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Culture

Père d’un enfant handicapé, Rémy Girard fait de touchantes confidences

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Michèle Lemieux

2023-06-05T10:00:00Z
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Le film L’ombre des corbeaux met en lumière les violences physiques, psychologiques et sexuelles subies par les enfants autochtones dans les pensionnats canadiens. En acceptant d’incarner un prêtre pédophile, Rémy Girard est conscient de participer à une histoire qui doit être racontée. Idem dans sa vie de père d’un jeune adulte atteint de paralysie cérébrale. L’acteur s’est confié à Marina Orsini dans le cadre d’un balado et a accepté d’aborder sa réalité de père d’un enfant handicapé. Un document aidant pour bien des parents dont c’est la réalité.      

Monsieur Girard, croyez-vous que L’ombre des corbeaux fasse partie des films qu’il faut absolument avoir vus?
Oui. Nous avons une petite partition, Karine (Vanasse) et moi, mais qui a aussi son importance. Il faut surtout penser à cette femme autochtone, à son histoire, à sa vie qui nous est racontée. Je trouve que c’est un bien beau film.

On vous a confié un rôle de méchant, mais ce n’est pas votre premier en carrière...
C’est vrai, mais c’est mon premier rôle de pédophile. Comme tout le monde, je savais que les religieux abusaient des enfants. C’est connu, et c’est encore un sujet délicat au sein de l’Église catholique. Ce n’est toujours pas réglé. Je me suis demandé comment nous allions tourner les scènes d’abus avec une petite fille de sept ans. Marie (Clements, la réalisatrice) m’a rassuré: quand on me voit toucher la cuisse de la jeune fille, c’est une adulte qui a pris sa place. La jeune actrice n’a rien vu de ces scènes.     

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En tant qu’acteur, vous teniez à témoigner de ce qui a eu lieu et qui doit être dit?
Effectivement. C’est une histoire qui doit être racontée et c’est pour cette raison que j’ai accepté de faire le méchant. Marie avait vu mes films, elle savait qu’elle me proposait un rôle difficile. Je ne suis pas habitué à incarner ce genre de personnage, mais elle voulait vraiment que je le fasse. Ce qui me guidait dans le jeu, en accord avec la réalisatrice, c’est que mon personnage est certain de faire la bonne chose, sauf quand il agresse sexuellement. Ce sont des sauvages qu’il faut civiliser. L’histoire doit être racontée le mieux possible et de la manière la plus vraie possible. Les images sont très belles, et on voit les autochtones dans leur vie de tous les jours.

Vous retrouvez Karine 20 ans après avoir tourné Séraphin avec elle...
Oui, je jouais son papa, le père Laloge. C’était presque à ses débuts. Nous nous retrouvons dans ce film, dans lequel nous avons tourné ensemble une scène très, très dure...

Testament sortira sur nos écrans sous peu. C’est un autre projet des plus attendus?
Oui. Denys et moi, nous nous sommes retrouvés. C’est notre septième film en 40 ans. Le premier remontait à 1982. J’ai fait Le crime d’Ovide Plouffe avec lui. Entre lui et moi, c’est un duo, une collaboration, au même titre que De Niro et Scorsese, ou encore Jean-Pierre Léaud et François Truffaut. Il y a des atomes crochus entre nous. Ça nous a amenés à Cannes et aux Oscars. 

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Quand on a dit Cannes et Oscars dans la même phrase, de quoi peut-on rêver encore?
(Rires) Nous sommes allés quatre fois à Cannes et trois fois aux Oscars, si je me souviens bien. Ce que je souhaite, c’est de continuer le plus longtemps possible. Je souhaitais avoir des rôles aussi intéressants à mon âge. J’ai hâte à la sortie de Testament pour voir comment le film sera reçu. C’est toujours le point de vue d’Arcand sur notre société moderne. Aujourd’hui, ça s’appelle les wokes, les non-genrés, etc. 

Y a-t-il d’autres projets à l’horizon pour vous?
C’est STAT qui prendra la place à la rentrée. J’ai hâte de voir comment ça va se passer. J’ai beaucoup aimé la série, entre autres, l’épisode sur l’enfant prématuré. C’est exactement ce que j’ai vécu avec mon fils, sauf que le petit dans l’émission s’en sort mieux. Je me suis reconnu. Aller à l’hôpital tous les jours, ça colle vraiment à la réalité des parents de ces enfants. Je ne sais rien sur mon personnage: je sais juste qu’il est le père de celui de Stéphane Rousseau. 

Aurez-vous un petit répit avant d’entreprendre ces tournages?
Ce mois-ci, j’irai à la pêche avec mon frère. Ça fait trois ans que nous n’y sommes pas allés, à cause de la pandémie. Nous faisons toujours un voyage annuel dans Lanaudière. Nous comptons les dodos! (rires)

Vous allez aussi compter les mouches...
(Rires) Sur un lac, il n’y a pas de mouches... Mais au chalet, oui! Par la suite, je vais être à la maison de campagne. Je n’ai pas de problème à décrocher. Quand j’ai fini un tournage, c’est fini.      

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Un mot sur le balado auquel vous avez participé avec Marina Orsini et dans lequel vous évoquez la vie avec votre fils. A-t-il beaucoup fait réagir?
Je sais que depuis, on a pas mal contacté le centre de jour Les Fantastiques de Magog, que fréquente mon gars, pour poser des questions sur le fonctionnement du centre. 

Pour vous, c’est l’occasion de faire œuvre utile et de faire connaître cette réalité?
Oui, pour donner la parole aux parents qui ont un enfant handicapé. Je ne le fais pas souvent. Je trouvais qu’avec Marina, qui est une amie personnelle, c’était approprié. À l’époque où mon fils séjournait beaucoup dans les hôpitaux, j’ai rencontré d’autres parents. Les gens me disaient que lorsque j’en parlais, ça leur faisait du bien, car personne ne le faisait. C’est un sujet tabou.

Alors que cette réalité concerne tellement de parents...
Si vous saviez comme il y a de nombreuses naissances toutes croches... Vous ne pouvez même pas vous imaginer! Mon fils a passé trois mois aux soins intensifs du Montreal Children’s Hospital. J’en ai vu des vertes et des pas mûres... Certains n’arrivent pas à en sortir. C’est quelque chose! Et c’est sans compter les enfants que les parents ne visitent pas. Ça aussi, ça existe... Les naissances difficiles, c’est un monde que les gens ne connaissent pas. J’ai bercé d’autres enfants que le mien. Quand les parents ne venaient pas les visiter, quand ils habitaient trop loin, que c’était compliqué, je les berçais. Je me souviens d’un petit Inuit qui était toujours seul. Ses parents ne venaient jamais le voir. 

C’est touchant, quand même...
C’était un bébé naissant. Quand j’avais fini de bercer mon fils, je le berçais. Ce n’était pas mon enfant, mais je le berçais pour qu’il sente une présence. En plus, les soins intensifs pour un bébé, c’est une agression. C’est éclairé en permanence, il n’y a ni jour ni nuit dans leur vie. Quand ils rentrent à la maison, bonne chance! J’ai été six mois sans dormir à cause de mon fils! Il ne savait pas qu’il fallait dormir la nuit. Je le couchais avec moi pour lui montrer que la nuit, il fallait dormir. Ce sont des univers difficiles. 

Cela nous donne beaucoup de compassion pour les parents qui se dévouent sans relâche. Ça ne finit jamais...
Non. Mon fils a 26 ans, et c’est encore mon bébé... (rires)

Le film L’ombre des corbeaux (Bones of Crows) sera présenté en salle dès le 2 juin.
Des histoires qui résonnent: le balado des proches aidants, animé par Marina Orsini, est notamment offert sur Balado Quebec et Spotify.
La série
STAT sera de retour cet automne à Radio-Canada.
Le film
Testament sortira en salle le 5 octobre.

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