Résistant au vaccin? Plus virulent? On répond à vos questions sur l’inquiétant variant Omicron
Andrea Lubeck
- On en sait toujours très peu sur le variant Omicron, mais ses nombreuses mutations suscitent l’inquiétude.
- Des observations préliminaires semblent déterminer qu’il est hautement transmissible.
- Comme Québec a cessé de faire du criblage, il est possible que nous sous-estimions le nombre de cas d’infection à ce variant dans la province.
Après la découverte d’un cas au Québec et de deux autres en Ontario, de nombreuses questions surgissent sur le nouveau variant Omicron, classé «préoccupant» par l’OMS. Malgré les nombreuses incertitudes, un expert répond à nos interrogations.
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Pourquoi ce variant est-il inquiétant?
Ce qui est préoccupant chez le variant B.1.1.529, baptisé Omicron, c’est son «grand nombre de mutations, dont certaines sont préoccupantes», indique l’Organisation mondiale de la Santé (OMS).
C’est aussi ce qui le différencie des autres variants, le Delta − qui est actuellement le plus répandu dans le monde − n’ayant que quelques mutations.
Ses mutations sont «concentrées avant tout dans une zone de la protéine [spike] qui interagit avec les cellules humaines», expliquent des chercheurs du prestigieux hôpital Bambino Gesù, à Rome, qui ont réalisé une «image» tridimensionnelle du variant.
Omicron, l'Ue al G7: 'Azione rapida per l'aumento delle vaccinazioni'. Kyriakides: 'Dobbiamo accrescere la nostra protezione'. #ANSA https://t.co/On27UnXuTa
— Agenzia ANSA (@Agenzia_Ansa) November 29, 2021
«Cela ne signifie pas automatiquement que ces variations sont plus dangereuses, simplement que le virus s’est encore adapté à l’espèce humaine en générant un autre variant», disent-ils.
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À quelle vitesse se propage-t-il?
Ce qui suscite aussi l’inquiétude, c’est qu’il semble, pour l’instant, être plus transmissible que les variants précédents. «[...] Le variant a été détecté à des taux plus rapides que les poussées d’infections précédentes, ce qui incite à penser qu’il peut avoir un avantage de croissance», précise l’OMS.
«À Johannesburg et à Pretoria, le variant Omicron a presque déjà complètement remplacé le Delta. C’est fulgurant comme transmission, ça laisse indiquer qu’il se propage rapidement», souligne Alain Lamarre, professeur et chercheur en virologie-immunologie à l’Institut national de la recherche scientifique (INRS).
Plus ou moins virulent que les autres variants?
Pour l’heure, c’est difficile à dire. La docteure sud-africaine Angelique Coetzee a affirmé que les symptômes des personnes infectées au variant Omicron seraient plutôt «légers» comparativement à ceux du Delta.
Celle qui est aussi présidente de l’Association médicale sud-africaine a raconté à la BBC que son premier patient avec des symptômes jugés inhabituels n’avait pas de mal de gorge, mais plutôt une sensation de «grattage», une fatigue extrême, des courbatures et un mal de tête. Il ne présentait pas non plus de perte de goût ou d’odorat ni de toux, des symptômes typiques des autres variants du coronavirus.
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Bien que ce serait «une bonne nouvelle» si la virulence du variant est faible, Alain Lamarre appelle à la prudence. «On ne peut pas seulement se fier à une seule docteure. Il va falloir beaucoup plus de cas qui viennent de plusieurs endroits pour confirmer ou non que ce variant-là donne une maladie plus ou moins sévère.»
Il rappelle que le but d’un virus n’est pas de tuer son hôte, mais bien de se multiplier, si bien qu’il est normal de voir une atténuation de la virulence d’un virus dans le temps. «C’est arrivé à la grippe, notamment, donc on pourrait s’attendre à ce que ce soit aussi le cas pour la COVID-19.»
Ce n’est pas tout. Un autre inconnu de ce variant: on ne sait pas s’il cause des troubles à long terme, comme la COVID longue ou des syndromes inflammatoires, comme on le voit avec le variant Delta. «Tout ça reste encore à déterminer. On en a pour des semaines ou des mois encore à mieux comprendre ce variant-là», ajoute l’immunologue-virologue.
Les vaccins sont-ils efficaces contre le variant?
Il est encore trop tôt pour savoir si les vaccins sont capables de neutraliser le virus. Mais certaines caractéristiques de ce variant font craindre le pire.
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«Il a une signature moléculaire qui pourrait laisser entendre que les vaccins actuels pourraient possiblement être moins efficaces», précise Alain Lamarre. Cela reste toutefois à confirmer en laboratoire et d’un point de vue épidémiologique, ajoute-t-il, ce qui pourrait prendre quelques semaines encore.
«Si le vaccin n’est pas efficace contre le variant, on va le voir se propager aussi bien chez les vaccinés que chez les non-vaccinés», précise aussi le virologue-immunologue.
Le patron de Moderna a pour sa part révélé, dans une entrevue au Financial Times, que les vaccins existants contre la COVID-19 seront moins efficaces contre le variant et qu’il faudra plusieurs mois pour mettre au point un nouveau vaccin. Les données sur l’efficacité des vaccins actuels seront disponibles dans les deux prochaines semaines, a-t-il dit.
Malgré cela, une chose est certaine: il ne faut pas attendre de connaître les résultats de ces analyses avant d’aller se faire vacciner. En effet, le variant Delta, contre lequel les vaccins sont efficaces, demeure la souche principale d’infections au Québec, note Alain Lamarre.
Que se passe-t-il si le variant se propage au Québec?
Sa propagation au Québec semble déjà inévitable, sachant qu’un cas a été détecté ici et que les deux cas confirmés en Ontario ont transité par l’aéroport Montréal-Trudeau. Et comme Québec avait cessé de faire le criblage, il est fort probable que le nombre de personnes infectées au variant Omicron dans la province soit sous-estimé.
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En conférence de presse lundi, le directeur national de santé publique, le Dr Horacio Arruda, a cependant affirmé que le criblage reprendra pour détecter les cas d’infection au variant Omicron.
Selon Alain Lamarre, il y a deux scénarios possibles qui dépendent chacun de la capacité ou non du variant à contourner l’immunité conférée par les vaccins. Le scénario idéal, celui selon lequel le variant répond bien ou baisse un peu l’efficacité des vaccins, rend la situation moins préoccupante parce qu’on peut continuer avec le même vaccin.
Si c’est plutôt le scénario catastrophe qui se produit, selon lequel le variant contourne l’immunité, il faudra que les fabricants de vaccins les adaptent pour tenir compte des nouvelles mutations, ce qui peut prendre plusieurs mois.
Le professeur et chercheur affirme que les Pfizer-BioNTech et Moderna de ce monde sont déjà à pied d’œuvre pour modifier leur vaccin, mais encore faut-il trouver la bonne formule. Ces vaccins modifiés devraient ensuite être produits en masse, puis finalement distribués.
– Avec l’AFP