Patricia Paquin et Mathieu Gratton unis grâce à leur fils Benjamin
Michèle Lemieux
Séparés depuis de nombreuses années, Patricia Paquin et Mathieu Gratton ont choisi de vivre leur relation dans l’harmonie. Parents de Benjamin, un jeune adulte atypique, les ex ont à cœur le bonheur de leur fils. Quinze ans après nous avoir présenté un premier spectacle, le couple revient à la scène avec Les EXséparables, un tout nouveau show des plus prometteurs qu’ils écrivent ensemble. Entretien sur un mode incisif, à l’image du show à venir...
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Patricia et Mathieu, qu’avez-vous au programme sur le plan professionnel?
Patricia: Je suis à la radio de Rythme FM avec Marie-Eve Janvier. Et le plus drôle, c’est qu’au même moment, Marie-Eve et moi allons nous partager Joël (Legendre), qui mettra en scène Waitress, mais aussi notre spectacle, Les EXséparables.
Mathieu: Je viens de terminer le tournage de mon documentaire avec Benjamin. Il est parti seul en appartement pendant 30 jours. Ç’a été une expérience intéressante. Les gens verront tous les enjeux auxquels il a été confronté. Ça permet de sensibiliser les parents aux différentes réalités d’un jeune adulte autiste. Je suis actuellement à la chasse au diffuseur. P.: Benjamin travaille beaucoup, entre autres, Chez Cheval. Il a trois emplois.
Ce ne sera pas la première fois qu’on vous verra ensemble sur scène. Qu’allez- vous nous proposer avec Les EXséparables?
M.: C’est un tout nouveau spectacle, 15 ans plus tard, qui n’a rien à voir avec le premier. Cette fois-ci, nous sommes en stand-up comique à deux. Comme ça fait 15 ans que nous ne sommes pas montés sur scène ensemble pour faire de l’humour, nous faisons une rétrospective de ce qui s’est passé dans nos vies personnelles et aussi dans la société. Ça nous permettra de nous taquiner et d’aborder des sujets d’actualité.
Entre autres, famille recomposée et garde partagée, je présume...
M.: Oui, mais il sera aussi question de conciliation travail-famille, de minorités visibles. Nous ferons de la thérapie de couple pour les gens qui sont dans la salle.
P.: Le premier spectacle s’appelait Les Ex et il était basé sur notre ancienne vie de couple. Cette fois-ci, le spectacle s’appelle Les EXséparables. On nous demandait souvent, à Mathieu et à moi, de faire une conférence, un partage de vécu, ne serait-ce que parce que nous sommes les parents d’un jeune atypique. C’est un exercice que je n’avais pas envie de faire. Je ne pouvais pas concevoir d’être payée pour partager notre vécu et jaser avec du monde. Cette fois-ci, ce sera un spectacle avec une mise en scène et c’est la showgirl qui montera sur scène.
Vous partirez en spectacle à travers le Québec, si je comprends bien?
P.: Malheureusement, oui...
M.: Nous ne ferons pas de covoiturage. Si nous voulons que la tournée dure longtemps, il ne faudra pas exagérer! (rires)
Les ex s’entendent bien, mais à petite dose?
M.: Effectivement. Et après la tournée, nous espacerons sûrement nos communications. Dans le spectacle, le ton entre nous est très irrévérencieux. Nous comptons aborder certains sujets que nous n’avons plus vraiment le droit d’aborder. Nous avons envie de toucher un peu à ces sujets moins populaires.
Pour aller de l’avant avec ce projet, ça prend une grande complicité. Vous avez réussi ce passage délicat entre l’amour et l’amitié?
P.: Pas vraiment. C’est vraiment devant le public que nous vivons notre complicité. Sinon, nous ne la recherchons pas.
M.: Il n’y a eu qu’un passage délicat durant cette transition. Nous sommes allés en médiation. Le plus difficile, ç’a été de convaincre Patricia qu’elle ne pouvait pas être la médiatrice! Elle est contrôlante. Dans ma vie, je n’ai plus que l’aspect positif de ce contrôle. Par exemple, je suis convaincu qu’en tournée, elle va bien gérer ça.
Après votre rupture, quand l’un de vous deux a eu un conjoint, est-ce que ce passage a été un moment stratégique dans votre relation d’ex?
M.: Pas du tout, parce que j’avais déjà une blonde quand j’étais avec Patricia... Je blague!
P.: Ce ne sont pas tant des blagues...
M.: Ben voyons! J’ai quand même été deux semaines célibataire! Ça ne nous a jamais vraiment dérangés. À mon âge, je peux en rire. Aujourd’hui, je suis plus mature en relation. Patricia a eu droit au pire de moi, mais je pense m’être amélioré avec le temps.
P.: Au moins, tu le sais! La vérité, c’est que le temps a passé, les choses se sont déposées et sont très claires. Il n’y a pas d’ambiguïté entre nous. S’il n’y avait pas eu Benjamin, je n’aurais pas vraiment eu de contacts avec Mathieu. C’est Benjamin qui nous a gardés unis.
M.: Notre complicité a augmenté avec les années. Elle est naturelle. Les gens qui nous voient dans la vraie vie peuvent penser que nous ne nous aimons pas, mais nos échanges, ce sont des vacheries gentilles. C’est ce qu’il reste de notre amour.
Que vous le vouliez ou non, vous formez une équipe pour la vie. Mieux vaut vivre cette situation dans l’harmonie, non?
M.: Oui. Et sur scène, nous n’essayons pas de dire aux gens que nous sommes parfaits. Je pense que ça donne de l’espoir aux couples qui se séparent. Ils voient que c’est possible de bien s’entendre, au point même de faire une tournée de spectacles ensemble. Pour le bien des enfants, il faut éviter la chicane. Si on ne le fait pas pour nous, il faut le faire pour eux, car ce sont eux les grands perdants. Patricia et moi mettons de l’eau dans notre vin pour notre enfant.
P.: Je crois aussi que ça peut donner de l’espoir aux couples qui viennent de se séparer. Il faut savoir que le temps arrange les choses...
Après tout, pour un couple, le fait de se séparer n’est pas un échec en soi...
P.: Dans mon cas, je dirais même que cela a donné lieu à une renaissance!
Mathieu, la rupture vous a-t-elle imposé un grand deuil?
P.: Mathieu a sacré son camp. On ne peut pas parler de deuil pour lui... Ç’a été un grand débarras!
M.: Dans le cas d’une rupture, même lorsque c’est nous qui la choisissons, il y a toujours une période d’adaptation. Ce n’est pas parce que nous décidons de nous séparer que nous n’avons plus de sentiments. Parfois, ce n’est pas parce que nous ne nous aimons plus, mais parce que nous ne sommes plus à la même place. Maintenant entre nous, ce n’est pas tant de l’amour que de l’amitié.
Comment vos conjoints respectifs entrevoient-ils que vous repreniez la route ensemble pour ce spectacle?
P.: Louis-François ne m’a jamais empêchée de faire quoi que ce soit, que ce soit pour aller tourner à l’extérieur du pays ou partir en tournée. Il m’a toujours encouragée à faire ce dont j’avais envie. Je suis à la radio, et Mathieu vient d’avoir un bébé. Nous respectons notre rythme.
M.: Nous ne comptons pas présenter quatre shows par semaine. Ma blonde est emballée: elle adore Patricia! Si c’était une autre de mes ex, peut-être que ça passerait moins bien, mais Patricia est assurément l’ex la plus rassurante qui soit. Patricia et moi avons plusieurs points communs. Nous avons tous deux eu notre dernier enfant à 47 ans. Il n’est jamais trop tard pour faire ce qu’on a envie de faire. Nous profitons de la vie et nous nous amusons.
P.: Il faut savoir se mettre en danger, se challenger, ne pas rester dans le petit chemin déjà tracé tant sur le plan professionnel que sur le plan personnel. J’ai un conjoint qui me permet cela. Nous pouvons nous lever un matin et nous dire que nous avons envie de tourner à droite. Et nous virons à droite alors que nous n’en avions jamais parlé avant. Nous nous amusons.
Vous arrive-t-il de vous taper sur les nerfs? Ressentezvous parfois le besoin de prendre du recul?
P.: Nous n’avons pas tant besoin de nous éloigner. Nous sommes physiquement loin, ne serait-ce que parce que Mathieu habite à l’autre bout du Québec. Heureusement que notre fils tripe sur les transports! Quand il se retrouve dans un autobus ou un train pour parcourir des kilomètres, ça le rend heureux. S’il a trois heures de route à faire pour aller chez son père, ça ne lui pose pas de problème. Alors non, nous n’avons pas besoin de prendre du recul.
M.: Les choses se font naturellement. Lorsque nous n’avons pas envie de nous parler, nous nous envoyons des messages texte. Quand nous devons discuter de choses plus importantes, nous nous appelons. Nous ne nous rendons pas au point de nous taper sur les nerfs. Nous choisissons notre mode de communication en fonction de l’importance du message.
P.: Quand Mathieu me tape sur les nerfs, je ne dis rien...
Comme parents, êtes-vous fiers de voir l’évolution positive de votre fils?
M.: Nous sommes fiers de lui, car nous ne pensions pas qu’il se rendrait là. Mais nous sommes aussi fiers de constater l’impact que Benjamin peut avoir autour de lui. Il est allé aux Gémeaux avec Patricia, et j’en entends régulièrement parler. Quand j’ai vu l’ovation à laquelle il a eu droit, j’ai réalisé à quel point c’était important qu’il y ait des personnes différentes à l’écran. J’ai senti la reconnaissance du milieu face à ces producteurs qui osent mettre quelqu’un qui a un handicap ou une personne autiste à l’écran quand c’est possible de le faire. Benjamin ne se rend pas compte de toute son utilité, mais ça me rend fier de voir l’impact qu’il a.
P.: Je suis d’accord avec Mathieu. J’ai tout aimé de ma présence aux Gémeaux avec Benjamin. J’ai vu comme il était heureux, et le regard que les gens du milieu portaient sur lui. Quand ils le croisaient, les gens le saluaient, de Marie-Mai à Véronic DiCaire. C’était tellement hot! Au même moment, je vivais les dernières journées de mon papa. J’étais dans un tourbillon d’émotions, mais lorsque nous sommes arrivés à la Place des Arts, nous avons profité du moment. Ça faisait longtemps que je n’avais pas vécu une soirée magique comme celle-là!
Patricia Paquin et Mathieu Gratton amorceront le rodage de leur spectacle les EXséparables en avril 2024. La première aura lieu en septembre. Benjamin joue un rôle dans la série STAT. On peut le suivre sur sa page Facebook Le monde de Benjamin. Patricia est à Rythme FM aux côtés de Marie-Eve Janvier. Elle animera le documentaire L’épreuve des mots, qui sera présenté à Télé-Québec en février. On pourra suivre Patricia dans Sortez-moi d’ici! à l’hiver, sur les ondes de TVA. Mathieu continue de proposer des conférences sur la différence et il planche également sur un projet littéraire.
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