épreuve ministérielle de cinquième secondaire en 2019.
Au primaire, il existe des évaluations en écriture à la quatrième année et à la sixième année, mais le ministère de l’Éducation ne compile pas les résultats à l’échelle provinciale. Le scénario est le même pour l’épreuve d’écriture de deuxième secondaire.


«Il n’y a pas vraiment de changement. Ça fait 25 ans que le drame national existe», affirme Suzanne-G. Chartrand, professeure retraitée de l’Université Laval.
«C’est un problème culturel d’envergure, ajoute-t-elle. La langue, c’est la culture au Québec. On ne peut séparer les deux. C’est un problème grave, mais le gouvernement ne s’y attaque absolument pas.»
Des pistes de solution
Il faut remonter à 2008 pour retrouver la dernière initiative gouvernementale d’envergure sur l’enseignement du français. L’ex-ministre de l’Éducation Michelle Courchesne avait présenté un plan d’action reposant sur 22 mesures, inspiré des recommandations d’un groupe d’experts.
Cette initiative n’a toutefois pas permis de donner le coup de barre espéré. «Je pense que ce plan a donné des résultats, mais on a encore du pain sur la planche. Retroussons-nous les manches et continuons», affirme Pascale Lefrançois, doyenne de la Faculté des sciences de l’éducation de l’Université de Montréal.
C’est dans ce contexte que Le Journal a fait appel à une dizaine d’experts — des enseignants, des professionnels et des universitaires — afin d’établir de nouvelles mesures qui pourraient permettre d’améliorer la qualité du français écrit sur les bancs d’école.










Cet exercice nous a permis de faire ressortir 10 solutions (voir ci-dessous), dont plusieurs sont issues de la recherche en éducation. Rares toutefois sont celles qui font consensus, ce qui démontre à quel point le sujet demeure délicat et complexe. «Il n’y a pas de réponse simple», affirme l’enseignant à la retraite et conférencier Yves Nadon.
«Une véritable réflexion» réclamée
Les intervenants interrogés se réjouissent de cette initiative, laquelle permet de remettre sur la place publique les enjeux reliés à la maîtrise du français à l’école, mais certains soulignent les limites d’un tel exercice.
Les «solutions magiques» décrétées unilatéralement donnent souvent de bien piètres résultats, prévient l’enseignant Luc Papineau, qui réclame plutôt «une véritable réflexion sur l’enseignement du français» au Québec.
«Au lieu de faire du bricolage, on devrait prendre le temps de réfléchir un peu», affirme-t-il.