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Les policiers ont perdu le respect des criminels et le soutien du système de justice

Photo Agence QMI, Joël Lemay
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Yannick Beaudoin

16 avril à 15h47
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C’est un profond découragement qui habite plusieurs policiers du Québec face à la complexification de leur tâche et le manque de support du système de justice.

En entrevue à l’émission de Benoît Dutrizac, diffusée à QUB radio et télé, diffusé simultanément au 99,5 FM Montréal, le président de l’Association des directeurs de police du Québec, Pierre Brochet, a fait part des préoccupations de ses membres et lui face à leur métier qui est plus difficile à exercer que jamais.

«Il y a eu des décisions au niveau des lois qui se sont prises dans les dernières années, qui nous préoccupent grandement», mentionne-t-il.

• Sur le même sujet, écoutez cet épisode balado tiré de l'émission de Benoit Dutrizac, diffusée sur les plateformes QUB et simultanément sur le 99.5 FM Montréal :

Ce dernier critique notamment l’adoption du projet de loi fédéral C-5, qui a entraîné plusieurs modifications au Code criminel qui, selon M. Brochet, mettent des bâtons dans les roues des membres des forces de l’ordre.

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«Dans un premier temps, il y a eu l'abolition des peines minimales obligatoires dans la plupart des infractions, mais l'autre élément qui a encore plus d'impact, je dirais, c'est que la norme, c'est de libérer les personnes. On ne veut pas emprisonner les personnes. Et ça, ça se base sur la surreprésentation des minorités ethniques dans les pénitenciers, dans les prisons du Canada», mentionne Pierre Brochet.

L’Association des directeurs de police du Québec est d’avis que la situation n’est pas envisagée de la bonne manière.

«Si certaines minorités visibles sont surreprésentées dans nos établissements de détention, la solution n'est pas de libérer tout le monde tout le temps», clame M. Brochet.

«On trouve qu'on devrait se réfléchir à la raison pour laquelle, par exemple, les gens des communautés autochtones sont surreprésentés dans les pénitenciers, et aller voir c'est quoi les raisons et c'est quoi les solutions à ça, au lieu d'encourager la libération des criminels. En fait, on arrête des gens, le lendemain, ils sont sur le terrain, ils sont libérés, et c'est la répétition. Donc c'est un peu exaspérant pour nos policiers», ajoute-t-il.

Ces préoccupations sont partagées par l'Association canadienne des chefs de police, dont M. Brochet est le vice-président.

«Souvent, pour arrêter un individu, ce sont des mois d'enquête et beaucoup d'argent d'investi pour être capable de posséder des arrestations, mais on ne les garde pas en détention», déplore-t-il.

Cette situation est très démoralisante pour les policiers, souligne Pierre Brochet.

«Quand tu deviens policier, tu sais qu'il y a un risque. Tu sais qu'il y a un risque. Tu mets ton uniforme, tu mets ton arme. Chaque jour, tu te dis: "Je peux être obligé de tirer sur quelqu'un. Je peux vivre une situation difficile où je me fais tirer dessus." Et tu l'acceptes. Sinon, tu ne deviendrais pas policier. Mais tu t'attends, toutefois, que le système de justice, particulièrement, va te supporter. Tu t'attends que si quelqu'un, à la fin, finit par te tirer dessus [...] qu'il va y avoir des conséquences. Là, vraiment, nos barèmes sont complètement bouleversés», affirme le président de l'Association des directeurs de police du Québec.

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Des criminels mineurs qui ressentent une impunité

Le 11 avril dernier, un groupe d’adolescents s’en est pris à deux policiers du SPVM à Pointe-aux-Trembles.

L’an dernier, à Laval, les policiers ont été appelés à intervenir en raison de jeunes de 15-16 ans qui étaient apparemment armés. Les agents de police sont intervenus pour finalement réaliser qu’il s’agissait de fausses armes. Le Service de police de Laval avait été largement critiqué à la suite de cet événement.

Pourtant, ce type d’incident fait partie de la réalité bien difficile avec laquelle les policiers doivent composer, soutient Pierre Brochet.

«Ça a commencé avec les fusillades, les vols d'auto. Les mineurs sont impliqués maintenant dans des criminalités de plus en plus violentes. Et il y a [...] une certaine impunité parce qu'ils sont mineurs. C'est ça, la réalité dans laquelle on vit», clame-t-il.

Celui qui est aussi directeur du Service de police de Laval estime qu’il faut mieux sensibiliser la population à cet aspect du métier de policier.

«Ce n'est plus vrai qu'un jeune de 15 ans dans un parc ne peut pas être une menace pour les policiers maintenant», souligne M. Brochet.

«On a perdu cette notion-là un peu de respect. C'est un peu un phénomène de gang de rue. Une gang ensemble qui se mobilise[...] Ils attaquent les policiers et envoient des policiers à l'hôpital. On est rendu là», ajoute-t-il.

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